Quelque part dans le vent de quelques girouettes,
sous les traces de pas, au milieu de la fête,
se cache le poème perdu depuis que l'homme,
a troqué son crayon contre un morceau de gomme.

Il est là. Je l'entends appeler son poète...
Lequel de nous saura découvrir sa cachette,
l'inviter à danser en se moquant du temps,
de l'espace et de ceux qui se perdent dedans ?

Mille fois sur ma route, j'ai cru le rencontrer,
au détour d'une rime, dans un bout de papier ;
mille fois j'ai aimé me prendre pour celui
qui dit ne former qu'un avec la poésie.

Et pourtant me voilà toujours à quelques mots
de trouver cet écrit, fiançailles du beau,
sans jamais épouser l'harmonie vagabonde
qui fonde les couleurs architectes du monde.

Faut-il que je renonce pour le laisser venir,
caresser mes entrailles, pour le laisser écrire
à ma place, modeste, comme un doux lâcher-prise ?
Faut-il que je me taise pour qu'un jour on me lise ?

Certains disent tout bas qu'il se trouve tout près,
à l’intérieur de soi dans son autre moitié ;
l'ai-je vraiment cherché au travers du regard
qui sait tout sans apprendre et contemple sans voir ?

J'ai peur. Rien d'étonnant à cheminer autour...
Je crains de l’abîmer, comme je crains l'amour.
Mes échecs sont pour lui, ô fidèles ratures !
Ne serais-je que l'auteur de ma propre lecture ?

Car j'utilise « Car » au début de ce vers ;
tel un maître d'école à la plume scolaire,
je ne peux résister au besoin de penser
qu'un poème a le droit de ne pas exister.

Je m'en vais me plier en quatre pour lui plaire,
le laisser respirer, protéger ses arrières
pour ne pas qu'un poète, indigne de ce nom,
par l’appât du succès, le transforme en chanson.

Et quand viendra le jour de croiser le génie
de celui ou de celle qui saura voir en lui
l'évidente évidence, que je n'ai jamais vu,
je pourrai être fier de n'être jamais lu.