La vague rugissait dans un hymne endiablé
Abandonnant ses droits d'auteur pour ce noyé.
Le soleil ruisselait aux portes du couchant
Essayant de laver ses plaies dans l'océan.

Et la lune pressée d'étendre son linceul
Pointait déjà son nez dans un signe de deuil.
L'ombre poussait le bleu et dans sa voile immense
On entendait pleurer tous les bruits du silence.

Assise sur le sable blanc, je découvrais
Les astres qui pour lui, un à un, s'allumaient.
Il n'était pourtant rien qu'un mortel amoureux
Dont l'amour assassin avait fermé les yeux.

Il avait préféré suivre l'éternité
Et découvrir ailleurs une autre vérité,
Plus belle que sa vie à présent dévastée,
Comme un désert sans fin, une terre asséchée.

Peut-être trahissant ses rêves les plus doux
A-t'il couru tout droit vers cet océan fou
Et sans même nager, son corps abandonnant,
A-t'il crié : " Assez, je m'en vais maintenant...

O ! Dieu, délivrez-moi, prenez, prenez mon âme,
Que m'importe la vie sans l'amour de ma femme...
Laissez dans le courant s'éparpiller mes os
Et dans votre bonté, donnez-moi le repos.

S'il existe un pays ailleurs où le coeur chante,
Sans crainte des demains, sur une terre aimante,
Emportez-moi là-bas, je vais fermer les yeux,
Assouvi, reposé, dans ce paradis bleu.

Mais si me pardonner vous paraît impossible,
Je vous offre mon coeur et ces mots inutiles,
Et qu'un poète errant recueillant mes aveux
Vous les écrive en vers ou prose s'il le veut."

Je me suis attardée comme si le destin
Rôdait autour de moi, une plume à la main.
L'aube criait déjà dans le bec des oiseaux
Et la vague entonnait la marche du bourreau.

Je ne pouvais dormir, je ne pouvais parler...
J'ai sorti simplement un morceau de papier
Et chaque mot tracé me libérait un peu,
Je sentais s'envoler son âme dans les cieux.

Lorsque j'ai relevé la tête vers le ciel,
Un albatros volait, tout blanc, vers le soleil .
Ses ailes s'agitaient comme pour un adieu...
Je compris qu'il entrait au royaume de Dieu.