Plume de platine Inscrit le: 24/3/2016 De: De Breizh dite Izel Envois: 2240 |
Mourir comme Ulysse Derrière la montagne, le soleil se couchant Aux creux des vallons colore le maquis D’un reflet rose Sur un ciel bleu, tout embaumé
Les carabes cuivrés, les abeilles Les oiseaux et les papillons s’activent encore
Là -haut sur la colline Dans les frondaisons de la forêt L’air s’emplit de l’écho du chant sonore des sittèles
L’agitation du monde me semble si lointaine …
La grande bâtisse un peu délabrée Toujours pleine de charme, me fait de l’œil Les huisseries écaillées, les gros linteaux de granit Les murs de pierres sèches Les interstices remplis de fleurs, gorgées de soleil
Et les tuiles rouges du toit presque plat Sommeillent encore
Près de la maison, les murettes Les grands romarins bien taillés, les escaliers fleuris M’accueillent comme Ulysse, après un long voyage.
Chaleur de la pierre, odeurs offertes …
Le bon chien vient vers moi, il me reconnaît Tommy, fidèle. Oui, je suis bien Ulysse Le Père Badi avait raison En contrebas, le gargouillis du lavoir Un garçonnet et une fillette Jean Jean et Fanfan, courent autour Et chassent des papillons blancs Mais ceux–ci sont bien trop agiles
Je suis un peu fatigué La poussière du chemin sans doute
Sur le rebord de la fontaine Deux autres gamins sont plus sages Ils lisent, rient Je sais que ce livre est leur roman. Comment ? Grâce au Mur où je suis assis Sans doute …
La Murette du Sage
Mais dites, comme c’est bon, là ! Je bois sa douce chaleur Par tous les pores de ma peau La vieille Mado m’offre un verre de vin Du Clos Réginu. Elle a toujours vécu ici Ça je le sais aussi
Elle sourit
Se rides me parlent. L'occhju è rottu ! Oui, ça je le savais aussi
Son homme près d’elle est si prévenant Escogriffe, de velours, Nydåm le Grand Sampiero Corso, les oreilles poilues Les mains larges comme des bachiles Comme de grandes batulles Il l’entoure de sa tendresse Sa signatora
Entre les romarins, sous la tonnelle de vignes une grande table de bois Du lait de brebis, du miel, et aussi du jambon Des saucissons, une grosse miche Une fiasque de vin, du fromage, des fraises
Et cette odeur tenace, envoûtante – Qui ouvre grand mon appétit Odeur qui remonte des lentisques, des bruyères Des genêts, des lauriers thym, des cytises, des tamaris Des prunelliers, des arbousiers
Et ces deux-là , attablés, sont amants, je le sais. Ils mangent du raisin.
Les papillons blancs ont les ailes tagués De souffrances, de regrets De cœurs qui saignent, de chagrins Ils volent et bruissent près de la grande maison Dans tout le jardin
Leurs Ă©crits sont presque effacĂ©s DĂ©jĂ
Antønje et Pierrot lisent toujours Au fur et à mesure que les mots De leur roman s’écrivent, Se gravent, sur les pages. Ils rient aux larmes. Best Seller Et ne s’en alarment
Maria et Petru s’échangent encore des grains de raisin Tendrement, comme des colombes Les cheveux de jais de la belle illuminent le couchant Quelle douceur, quel silence …
Juste le son d’une Chjamà e rispondi, un peu plus loin Qui nous parvient J’y reconnais mes ténors Ce n’était pas dans l’Odyssée, mais que m’importe Si sbaglia u préte à l'altare
Ulysse, ou Vévé, je suis entouré De centaines de papillons blancs Graciles, aux ailes maintenant immaculées
Le sentier, mon chemin, ma route de la Consolation A traversé le miroir sans tain, sans un seul bris de glace
Cela ne me laisse pas froid, bien au contraire
Ici, au Pays de l’Amour J’ai le cœur, chaud, tout gonflé …
Cavalliero
L'occhju è rottu : le mauvais œil est brisé, conjuré...
Bachile, batulles : grands batoirs de bois
Signatora : femme capable d'exorciser le mauvais Ĺ“il
Chjamà e rispondi : joutes verbales poétiques et musicales, corses
Si sbaglia u préte à l'altare : le prêtre, lui, se trompe bien aussi à l'autel...
Certain noms évoqués ici sont vikings, norvégiens, ancêtres de chevaliers normands, eux même ancêtres de siciliens, sardes et autres corses actuels
Bonne lecture
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