En y laissant mes plumes
D’où vient cette lumière qui brille, si discrète,
Dans les nuits oĂą ressortent les minutes sombres,
Où le vide s’enfle et pousse les portes secrètes
Des fantômes que l’on traîne cachés dans leurs ombres ?
C’est juste la flammèche d’une âme qui vacille,
Plus lointaine qu’une étoile dans le ciel- univers,
Mais que les papillons montrent aux yeux des chenilles
Comme un pĂ´le sans qui tout vole de travers.
La distance n’est rien qu’une idée de sclérose
Pour celui qui sait rendre les mots comme un vol
Et couvrir de la voix tout le bleu nuit de rose,
Attraper les paroles des anges par le col.
Dans la cacophonie des milliers de chants nocturnes,
Certains sortent limpides et leur voix s’allume
De ce pouvoir immense d’avaler telle une urne
Les billets de souffrance que portent d’autres plumes.
Mais la magie dépasse parfois l’Almageste
Quand les voix qui se croisent ont cette résonance
D’une à l’autre, en pensée, miroir de gestes
Où personne ne sait qui reçoit, qui commence ?
C’est tellement simple à faire, mieux que tisser du rêve
De donner le plus cher dans un acte gratuit,
Car les mots que l’on souffle s'écrivent à la sève
De pensées qui ne suintent que du fond du puits.
Tout ce qui sort du trou où l’on puise ces lignes
Prend enfin la lumière et se révèle double
Toute conscience de soi reconnue dans le signe
Qui vous revient de l’autre avec un léger trouble.
Se connaître en partage, mais avec la douceur
De porter un fardeau d’un seul coup moins lourd
Sans servir de béquille, de supporte- douleur
Juste à deux, les deux mains d’un être aveugle et gourd.
C’est là tout le trésor que l’on gagne à l’échange,
Tout le vent qui dégage le ciel de ses brumes,
Et tout ce que je porte sous mes ailes d’ange
Quand je quitte la nuit en y laissant mes plumes…
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