Je me laisse, je pars en voyage, seule, pour la première et dernière fois. Je pars très loin, un voyage éternel, un voyage dans le bleu du ciel ou bien enfoui dans le noir des ténèbres.
J’ai frappé fort à la porte et s’ouvre enfin à moi la vérité… Je suis à l’interrogatoire, du que sera mon éternité, je suis à la porte, entre le rêve et le cauchemar.
J’ai peur de la mort, j’appréhende cette vérité depuis ma plus tendre enfance. On en dit du bien, on en dit du mal, je ne sais vraiment quoi penser. Les ailes des anges semblent si belles et douces que j’ai une soudaine envie de m’y enfoncer. Je désire la douceur de cette splendeur de tendresse, aussi pure que l’eau de la source qui coule le long du fleuve tranquille.
De l’autre côté, les cornes ont l’aspect ardent des flammes, un rouge vif, des tisons d’émotions diffamatoires qui ne demandent qu’à exploser et jeter leur venin sur quiconque veut s’en approcher. Des sentiments refoulés depuis trop longtemps, de la médisance à perte du vue.
Oui je l’avoue, j’ai peur de la mort.
D’aussi loin que je me souvienne, ce sentiment de torpeur a toujours été présent. Peut-être parce que la mort ne m’a pas été expliqué étant toute petite, ou encore parce que de mauvais souvenirs me hantent inlassablement, dans mon inconscient, dans mon subconscient.
Je préfère de loin le firmament, les couleurs de l’arc-en-ciel, apaisantes pour mon âme, cette âme tourmentée par je ne sais quoi, par les qu’en dira-ton. C’est moi, c’est ma vérité. Je n’y peux rien, c’est mon destin, le triste sort d’avant ma mort. Pourquoi suis-je ici?
Personne ne répond, on dirait que tous ici sont muets, ils sont aphones. Ils me regardent, sans mot dire, certains avec leurs sourires d’anges alors que les autres m’épient, avec leurs langues tordues et leurs regards moqueurs. Mais à bien y penser, il y a des vivants dans la mort comme il y a des morts vivants dans la vie. Les vivants dans la mort sont plus intelligents que les zombies. Ils ne travaillent pas pour survivre.
Alors à quoi bon avoir peur? De l'autre cote de l’aventure, il y a des jardins de roses en fer. Des parcs de rires aussi beaux que les jardins suspendus de Babylone. Les anges polissent les squelettes de toutes les couleurs humaines, des couleurs de vie et d’amour, sensuelles comme une douce brise de jasmin après la dernière pluie.
La mort ne devrait pas être un cauchemar, elle nous donne la vie éternelle, elle met fin à la guerre et à toutes les atrocités du monde. Elle choisit pour nous la route à suivre, la destinée de chacun des vivants. Et malgré tout, j’ai encore le choix.
Je me questionne sur la vie que j’ai menée, une belle vie après tout. Pourtant j’aurais aimé en faire plus, vivre plus. Le manque de temps, ou peut-être est-ce parce que je n’ai pas osé foncer dans la vie, à pieds joints comme je l’aurais souhaité. Des fantasmes non assouvis, des envies irréalisables, des pensées controversées, une vie comme tout le monde finalement.
Devant ces deux portes, on me laisse choisir, de mon plein gré on me laisse aller. Je donne le soin à mes pas de me guider, de me montrer le droit chemin, celui de ma destinée. Les anges bénis du ciel me font chavirer et je plane sous leurs ailes déployées. Les fleurs odorantes de la terre parfument l’air de ce mirage bleuté qui fait miroiter le soleil doré à l’horizon. Je vole tout droit jusqu’au paradis. Cet endroit sublime où l’on ne va plus en enfer en soi, où la frayeur n’existe pas. Désormais, de la mort, je n’ai plus peur.
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Dragonne