Mémoire d’un encrier
S’est effacée l’ombre porcelaine,
Elle divague, lasse d’habitude,
Votre main sait elle ma peine
Ce vide plein de certitude.
Ah ! mon encre vous est donnée,
Miroir de blessures enfouies,
Quand vos yeux j’avais vu pleurer
Frappant aux portes d’insomnie.
J’ai vu trembler votre main
Comme ces roses oubliées
Qui sous le vent des chagrins
Se courbent aux amours hâtés,
Ces messagers de votre âme
Que sont les mots, et dans vos yeux
Les lueurs d’étranges drames,
En moi, se plonger peu à peu.
J’ai cheminé à votre main,
A votre plume généreuse,
Tous ces vers, ces quatrains,
Que le temps malin creuse.
De vos nuit saturées de crainte
J’ai abreuvé chacun de vos mots
Jusqu’aux lueurs éteintes
Quand vinrent se taire vos maux.
S’est tue l’ombre porcelaine
D’un automne roux d’habitude
Et c’est votre main qu’il entraîne
Pour d’affreux préludes.
Sur le bureau, votre plume posée,
Sur le grand livre, un point,
Et c’est mon encre séchée
Qui cherche votre main.
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Ne méprisez la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c'est son génie. ( Ch. Baudelaire )