CHARLOTTE FILLE DE JOIE

C’était une fille de joie
Au petit sourire un peu narquois
Qui mettait les cœurs en émoi
Non elle n’avait pas un cœur de bois
Elle ne marchait pas toujours très droit
Mais qu’elle était belle ma fois

Ô jolie Charlotte, fille de joie
Qui mettait les cœurs en émoi

Juchée sur ses talons aiguilles
Elle était reine, pas en guenilles
Son corps aux effluves vanille
Sculptural, sensuel, plein de vie
Ondulant, monté sur roulements à billes
A tous les hommes donnait des envies

Ô jolie Charlotte, fille de joie
Qui mettait les cœurs en émoi

Elle avait une voix un peu vulgaire
Elle ne jouait jamais la fille de l’air
Elle aimait montrer son joli derrière
Ô non elle n’avait pas d’œillères
Elle vous fixait, provocante, sans manières
Son regard disait viens, dessert

Ô jolie Charlotte, fille de joie
Qui mettait les cœurs en émoi

Accoudée au bar, en habituée
Son mégot partant en fumée
Sa jupe courte, sur ses jambes, relevée
Elle n’avait pas l’air d’une sainte, mais délurée
Elle animait souvent la soirée
Racontant des histoires, salées

Ô jolie Charlotte, fille de joie
Qui mettait les cœurs en émoi

Eté comme hiver elle était là
Parfois son regard trouble était las
Le visage tiré, pale, le sourire, pas là
Stigmates d’une nuit d’orgie, de gala
A force de passes, d’alcool, de fumée, ah
A trop abuser, on passe de vie à trépas

Ô jolie Charlotte, fille de joie
Qui mettait les cœurs en émoi

Elle s’est éteinte un soir de mai
A la fleur de l’âge, ravagée mais
Laissant derrière elle, larmes ou quolibets
Malgré tout cela, nos cœurs elle ornait
Et la profondeur de nos âmes elle touchait
Car elle était Charlotte, unique et touchante il est vrai

Ô jolie Charlotte, fille de joie
Qui ne met plus les cœurs en émoi

Sur sa tombe il est écrit
Ci gît Charlotte, fille de joie
Adieu toi

Jean-Jacques Kindler
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