Rouages du temps.
Rouages du temps.
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Certes, au début, il n’y a rien à voir,
Une forêt lugubre, de vertes prairies,
Le soir, des loups qui hurlent en bande,
A la vallée voisine, cousinent,
De doux gibiers condamnés,
Et des moutons qui paissent,
Tic, tac, écoutez le chant,
Tic, Tac, la plainte du temps.
A coup de hache, j’ai fait tomber des arbres,
Pour construire une douce cabane,
Un toit de mousse pour se reposer,
Des murs en rondins, une couverture de boue,
Puis j’ai ramené les chevaux sauvages,
Pour leur apprendre à vivre avec moi,
La nuit au sec, j’ai loué Dieu,
Tic, tac.
J’ai pris mon fusil et des rouges cartouches,
Pour tuer les sarabandes de sales bêtes,
Venues me voler mon blé,
Avec le pain et la viande,
J’ai mené la douce et belle vie,
Puis bientôt, j’ai cherché celle,
Qui deviendrait ma femme,
Tic, tac.
Je l’ai aimé, alors un fils est venu,
Je lui ai appris la charrue, la terre, le fusil,
Les champs s’allongeaient pendant ce temps,
Plus grands encore,
Et les arbres ployaient sous les fruits,
Bientôt, tout autour de la place,
S’installa tout un village,
Tic, Tac.
Avec une église et un clocher,
Qui sonne le temps, et ce qu’il reste à faire,
Le dimanche, on la remplit de monde,
La semaine, il y a une banque,
Un café, un grand bazar,
Des tas de maisons qui s’incrustent,
Et qui n’étaient pas là , avant,
Tic, tac.
Maintenant, je suis vieux,
Sur le point de m’en aller,
Le bétail regorge dans les étables,
La terre, don du ciel, chaque année,
S’emploie à nourrir son monde,
Les chevaux porteront mon cercueil,
En ruant jusqu’à la tombe,
Tic, Tac.
Je suis heureux de mon passage,
Heureux d’avoir laissé ma marque,
Sur cette terre, jadis inculte et sombre,
J’ai enfin le droit à une prière ultime,
Courant sur la terre qui n’est plus sauvage,
Et où résonnent encore,
Les grands rouages du temps,
Tic, Tac.
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