Les sables mouvants
Dussé-je plonger sous les vagues de l'opprobre
Et émerger du fin fond des antres profondes,
J'irai un jour, par un triste matin d'octobre
Me recueillir à la sépulture des mondes.
Dussé-je m'engloutir dans un ardent suaire
Et briser l'univers de mon mât maladif,
J'arracherai mon corps au sinistre repaire
Qui dirige ma proue contre le dur récif.
Alors, le front ceint par le carcan des années
Et l'esprit incendié par les vents éphémères,
Je percerai le cœur spectral des destinées
Au rythme syncopé des mélodies amères ;
Alors, bercé par l'air embaumé de l'aurore,
Je voguerai, dressé sous l'égide des cieux,
Guéri des ténèbres par l'œil du sémaphore,
Jusqu'à m'enliser dans les sables délicieux.
Carme
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Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ! (Alfred de Musset)