Deux jeunes garçons s’étaient côtoyés
Sans contracter amitié, à l’école et au lycée.
L’un de famille aisée, L’autre fils d’ouvrier.
Tous deux rêvaient de carrière
Dans le milieu bancaire.
Le plus modeste y entra comme employé
L’autre vit une Grande Ecole le former
Et il devint trader d’avenir.
Le hasard, pour finir
Qui jamais d’humour ne manque
Les plaça dans la même banque.
Le trader déploya ses ailes. Pendant ce temps
L’employé, victime des compressions, ne resta pas longtemps
Et se retrouva dehors, au chômage, puis devint clodo.
L’autre, qui ne le regardait déjà pas souvent
Définitivement lui tourna le dos
Tout occupé à son avenir étincelant.
Il fit merveille et fortune, achetant appartement, belle voiture
Collectionnant les filles, faisant bonne figure,
Pendant que l’autre, assis sur son trottoir
De plus en plus triste à voir
Collectionnait, lui les bouteilles vides,
Affamé, sale, mal rasé et livide.
Mais dans sa folie de réussir, notre super héros
Passa la ligne, coula sa banque et retomba à zéro.
On lui saisit son bolide de sport
Et son logement, il se retrouva dehors.
C’est alors qu’il entendit une voix l’interpeller.
Il dut faire un grand effort pour se rappeler.
Son collègue qui croupissait avant sur son trottoir.
Au volant de SA voiture, en costume du soir,
Il l’invitait à prendre un verre chez lui.
En arrivant, le trader fut tout déconfit
De voir que l’autre s’était établi
Là où il habitait quelques jours avant.
« Comment as-tu fait ? » lui demanda-t-il en bavant
Devant le succès de son compère.
« Oh, c’est vraiment très simple, mon frère :
Quand j’ai vu tes biens aux enchères pour une poignée
D’argent, j’ai rendu toutes mes bouteilles consignées,
Et j’ai pu les acheter. Je me suis rhabillé et lavé
Par là même, j’ai un bon travail retrouvé.
Sois le bienvenu chez moi, pour attendre
Qu’un autre employeur veuille bien te reprendre. »
Le 13 novembre 2008
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Science sans conscience n'est que ruine de l'âme (Rabelais)