Chance ou misère?

Pour Irnel Stephen









Lorsqu'un air de violon

imite des plaintes de femmes délaissées,

quand les murmures de l'eau dans l'étreinte des rochers

renouvellent en nos coeurs la science des jours sans pain ,

quand un artiste fait semblant de confondre

sanglots et chansons,



quand Brel gémit sur son plat pays

et pleure sur son infidèle Fanette,

quand la souffrance

sans vergogne viole le toit de l'innocence,

Lorsque l'ennui raconte des histoires de soleils

trucidés par la nuit,

du plus profond de moi se réveille et s'agite

une muse agressive, violente , interdite.

Je deviens un amour de vingt quatre carats,

prestidigitateur de mille auriculaires,

musicien jusqu'à la suite des symphonies inachevées.



Je transforme les ouragans en des rires d'enfant.

Je prends des rendez-vous

avec des périphrases qui parfois ratent le train.

Car il ya plus de maux à guérir

que de mots pour les dire.


J'emprunte la voix de ce fils de gaulois

qui chante l'espoir d'un vieux nègre cubain

et de la poussière des rues de la Havane,

je fais surgir un chant de gloire au sublime argentin.


Mes assonances n'imitent

ni le sifflement du merle

ni le croassement du corbeau.

Mes alliérations n'assistent pas à la chute des arbres.


C'est toi , homo, l'inextinguible flamme au coeur de mes silences

et l'unique refrain de toutes mes chansons.

Pour ton salut,

pour que ta récolte ne soit fille batarde de ta semence,

j'ai renoncé au comfort des portes closes

et exposé ma face à la clarté du jour.



C'est pour raccomoder tes lambeaux de bonheur

et rassembler tes débris d'espérance

que mes vers parfois pausent au milieu de la page.


Plus belle que l'immensité bleue

est la face des trimeurs de toute la planète.

Plus grands que le vaste océan

sont les rêves de l'homme.

Plus excitant le vacarme d'une foule en colère

que les tapages du vent dans un champ de café.

Plus beau qu'une rose est l'amour d'une cause.

Plus pur que le jour est le coeur du poète.

Plus chouette que la chanson est la voix qui la chante.

Plus précieuses que la terre les mains qui la défrichent.

Plus fertile que le sol le ventre de la femme.

Et plus haut que la montagne de Golgotha

est l'homme qui y monta.



Faut-il le célébrer? Doit-on le regretter?

Je suis de la race des rêveurs éveillés.

j'ajoute des notes à la chanson du vent.

J'annonce un lendemain chantant

à ceux qui n'ont pas d'aujourd'hui

et un noel tout vert à ceux qui n'en ont jamais eu.



Mais Sehghor, Eluard, Aragon et Brière

Ont-ils terminé leur prière

et atteint le bout de leur quête?

Faut-il crier que j'ai la chance

ou la misère d'être poète?

Merci de cette belle réflexion sur la force de la poésie, sur la place qu'elle occupe à travers le monde...le temps...
Sophie.

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"Cependant c'est le seul qui ne me paraisse pas ridicule. C'est, peut-être, parce qu'il s'occupe d'autre chose que de soi-même."A.de Saint-Exupéry.

"Le chemin vers le bonheur : gardez votre coeur libre de haine, votre esprit libre de tout souci. ...

de belle expressions hurlant de réalisme ;un monde cru .des vérités énoncées .un miroir où l'on peut se reconnaitre .j'ai beaucoup aimé .je note "la science des jours sans pain" particulièrement savoureuse ....

Merci Sophie. Mais qu'est-ce qu'il faut faire pour lire tes poèmes?

Eveidem, je vois que tu as vraiment pris le temps de me lire. Merci.

Je pense que c'est une chance, malgré la douleur parfois que nous procure cette sensibilité, c'est vrai qu''il serait plus facile de rester derrière "le confort des portes closes"...
J'ai beaucoup aimé ton superbe poème si expressif !