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Galou le gros caillou
Acte 1
Galou était un gros caillou Oh pas un rocher quand même !
Son mère s’appelait montagne Elle était colossale! Son père était Océan Il était le plus grand !
Ils se trouvèrent, il y a 10 000 ans Ou plutôt se rencontrèrent Par un jour de grand vent Et toute une nuit s’aimant…
Ou les vagues de papa Océan Léchèrent amoureusement Le corps granitique De la montagne magnifique
Monsieur Océan et mademoiselle Montagne… D’abord des caresses subtiles, façon mer d’huile Démarrèrent des ébats, D’une nuit de sabbat
Puis des gestes libérés et bien plus osés … Taillés à la démesure D’êtres de cette stature
Alors, de grands coups de heurtoirs En vas et viens butoirs D’une mer déchainée sur le corps emmuré de sa noble dulcinée
Ivre d’un amour débridé Les deux amants, enivrés, Libérèrent leur passion en un fracas d’explosion ! ?
Libérant de ses jupons de gros blocs ‘’rejetons’’ Madame accoucha donc D’un amas de gravats…
Revenons à Galou,
Car il gisait dans le tas tout en bas du fatras Et il s’éveilla ! Que fais-je là ? pense-t-il tout bas
Il faut vous dire qu’un gros caillou comme ça, ne parle pas… Bah oui ! Il n’a pas de langue, il est fait de gangue. Une toute petite conscience émergea alors de ce gros bloc butor
Il resta la à ressentir au fil des jours, des mois et des années les caresses de l’eau venant éroder sa carapace tannée Mais issu qu’il était d’une montagne hiératique Il se croyait unique ! Et du coup pas sympathique…
Il se moquait des plus petits et des moins gros que lui Des galets gris, des galets plats Des morceaux d’éclats de cipolins et de gneiss Quant aux pauvres craies, il les méprisait
Le grand vent se chargea donc de lui apprendre la vie en lui montrant que tout roc qu’il était il n’était pas si balèze, même si fils d’une falaise Grand vent sollicita alors son frère le Ponant…
Oncle Ponant, déboulant de l’ouest, gifla le gros caillou blanc Galou se retrouva sens dessus dessous…. Déséquilibré, il roula du bas des jupes de sa mère Pour tomber dans l’un des bras de son père
Oulala ! Il plongea et coula bien bas. ?
Acte 2
Il finit dans la vase au milieu d’un nuage Mélangeant sable, algues et coquillages Là , il prit peur ! Plus de petits frères ni de petites sœurs !
Il regretta bien vite ses méchancetés gratuites ses quolibets, lazzis et railleries Bref, toutes les moqueries
dont il avait abreuvé pendant des paires d’années ses cousins de la grève ses voisins de la plage
Mais voilà qu’à s’être toujours gaussé les autres ont eu vite fait de l’oublier Alors quant à s’inquiéter ou à le chercher…
Désormais sans famille Il devint sans public De tout gros qu’il était, en haut Tout petit il devint, en bas
Il dut se contenter d’écouter Les sons, les bruits et les pensées Des cétacés, des araignées et autres crustacés
Il aurait bien aimé échanger ne serait-ce que baragwiner pour ne plus se sentir si esseulé si abandonné…
Mais à ne jamais s’être intéressé il n’avait donc rien saisi ni rien appris et si peu réfléchi ?
Il voulut appeler, interpeller et crier Mais à ne s’être qu’écouté penser il ne savait pas parlé le langage du monde
Il dut se résigner… Cela prit des dizaines d’années où son mutisme forcé lui appris l’humilité
Et aussi à comprendre Et donc à entendre qu’au-delà de son nombril on pouvait apprendre…
Il écouta donc et se concentra Ressenti et mémorisa Réfléchi et pensa Enfin, il s’éveilla
Devenu sensible aux flux des marées Sa peau rugueuse s’était couverte De grandes laisses de mer D’algues vertes, brunes et bleues
Il pouvait ainsi sentir encore mieux Les vibrations du fond des eaux Les bavardages des autres habitants De sa vaste prison océan
Et le temps fit son œuvre…
Il déchiffrait maintenant les plus infimes mouvements Reconnaissant entre mille la marche du crabe à barbe De celle du crabe dormeur ou de son cousin le boxeur ..Bien qu’il ait une préférence pour le petit crabe caillou…
A décrypter les flux, les signes et les sons Il comprenait enfin la richesse du monde Regrettant humblement dans sa gangue De ne pas avoir de langue ?
La vie était cruelle se disait-il chaque jour Alors que je ne m’intéressais pas aux miens … je pouvais leur parler Et maintenant que je suis curieux des autres, … je ne peux communiquer
Triste sort que le mien !
Acte 3
Et les saisons passèrent…
Ses sens se développèrent Oh certes il ne lui poussa guère ni oreilles, ni yeux, ni nez Mais de sa nouvelle maturité Éclos un être sensé Pleinement en capacité A projeter ses pensées Bref à s’exprimer !
Grace à sa télépathie, Il remplit sa vie D’un tas de nouveaux amis Des grands mais aussi des petits
Il avait compris que tous méritait la vie
Lui, pierre abrupte et arrogante Etait passé à l’état de pierre pensante Et maintenant de pierre parlante
Il échangeait à souhait ! Racontait et riait ! Parfois même chantait ! Mais toujours s’intéressait.
Aux autres plus qu’à lui Et une légende grandit… Qu’un gros rocher blanc/gris, très gentil, Dispensait conseils et avis
On venait lui demander d’arranger des dilemmes De régler des problèmes, d’aplanir les tensions D’infléchir la confusion, D’insuffler la sérénité
Il rayonnait de lui des ondes bienfaitrices Qui, disait-on, apaisaient la douleur Repoussaient le malheur Généraient le bonheur
Il fut fort occupé durant de longues années A prodiguer soins et conseils A prôner la paix A cultiver l’amitié
A éclairer de son amour le monde tout autour
Fin de l’acte 3…provisoire !
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