Le fleuriste l’avait vu chez lui dès le matin,
Et ce qu’il avait pris, il l’avait en mémoire :
Deux roses d’un rouge intense pour la Saint-Valentin,
Il avait l’air pressé comme un homme en retard.

Il s’était dit : « Servir les hommes qui honorent leur femme,
Est-il donc un métier plus noble que le mien ?
J’aide les amoureux à déclarer leur flamme
Moi qui leur vends des fleurs, prémices des câlins.

Vous savez, lui dit-on, que la Saint-Valentin
A pour but de booster votre chiffre d’affaires,
Et que l’on peut vraiment s’aimer tout aussi bien,
En écrivant pour elle, exprès, quelques beaux vers.

Il est, selon certains, tout autant sympathique,
De cueillir sur le net des roses et du jasmin,
D’envoyer en un clic sa carte numérique,
Et cela, encore mieux, ne vous coûtera rien.

Ah ! Monsieur, que vous me semblez pingre,
J’ai envie de citer quelques mots de ma mère :
« Il doit être grand prince celui qui fait du gringue,
S’il prétend avec moi s’embarquer pour Cythère ! »

C’est vrai, je vois beaucoup de romantiques,
Qui viennent m’acheter de si jolis bouquets
Mais il y a aussi bien des cyniques,
Et qui montrent un sacré toupet.

Celui qui est déjà passé très tôt dès le matin,
Est venu démontrer une grande largesse :
Un somptueux bouquet pour la Saint-Valentin,
Celui-ci destiné, sans doute, à sa maîtresse.

Dumnac