Qu’il se révèle autant que la plume désire
A mesure que l’encre, au besoin de sortir,
Coule enfin dans mes veines et retourne au berceau;
Pour écrire ces vers, suis-je alors assez beau?
Comme un cadeau du ciel échoué dans les doigts
Du modeste passant demandant : « Pourquoi moi? »
Et qui passe pourtant, la fierté mesurée
Apostrophant le droit de toucher la beauté.
Ô miracle en ce lieu, dit - de la Poésie -
Où l’unique talent, puis-je le dire ainsi?
Ne plus rien refuser, plus encore : avaler!
Jusqu’à pondre un quatrain qui, déjà , existait…
Au fond d’une caverne, ébauchés sur les murs
Se mélangent les mots de la Grande Écriture,
Comme un Dieu sans promesse, une rime affranchie
Qui reflète un message à l’amour de sa vie.
Le poète. Qu’est-il ? Sinon l’autre facteur
Assigné à ce pont; délivrant, coeur à coeur,
La très chère évidence… Ô commun des mortels,
Celle-ci donc pour vous : rien de vrai n’est réel.
Et tant mieux si le temps révèle chaque phrase
À la face du monde, et tant pis s’il l’écrase
Aussitôt. Sur le pont, reste un trou de lumière;
La preuve qu’une plume est passée au travers.
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"Le monde a soif d'amour : tu viendras l'apaiser." A. R.