Les ailes du désir. A LB, Wim W. et Rainer Maria.
Mon ange me regarde,
Pétrifié de terreur.
Il me voit si engluée d’erreurs,
Si vide, désespérée, hagarde.
Il erre autour de moi,
Me frôle, pose doucement, avec infinie délicatesse,
Ses ailes vierges sur mes froids,
Tente de m’insuffler tendresses,
Me sourit, invisible, transparent,
Grandiose dans sa mansuétude.
Il est pur comme âme d’enfant,
Me regarde dormir en inquiétude,
Assis près d’émois, ailes déployées
En corolle absolue, bosselées
De larmes anciennes, perlées de franges
Arc-en-ciel, il me veille, mon ange…
Il sait tant de moi. Un jour il descendra
Et moi j’irai vers lui, éthérée, libre
Je serai plume lavée des fanges, enfin moi,
Et lui goûtera vins plaisirs et livres,
Sans doute un peu perdu, sans rôle à jouer,
Il posera ses ailes du désir sur trapéziste folle,
Ou dans Berlin coloré se jouera des oboles
De passants le prenant pour d’asile échappé,
Et moi je planerai enfin en bibliothèque,
Parlerai mille langues, oublierai hypothèques,
Murmurerai pardons tendresses et vérité
En oreille d’inconnus enfin pour un temps apaisés,
Je serai Bruno Ganz et il sera entier,
Mon ange rilkéen, si pur et éthéré,
A moins que par miracle ou pur hasard
Un sexe lui soit né, alors quel tintamarre !
Car si cet ange est homme moi je deviendrai bête,
Oubliant consignes et paradis perdus,
Il est à parier que je n’en ferai qu’à ma tête,
Et que de Dieu lui-même je deviendrai la bru.
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