John se rendit à la penderie où il prit une veste chaude et un long foulard à damiers blancs et noirs qu’il enroula autour de son coup et sortit. L’air frais le ragaillardissait et il en éprouvait un certain bien-être ; dans le même temps, une part son esprit le refusait : réalité et lucidité se livraient à des joutes verbales qu’enlisait le silence. Depuis plusieurs semaines il avait interrompu toutes ses relations sociales : nul n’aurait compris sa décision de rester éveillé à n’importe quel prix. La rue était déserte à cette heure, un chat cependant déboucha du dessous d’une automobile. Chat noir, blanc ? La nuit tous les chats sont gris n’est-ce pas ?
Il errait empruntant une rue puis une autre, déambulait sans but, si ce n’était au bout du compte pour lutter contre le sommeil. A cette heure, la rosée blanchissait les véhicules en stationnement et il ressentit le froid l’atteindre profondément, viendrait ensuite l’engourdissement et puis…l’oubli. L’inconscience, le sommeil, à l’évidence ça lui ressemblait et il n’en voulait en aucune manière.
A quelques pas de là des lampadaires se mirent à danser étrangement. Il lui fallut quelques secondes pour comprendre qu’il était victime d’un malaise. Il s’appuya contre le mur d’un immeuble et attendit que cette délirante impression s’estompât. Puis il rentra chez lui avec un soulagement certain.
Pierre WATTEBLED
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