La Ges†e de Qwerian
Ecoutez braves gens cette lente mélopée.
Entendez maintenant cette triste chanson.
Oyez bien le récit que je veux vous conter,
L'histoire d'un paysan, encore jeune garçon.
Vous saurez quel drame le sépara des siens.
Nul autre ne vécut telle mésaventure,
L'amenant à fouler mille sols lointains,
L'amenant à connaître mille et une aventures.
Il aimait une fille qui s'appelait Myrianne,
Et le coeur de la belle battait du même amour.
Notre bonheur est grand, songeait alors Qwerian,
Et béni par les Dieux, il durera toujours.
Le père de la douce, l'honorable Vezil,
Etait riche, influent, respecté et aimé.
Sur ses terres l'on vivait à l'abri des périls,
L'on ne manquait de rien, l'on travaillait en paix.
Un matin, il manda Qwerian en sa demeure :
Ma fille n'est pas pour toi, tu n'es pas homme de bien.
Ton grand-père était serf, rappela le seigneur,
Ton père l'est aussi, tu n'es qu'homme de rien.
Ne voulant se plier à la loi du notable,
Le bouillant paysan répondit, passionné :
Il n'est plus fortuné que le plus misérable
Qui peut vivre à jamais avec sa bien-aimée.
Puis désignant Aros, il lança à son maître :
En ton fils coule ce sang dont tu vantes la gloire.
Il manie les épées et sait lire les lettres,
Mais pratique en secret les cultes les plus noirs.
A son fils, Vezil hurla comme un dément :
Tu t'es donc damné, vil pourceau impie.
Je te bannis, Aros, j'en fais là le serment,
Mais te maudis Qwerian, de m'avoir détruit.
Vint le soir sinistre où le perfide Aros,
Que l'on nommait Vilrin, demanda à Qwerian :
N'as-tu pas égaré cette fine dague d'os
Que ta famille vénère comme une céleste manne ?
Le jouvenceau, surpris, chercha la vieille lame.
Il devait à son père cet antique cadeau,
Symbole pour son clan, de la droiture de l'âme.
Ses aïeuls, dit-on, la tenaient d'un héros.
C'était un bel objet, lui déclara Vilrin,
Et le perdre serait un trés grand déshonneur.
Si tu voyais mon père tu ferais grise mine,
Car ta dague a plongé au tréfond de son coeur !
Fou de rage, Qwerian engagea le combat,
Mais moins fort que vaillant, il connut la défaite.
Les gens savent, dit Vilrin, que mon père tu défias
Tu dois fuir, à présent, ou ils prendront ta tête.
Le jeune homme blessé, naïf et affolé,
Se laissa prendre au piège de la voix ennemie.
Sans dire adieu aux siens et sans se retourner,
Par un froid clair de lune, vers l'orient il s'enfuit.
Tous l'avaient renié, apprit-il plus tard.
Pour son père, ses amis, frères ou compagnons,
Il incarnait la honte, le hideux cauchemar,
Dont tous avaient juré d'oublier jusqu'au nom.
Et bientôt s'ajouta, en son esprit martyr,
Une atroce douleur, une éternelle plaie.
Myrianne de chagrin s'était laissée mourir.
Sept nuits, il pleura sa tendre fiancée.
A l'aube, levant le poing, il supplia les cieux :
Que faut-il accomplir, pour ces crimes venger ?
Et depuis qu'il reçut une réponse des Dieux,
Il erre dans la lande, la Mor†à son côté.
B.
----------------
Un homme pleure.
Arrose une fleur.
Cueille la vie.
Un homme sourit.