Je rêvais...d'apprivoiser toutes les lettres d'un mot.
Filet à papillons, épuisette crevettes, enfin quelques hameçons.
Le premier flirt aidant, je m'attaquais au A.
Ce fut sans résistance. Placé sous l'oreiller je l'entendais gratter.
Le lendemain matin, un vacarme infernal envahissait ma chambre.
Le petit caractère qui s'était échappé, fouillait livres et revues,
faisant valser les pages à un rythme effréné.
Tout y passa, cahiers et confessions intimes.
Le calme revenu, je compris que l'intrus avait trouver refuge
au contact d'un mot bien mal orthographié.
Avec l'adolescence j'eus cette fois l'idée de capturer le M.
La cour du collège et les copains aidant,
je transmis à la belle des mots assez plaisants.
Mais l'hirondelle est libre et ne fît que passer.
Puis ces années lycées, où la passion pour l'autre fait danser les coeurs.
La lettre O d'abord inaccessible éprouva intérêt et tendresse pour moi.
L'ai-je laissé tomber où m'a-t-elle éconduit, je ne m'en souviens pas.
Le bonheur a frappé au tournant des vingt ans quand le U majuscule
se présenta à moi, pour écrire une histoire qu'on voudrait éternelle.
Me reste le grand R, que le destin malin n'a pas encore livré.
Les variations Goldberg de Jean-Sébastien Bach,
les réveils en douceur des oiseaux du matin, je me laisse porter,
le R, on verra bien.
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Je crois à la force de la poésie
