La Grive musicienne

Elle allait doucement, jeune femme pensive,
Sur le tapis doré qui conduit à l'hiver.
Elle pensait seulette à ce chant de la grive
Qui venait de briser la paix de l'univers.

Des cris étaient montés dans l'immense feuillage.
La forêt tout entière écoutait le ténor,
Guettant la fausse note, en attendant l'orage,
Mais l'oiseau musicien avait une voix d'or.

La passante éblouie avait suivi sa route
Sous le chêne et l'aubier, dépassant le concert
Qui allait s'éteignant, attentive, à l'écoute.
Le passage discret d'une biche et d'un cerf

Ne l'avait pas troublée ; les oiseaux ont un charme
Qui triomphe des dieux, fascinant les mortels.
Son cœur était touché, on voyait une larme
Briller dans la lumière, en cette aube pastel.