Tigzirine

Un petit village appelé "Tigzirine"
Très loin de notre grande ville
C'est une petite île sans eaux autour
C'est une petite île qui dort
Un village dans un petit coin du grand Atlas
Un village entre les grandes montagnes lasses
De petites maisons,de petites portes
De petites ruelles,de petites fenêtres
Des arbres,des feuilles mortes
De petits sentiers perdus
Des chiens qui ont déjà mordu
Des arganiers tordus
Derrière chaque pierre,chaque arbre
Chaque rocher,chaque sentier
Se cache un secret:
Il y a des barrières
Où rien ne se perd
Il y a la rivière
Qui n'a pas de frontières
La grande vallée verte
Des palmiers qui en sortent
Là-haut montent les murs de la vérité
Les murs rouges,les murs de la beauté
Les murs qui vivront pour l'éternité
Des traces sur des rochers
Des traces qui ne peuvent se cacher
Des pas de cheval,de vache,de chèvre
Les vestiges d'un château détruit
Par le vent,par le temps,par la pluie
Le château où vivaient les ancêtres
Maintenant,tout a fondu
Tout est détruit,tout est perdu
Mais il reste encore un mur
La moitié d'une grande tour
On voit bien qu'elle pleure
D'avoir perdu l'autre moitié
Un grand trou profond
Où il y a des pierres,des squelettes
De la poussière,des os,des crânes
Les squelettes des esclaves de jadis
Les esclaves noirs qui trimaient là
Qui sont morts là
Sans même un tombe
Seulement un trou sombre
Loin de là est née la mosquée de l'île
Elle est née toute seule
Elle est née toute folle
On dit que personne ne l'a construite
Un matin,on l'a trouvée là toute faite
Dedans règne un étrange silence
Et souffle le vent de la Providence
De petites pierres sacrées que personne ne touche
Des tombes étranges où personne ne couche
C'est fabuleux,c'est prodigieux
C'est un miracle de Dieu
Si on suit la rivière
On arrive à la source de la prière
L'eau sourd timidement
Et coule doucement
Vers un rocher rond
là,c'est très profond
Cette grotte s'appelle"la Mecque des grenouilles"
Quand on entre dedans
En nageant doucement
On sent une peur qui nous pénètre
Une peur calme qui envahit notre âme
Et quand on nage vers la Pierre Solitaire
Sans s'affoler,sans regarder derrière
On se sent libre,on se sent fort
On voit des trous dans la montagne
Ce sont les Fenêtres des Portugais
Que personne ne peut atteindre
Qu'est ce qu'il y a dedans?
Des fusils,des sabres,des poignards?
Des bijoux,de l'or,des trésors?
Ce sont désormais les refuges des chauves-souris
Toutes ces merveilles se trouvent là-bas
Derrière les montagnes lointaines
Loin de notre ville
Dans un petit village sauvage
Un petit village sans âge
Un village où il n'y a ni chef ni esclave
Ni Dieu ni maître
Ses habitants ne sont pas bavards
C'est là leur grand art
J e sais qu'ils s'aiment
Car ensemble ils sèment
Pour combattre l'abîme
Ils vivent dans le calme
Et la quiétude de l'âme
Ils mangent ce qu'ils ont récolté
Car ils ont lutté,ils ont supporté
Ils ont sacrifié,ils ont milité
Ce sont des gens
Qui ont toujours raison
Ils vivent heureux dans leurs petites maisons
Qui regardent sagement le lointain horizon
Ils n'ont aucune envie
De raconter leur vie
Leur vie passe comme un mirage
Dans un désert sauvage
Leurs femmes sont invisibles
On ne voit jamais leurs visages
Elles sont timides mais sages
Leur rire n'est pas comme celui de la ville
C'est le rire sublime des femmes de l'île
Elles sont belles,elles sont charmantes
Elles sont naturelles,elles sont ravissantes
Leur village est un mystère:
Sous chaque pierre dort un scorpion
Dans chaque trou sa cache un serpent
Dans chaque caverne habite un animal sauvage
Qui ne finira jamais sa vie dans une cage
C'est un village différent des autres
Qui a les portes toujours ouvertes
Mais il est temps de partir
Je reviendrai sûrement un jour
Te revoir avant de mourir
Adieu petit village
Adieu enfants souriants
Adieu hommes silencieux
Adieu femmes invisibles
Adieu Tigzirine
Adieu!
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Village de "Tigzirine",le 30/03/1977

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Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
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Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rêvant de sa mie!!!