La Roche-Misenne, le 26 mars 1834

Mon aimé, c'est printemps !

Comment ! Ta voix se meurt et pourtant c'est printemps !
Tu agonises lent dans ton palais de soie aux rives de jamais, mais regarde alentour !
Le bourgeon si confiant espère en l'aube pure, il frémit sur la terre et le moment s'enroule, gaze fine et tremblante, autour de sa pâleur !
Mon aimé, c'est printemps !
Pourquoi te taire enfin, pourquoi donc ce silence qui navre les étoiles !
Regarde la lumière qui persiste au couchant, elle espère elle aussi des aubes éternelles !
L'arbre subtil et fier se dresse sur la berge, il regarde demain, son feuillage apparaît, il murmure "renais !".
Oui, cette renaissance de la Terre amoureuse, mon amour, c'est nous deux, qui tremblons dans le noir mais vivons sa passion !
Mon aimé, c'est printemps !
Je crois encore en toi, la mort est illusion, l'éternel est partout, son murmure nous hante !
Reprends force et courage, il est d'autres matins qui disent l'espérance !
Écris-moi, je t'attends, je t'espère ! Fais revivre le temps des joyaux de l'aurore, beaux fruits sucrés et doux que nous aimions cueillir, échangeant nos regards !
Mon aimé, c'est printemps !

Adélaîde, Comtesse de La Roche-Misenne


(Sphyria)