Un petit poulain
Se trouvait fort vilain
Car il était né
Avec une bosse sur le nez,
Là,entre les yeux.
Par tous ses aïeux !
Trouvé en bas âge
Au abord du village
Il fût mit au service du cantonnier
Pour lui porter ses paniers.
Parcourant la contrée,
Avec tous ses attraits,
Il mangeait avec bonheur
Les herbes et les fleurs.
Parfois les enfants,
Véritables fans,
Lui apportaient dans son écurie
Quelques sucreries.
Il vivait paisiblement.
Un jour, un garnement
Se moqua de sa protubérance
Devant toute l'assistance.
En un instant, l'animal de labeur
Devint le souffle douleur
De tout le village
Et ne laissa dans son sillage
Que quolibets et moqueries.
Décision fut prise de l'enfermer dans l'écurie.
Les années filèrent
De lui, on ne parla plus guère
Mais un soir de printemps
On l'entendit hennir derrière le battant.
En un instant la porte fut défoncée
Pour laisser passer
Un destrier magnifique
Immaculé de la tête à la queue.
Quand à son excroissance,
Elle ornait son front, tel une lance
Longue et fine
S'étant transformé en corne.
Il huma le vent,
Tourna les oreilles en arrière, en avant,
Pivota la tête vers la forêt
Et sans plus d'arrêt
Se précipita vers la liberté
Laissant les villageois la mine dépité.
Qui privilégie le paraître
Au détriment des êtres
Détruit son âme
Aussi facilement qu'avec une lame.