Oasis des artistes: Poésie en ligne, Concours de poèmes en ligne - 6528 membres !
S'inscrire
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 


Mot de passe perdu ?
Inscrivez-vous !
Petites annonces
Qui est en ligne
117 utilisateur(s) en ligne (dont 98 sur Poèmes en ligne)

Membre(s): 3
Invité(s): 114

Sybilla, ELTEOR, plumedoie, plus...
Choisissez
juillet 2014
Hébergez vos images
zupimages
Droits d'auteur


Copyright



Index des forums de Oasis des artistes: Le plus beau site de poésie du web / Poésie, littérature, créations artistiques...
   Prose (seuls les textes personnels sont admis)
     Grandir dans les orties (lettre perdue).
Enregistrez-vous pour poster

A plat Sujet précédent | Sujet suivant
Expéditeur Conversation
RomaneJones
Envoyé le :  21/8/2020 15:17
Plume de platine
Inscrit le: 6/12/2019
De: Gironde
Envois: 3181
Grandir dans les orties (lettre perdue).
Grandir dans les orties. (Lettre perdue)


J’écris le soir quand il est tard, à l’abri des regards, une conversation intime entre ma souffrance et le papier prêt à m’accueillir. Alors ce soir, dans le silence d’un dortoir je noircis de mes mots une lettre perdue comme toutes celles que j’ai postées à ma mère et où les réponses sont restées vaines …

Je m’appelle Clément et j’ai quinze ans. Je vis ici et ailleurs et si je ris certains jours, je maudis les cris de mes nuits. Il y a plusieurs années, je vivais avec ma grand-mère dans le centre de la France, elle m’élevait depuis toujours car ma mère pour son travail (soi-disant) ne pouvait pas le faire. Elle vivait à Paris et je la voyais très rarement. Mon père décédé avant ma naissance était celui dont on ne prononçait jamais le nom et encore aujourd’hui j’ignore pourquoi. Je posais des questions à mamie et elle me répondait toujours qu’elle ne voulait pas s’en mêler. Une fois, je lui ai demandé si ma mère avait pleuré quand papa était mort et elle a dit que non car sa fille estimait que les larmes ne changent pas le destin et voilà rien de plus et grandit avec ça si tu peux et si tu ne peux pas c’est pareil ! Et j’ai grandi avec Mamine, c’est ainsi que je l’appelais, juste elle et moi….
L’année de mes neuf ans, Mamine est morte d’une forte grippe mal soignée et j’ai pleuré et je pleure encore même si cela ne change pas le destin ! Ma mère m’expédia dans un pensionnat et elle reprit la route vers Paris sans une larme et sans un baiser sur le front.
Au fil des années, de pensionnat en pensionnat toujours plus loin, j’ai continué de brûler mon enfance et je suis devenu un voleur de souvenirs, ceux des autres et un chapardeur de mamans, celles des autres….
Chaque vacances scolaires, elle m’envoie en colonie, l’hiver à la montagne, l’été à la mer et peu importe où dès l’instant que ce soit très éloigné de Paris ! Dans ces centres de vacances, je peux mentir aux copains qui ne connaissent pas mon histoire et ma solitude. J’emprunte la mère de Paul qui confectionne toujours pour son fils des gâteaux et celle de Julien qui le couvre de cadeaux et de bisous et il râle en plus ! S’il savait comme je l’envie ! A Noel, je monte à Paris car le pensionnat est fermé pour les fêtes. Ma mère n’ayant pas le choix me fait dormir dans la chambre d’ami et cela montre que le séjour doit rester sur du court terme au cas où il me prendrait de rêver. Parfois, j’espère sa mort pour que certains de mes mensonges deviennent des vérités. Elle brille sous les flashs, elle sourit sur les couvertures des magazines, elle est riche d’apparences et d’argent et je suis pauvre d’amour mais j’ai apprivoisé la douleur de l’absence et je ne lui offrirais plus mes pleurs car pour elle, je n’en ai plus. Son public, ses amis, les hommes qui traversent pour un temps sa vie la vénèrent comme une Rose et moi, je n’en connais que les épines.
Je hais les vendredis quand les copains préparent leurs sacs pour le weekend, une cruelle réalité qui me rattrape chaque semaine. Je ne guette plus aux carreaux un éventuel départ. Les manches de mon pull ont trop essuyé mes espoirs sur des vitres embuées et seul dans le brouillard, je m’invente des histoires pour exister dans ce monde entre ici et nulle part. Et quand encore certains me demandent : - Tu ne pars pas toi ? J’ai envie de hurler que non mais si tu veux, emmène-moi ! Alors je reste et je déambule dans les couloirs glacés de silence et je me dis, un jour qui se souviendra de moi... Un autre à ma place dormira dans le lit de mes chagrins. Au fil du temps, je suis devenu un érudit et oui, il faut bien s’occuper l’esprit quand tout n’est que vide. Dévorant des livres pour meubler l’ennui, me nourrir d’émotions, apprendre le sens du sentiment et oublier qui je suis pour un moment.
Odette, c’est la lingère de l’établissement, elle s’étonne de me voir prendre autant de centimètres et les pantalons qu’elle rallonge chaque mois témoignent du temps qui passe. Bientôt je serais un homme. La pauvre, elle ne peut pas faire de miracle alors elle a informé l’administration qui a appelé ma mère, la priant d’y remédier dans les plus brefs délais. Connaissant la vitesse d’exécution et le peu d’intérêt qu’elle me porte, sur l’enveloppe un mot : Urgent !
Ils sont arrivés enfin au bout d’un mois, pour elle c’est du rapide croyez moi !
Trois tailles différentes, ainsi elle sera tranquille pour de longs mois qu’elle vivra en déesse au cœur sec. Griffonnée de sa main sur un petit bout de papier : « Alors il paraît que tu grandis »

OUI Maman, je pousse comme ils disent ici, né de père pas connu et de mère si peu vue
Toi l‘inconnue à qui je dois tant de déserts affectifs et qu’aujourd’hui je méprise.
OUI je pousse et demain je deviendrai poète et père pour offrir des vers d’amour à mes enfants.
OUI à toi l’absente dont je ne prononcerai plus le nom,
J’ai grandi dans les orties…


(J’écris la vie tout simplement, des lettres perdues souvent d’hommes, de femmes, d’enfants
qui l’espace d’un moment ont traversé ma route avec leurs bagages de souffrances.)


Romane
A plat Sujet précédent | Sujet suivant

Sujet :  Expéditeur Date
 » Grandir dans les orties (lettre perdue). RomaneJones 21/8/2020 15:17
     Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). cyrael 21/8/2020 15:23
       Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). RomaneJones 21/8/2020 15:32
     Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). dolores 21/8/2020 16:10
     Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). Merdesiles 21/8/2020 18:10
       Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). Lejumeau 22/8/2020 9:17
         Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). RomaneJones 22/8/2020 15:02
           Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). Lejumeau 22/8/2020 15:50
             Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). RomaneJones 23/8/2020 10:49
     Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). Bellosogno 23/8/2020 12:36
       Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). RomaneJones 23/8/2020 17:59
         Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). Sybilla 11/9/2020 23:48
           Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). RomaneJones 22/9/2020 11:03
     Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). ZAGHBENIFE 26/9/2020 19:18
       Re: Grandir dans les orties (lettre perdue). RomaneJones 29/9/2020 10:56

Enregistrez-vous pour poster