Plume de soie Inscrit le: 20/7/2021 De: |
Raison et déraison Mon enfant, mon soleil, ma chair et ma passion, Ta mère nous quitta en murmurant mon nom. Le cierge s'est éteint au moment de ses jours, Et son âme partit à son dernier séjour.
Je revois la blancheur de sa peau de jeunesse, Je revois ses yeux bleus tout emplis de détresse. Ondine du rivage, elle trempait à l'eau Ses pieds blonds comme l'or et son cheveu si beau !
Je la vis deux cents jours avant de l'aborder, Mais mon bruit l'effara, vierge de pureté. Je revins abattu, ne faisant plus mon âge, Et j'avalai tout cru les crèmes du langage.
Le soleil nous revint et mes chances avec. Le soleil fut si fort que le lit était sec, Et la vierge envolée, sa blondeur disparue. Et voilà qu'aujourd'hui, elle écoute des nues.
Il me fallut attendre que l'été passa Pour revoir mon soleil, qui tourmentait mes pas, Au creux de la vallée, au lit de la rivière, Baignant son pied mignon, naïve à ses arrières.
J'utilisais l'écho aux larges ailerons Pour porter en sanglot mon amour sans raison. Le soleil se tourna. Le soleil m'éblouit. Le soleil était rouge. Ah ! c'était inouï.
Quand je repense à elle, aux jours que nous vécûmes, Je la revois alors se couchant dans l'écume, Comme on voit à présent que s'est tournée la page Son corps de firmament couler dans les nuages.
Était-ce la chaleur ? Était-ce l'émotion ? Une pointe en son cœur ? Une indisposition ? Ta mère de rougeur devint toute blancheur, Et le sol accueillit sa faiblesse ou sa peur.
On eut dit un instant que les fleurs approchaient Pour couvrir sa blancheur de mille et un baisers. Le vent ne soufflait plus. Les oiseaux volaient bas. L'écho dès lors se tut. Le loup hurla trois fois.
Il me revient encor qu'en cette triste nuit Où son corps s'endormit, où son âme s'enfuit, Pas un vent ne soufflait et que les loups hurlaient, Que l'écho les portait jusqu'en cette vallée.
Te souvient-il, enfant, de son chapeau d'aigrette, Celui à plume blanche et tendue de soie verte, Qu'elle portait au jour où nous nous épousâmes Et que tu la suivais comme une grande dame ?
Te souvient-il encor de sa robe d'hermine Qui rendait un hommage à sa taille si fine ? Et de son chausson d'or couvert de pierreries Dans lequel une chatte avait mis ses petits ?
Je ne me souviens plus que des mots pour les dire. Seul je revois encore à l'heure du nadir, Recouvrant tout son corps en sinistre étendard Le long tissu brodé de grosse laine noire.
As-tu su, mon enfant, ses dernières paroles Avant que les curés ne la laissent au sol ? As-tu su d'une voix comme elle commanda Qu'à seule une plus belle, je donnasse ma foi ?
As-tu su qu'à ta mère je promis d'obéir ? As-tu su que ton père, avant que de vieillir Voulait redécouvrir les plaisirs du mariage, Qu'il me naisse un garçon après ce long veuvage ?
As-tu su que ta mère avait porté la robe Qui dessine ton corps, et que ton père est probe ? As-tu su qu'en mes nuit je murmurais ton nom, Mon enfant, mon soleil, ma chair et ma passion ?
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