Le solitaire

Moi qui suis solitaire
Jusqu’au fond de mon être
A regarder la terre
De derrière ma fenêtre

Souvent j’me demande
Comment suis-je arrivé
A vivre loin des landes
Et des hommes bien nés ?

Comment suis-je arrivé
A supporter les gens
Qu’à p’tites doses clairsemées
Et d’moins en moins souvent ?

Elle est pourtant jolie
Notre planète bleue
Et de trésors remplis
Pour les enfants curieux

Elle recèle des merveilles
Qui méritent qu’on explore
Ces millions de ruelles
Ses gares et ses ports

Pourtant y’a rien à faire
Dès qu’je sors de chez moi
J’ai le cœur qui se serre
Et mon ventre si froid

Je ne croise dans les yeux
Des passants du dimanche
Que tristesse sans feu
D’une vie de faïence

Le travail, les enfants
Les factures à payer
La voiture qui attend
Les vacances d’été

Moi qui suis solitaire
Jusqu’au fond de mon être
C’est autant de mystères
Qui en moi ont fait naître

Ce besoin viscéral
De rester bien planqué
Comme un loup de cristal
Sous un ciel enneigé

Parfois je me demande
Si ça tourne bien rond
Dans cette boîte d’amandes
Qui me sert de raison

Comment suis-je arrivé
A sortir de la route
Qu’enfant, j’avais tracé
Dans mes rêves de mois d’août ?

Comment suis-je arrivé
A amarrer le bateau
Loin des houles endiablées
Et des centres commerciaux ?

Qui a maquillé ma vie
De couleur si froides
De son pinceau terni
De peintre malade ?

Alors pour m’évader
Et fuir mes angoisses
Je noircis à saigner
Des pages qui croassent

Comme des corbeaux mirages
Dans un désert de rimes
Où je nage et surnage
Tout en frôlant l’abîme

Moi qui suis solitaire
Jusqu’au fond de mon être
Mon bonheur est sincère
Car derrière ma fenêtre

C’est l’amour de la vie
Qui me tient debout
Celui de mes ami(e)s
Et celui des mots doux.

Loïk Perrin