Je suis sorti de ma tanière avant la fin de l’hiver,
Car désormais mon humeur est passagère et légère,
Je me sens presqu’aérien, tel un papillon bleu et rouge,
Je ne tire plus automatiquement sur tout ce qui bouge.
A moi l’éloge de la lenteur, de la contemplation,
Aux stressés, énervés et pressés, je dis faites attention,
N’oubliez donc plus d’où vous venez, où vous allez,
Prenez soin à nouveau de votre seule richesse, la santé.
Quant à moi, j’esquisse quelques pas de danse,
L’ours, c’est bien connu, est doué pour la cadence,
Véritable maître de ballet, demandez aux abeilles,
Qui se piquent de l’imiter, emmiellées jusqu’aux oreilles.
Je danse et je bondis, Ă©cartant les nuages,
Lourds, sombres et gris, vilains présages,
Annonçant la pluie qui m’indiffère,
Entre les gouttes, je file sur un dernier air.
Je défie la pesanteur de cette terre trop grasse,
Je clos ma danse sur une pirouette sans disgrâce,
Mon cœur est léger, l’air vibre, tiédi et embaumé,
Enivré de douceurs, je m’assoupis, j’ai envie d’aimer.
Je rêve de poissons rouges et de papillons s’envolant,
De belles et vrombissantes abeilles dans les cieux volant,
Larguant leurs bombes de miel dans ma bouche gourmande,
En dociles escadrilles serrées, obéissant à ma demande.
Je me réveille aux sons de la forêt mystérieuse,
De nouveau prêt malgré des jambes paresseuses,
A m’élancer dans un rapide jeu de jambe endiablé,
J’esquisse la danse de l’ours joyeux, l’esprit comblé.
La brise légère vient bientôt me saluer et m’accompagner,
Aux sons des trilles du gentil rossignol et du beau geai,
Sous les yeux écarquillés du grand cerf et du sanglier,
Je suis le roi de la forêt, je n’en peux plus de danser.
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L'homme est le rĂŞve d'une ombre
(vers 135-140 des Pythiques de Pindare, le prince des poètes).