Les dimanches
Pâleur toujours trop grande des dimanches mélancoliques
Qui nous rappelle la course du temps et le marais des souvenirs…
Faut-il alors pour ce jour en vivre inlassablement un septième
Qui nous vole les brins de liberté, les miettes du bonheur ?
Je hais le repos : vice des gens satisfaits d’eux-mêmes,
Caducité du nid d’où l’on tombe, du lit d’où l’on meurt.
Moi c’est avec avarice que j’éreinte mes heures par mes secondes avides,
Les dimanches ne peuvent me souffrir, tout comme je ne peux les souffrir,
Voyez déjà comme au matin ils nous leurrent d’une compagnie mutine
Pour mieux nous couvrir d’une solitude vespérale aux soupçons des lendemains,
Combien de fois ai-je cru que des bras m’endormaient ?
…
Ô esprit désormais tu sais les voix mensongères des pluvieux dimanches !
Oui la pluie est complice,
Nourriture de la terre et péché des cœurs
Dans lesquels, goutte Ă goutte, elle diffuse son venin plein de fiel,
Alors en larmes la voilà qui réapparaît dans les yeux de ceux
Qui ont cherché dans le ciel une lumière, un soleil, un coin d’azur,
Hélas ! Les dimanches n’ont pas de saisons, ils sont l’humeur des sentiments ;
Que leurs ailes elliptiques se déploient au-dessus de vous
Pour que chose effroyable, vous soyez la proie des réminiscences, des nostalgies,
Des instants d’amour,
Je vous crie : Fuyez ! Fuyez ce jour où l’homme s’appesantit sur lui-même,
Ce retour à l’enfant, à la matrice, dans le berceau de Dieu,
Fuyez ce jour de récompense car en ce monde rien n’est gratuit,
Je préfère la dure réalité du labeur à la cruelle illusion de la fatuité,
J’ai trop vu de fleurs naître au printemps pour mourir aux beaux jours
…
VoilĂ que je vous crie de fuir mais la fuite est inutile, impossible,
On n’échappe pas aux dimanches…
Ils sont les paupières de Dieu, l’obscurité de son mal,
Le plaisir de nous voir nous morfondre sur les moments perdus d’étreinte et d’enlacements,
De nous voir crever sous le manque des amours Ă©vanouies.
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