-I-
Ecoutez-moi poètes fous
De la rustique Kabylie
J'ai bu calice jusqu'à lie
Etant encor plus fou que vous.

Et sans verser dans l'hérésie
Ou dans le tort maraboutique
J'ai déterré Okkadh l'antique
La mecque de la poésie.

D'Okkadh j'ai hérité l'aura
C'est celle que j'ai engrangée
Tout haut sur la cîme enneigée
Du feérique Djurjura.

Ainsi puisse-t'il me donner
Le droit de chanter mon amour
Au coeur des dechras alentour
Sans risque de me faire damner.
-II-
Ecoutez-moi poètes fous
De la charmante Kabylie
J'ai bu calice jusqu'à lie
Etant encor plus fou que vous.

Muses kabyles mes amies
Je vous fais don de mes moutons
Ceux qui comptés par millions
Ont bêlé dans mes insomnies.

Je me présente ainsi sans armes
Plantant à terre un blanc drapeau
Pour payer en sel et en eau
La rançon de ses chaudes larmes.

Car il s'agit de dje'jiga
La fleur sacrée de nom berbère
Pour qui je voudrais bien me faire
Recrue zouave ou peshmerga.
-III-
Ecoutez-moi poètes fous
de la rustique Kabylie
J'ai bu calice jusqu'à lie
Etant encor plus fou que vous.

A l'exception de ce rêveur
Qui cacherait tout mon soleil
D'un pied ou même d'un orteil
Humble dans toute sa hauteur.

C'est Si Mohand l'impétueux
C'est l'amokrane des poètes
Dont je sais bien qu'il n'eut de quêtes
Qu'absinthe et vers vertigineux.

Lui, aurait bien voulu défendre
Mon droit de pleurer mon amour
Au coeur des dechras alentour
Sans risque de me faire pendre.
-IV-
Ecoutez-moi poètes fous
De la charmante Kabylie
J'ai bu Calice jusqu'à lie
Etant encor plus fou que vous.

Au point d'aller à la mosquée
Prier Allah en manteau blanc
Et payer en perles de sang
Le prix de sa fraiche rosée.

Et J'irais même à la chapelle
Portant cent cierges à mon bras
Et déclamant des Isefra(s)
Dédiés à la demoiselle...

Que l'on appelle Dje'jiga
La fleur sacrée au nom berbère
Pour qui je voudrais bien me faire
Recrue zouave ou peshmerga.
A.Alloun.