Plume de satin Inscrit le: 5/7/2008 De: Albion Envois: 23 |
Le temps des légendes La pierre blanche qu’ont tenu les poètes durant leur règne est tombé en sable, écoulé dans un entonnoir lisse et verni pour qu’elle file plus vite. Et des siècle de muse, il semblerait que tout le monde ait vu la même, comme un Dorian Gray version féminine, qui se balade dans les mécanismes du temps, enjambant les roues, nageant dans l’huile, pour venir se poser devant les yeux des ajusteurs de verbes.
Elles sont mortes.
Elles ont disparu pour ne laisser qu’une trace à gratter jusqu’au sang.
Puis le boire.
Et raconter cette pause qui dure plusieurs minutes. Une paire de secondes en temps effectif.
Les lignes ne doivent être que demain, comme un vaste champ encore vert où l’on s’échauffe les pieds. Il brûlera demain. Les lignes sont l’éclair qui sort de l’eau, fraîchement évaporé, tout suintant dans un air sec et chaud. A son jour d’attaque, il oubliera les prismes qui l’occupent. Les maîtres de la couleur domineront l’éclair, pauvre chien invisible qui descend en trombe, fier de sa force, réduit à une empreinte matérielle. Il n’existera que par ses méfaits, les légendes le rendront hideux comme une mante, sournois comme une hyène. Les poètes viendront enjoliver cette rumeur d’un rayon irréel, pas la changer. Ils viendront exister sur quelque chose. Sûrs. Sûrs des mots employés, du rythme, des structures faussement déstructurées. Phénomène millénaire.
Au fond des lignes une porte bien close, les routes sont des libellules, les matins sont des feuilles entourées de sève séchée par un astre animal aussi chaud qu’un ballon qui s’envole. Le temps, « l’autre ». « L’autre », où les muses égorgées aux vieilles fleurs deviennent éclair. « L’autre ». Refuge de brindilles. Les brindilles des lignes qui flottent sans vie ni envie sur l’énervement dissimulé d’un nuage frais. Il pleut, demain.
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