Va dormir avec lui dans le jardin d’Eden

Tu me chantais alors avec ta voix très tendre :
« Dis, sauras-tu m’attendre, dis, quand je serai loin ?
De décembre à janvier, de janvier à décembre,
Dis, sauras-tu défendre notre amour demain ? »

Et moi, qui attendais que tu ailles trop loin !
Si tu l’avais voulu, sûr que j’aurais dit ‘oui’ !
Et nul autre que nous n’en eût été témoin ;
Là-bas dans le Djebel, tu risquerais ta vie,

Au delà de la mer, si loin, en Algérie.
Nous n’étions pas mariés, mon Dieu ! Quelle importance !
Aurais-tu refusé de me faire un petit ?
Était-il plus urgent de défendre la France ?

Nous avions, au ciné, aimé «’L’Adieu aux armes »,
Mais ne pouvions gagner la Suisse et nous cacher,
Il te fallait partir et ignorer mes larmes,
Mettre, entre toi et moi, la Méditerranée.

Refuser de servir était une infamie,
Et qui aurait songé, alors, à s’égarer ?
A la radio, ‘Le déserteur’ était banni,
Au Président les lettres arrivaient par milliers.

Quelques années plus tard on verrait Julien Clerc,
Jetant tous ses vêtements, chanter sur une scène
Le soleil et l’amour, et condamner la guerre,
En d’autres temps, la paix était un mot obscène.

Faites aujourd’hui l’amour, n’attendez pas demain,
Franchissez, sans attendre tous les murs de la haine,
Fille, prends le désir de ce Palestinien,
Va dormir avec lui dans le jardin d’Eden.

Dumnac