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     En cloque
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Par conversation | Les + récents en premier Sujet précédent | Sujet suivant | Bas
Expéditeur Conversation
Bombay
Envoyé le :  6/11/2014 8:32
Plume d'argent
Inscrit le: 26/10/2014
De: Cintegabelle
Envois: 358
En cloque
En cloque.

Je l'aime, il m'aime, on se le dit souvent du haut de nos quatorze ans.
Quelques mois seulement, règles récentes, que je découvre le quotidien d'être femme.
Nous avons fait l'amour trois fois, sexe juvénile mais, dans la cour du collège, je crâne.
Capote, sida, grossesse, nous n'y pensons pas, nous sommes adolescents.

Hier encore, fous rires, discussions banales entre copines tirant sur notre clope
Je me vantais de connaître, première du groupe, cette joie
"Foncez les filles!" J'exagère une peu: " c'est super la première fois!"
Elles rient, m'envient, posent des questions, me passent au microscope.

La dernière fois pourtant, mon chéri m'a fait mal aux seins et je suis épuisée.
J'en parle à ma copine Julie qui rigole: "Imagine que t'es en cloque!"
Bon, je suis fatiguée, irritable. Mais, pas ça ! Pas à moi! Je me moque.
Pourtant après plusieurs jours sans mes règles, je m'inquiète en secret.

Un gros bide, jeans extra larges, t'imagines la honte!
Je file dans ma chambre, enfile vite mon pyjama de petite fille.
Et commence la torture. Je serre mon doudou, mon seul réconfort. Mais je vacille.
Inquiète, je pleure et prie pour que personne ne monte.

Courageuse, devant la pharmacienne, j'achète un test "pour ma grande soeur"
Je le fourre au fond de mon cartable, toujours rien de réel.
Je vais à l'école. Ne rien montrer. Surtout, rester naturelle!
Et les cours passent, je suis vide, je zappe tout, j'ai trop peur.

A la récrée, je file aux toilettes, les mains tremblante, je lis la notice,
Observe incrédule ce bâtonnet blanc de plastic à deux cases.
Un trait dans chacune: pas enceinte, c'est l'extase,
Une croix dans la deuxième: c'est le précipice.

J'hésite, j'ai envie de le jeter au fond de la cuvette
De toute façon il sera négatif! Ce n'est pas possible autrement.
Cet affreux test de grossesse sous mon urine: terrible moment.
J'ai pris une grande inspiration, regardé à la sauvette.

Ouf! Deux traits Soulagement. Je pose le test au sol et me rhabille...
Je le regarde encore furtivement avant de le jeter,
Et là, stupeur! Une foutue croix d'un coup apparaît.
Non, non! Je regarde, encore, encore et encore. Et je crie.

La sonnerie retentit. Dehors tout le monde rentre en classe, et moi, figée, debout.
J'ai mal au ventre, mal à la tête, je commence à pleurer, panique, envie de courir.
A cet instant, la seule chose qui me vient à l'esprit: fuir... mourir.
En retard, plus à ma place et une furieuse envie de me foutre des coups.

Ma seule idée: tuer ce ... ce quoi? ce bébé? Stopper cette grossesse.
En parler à qui? Mon père? Ma mère? Mon petit ami? Mentir?
Je me sens seule. Aller voir mon docteur? Ce sera encore pire.
Encore un jugement. Et toujours plus seule dans ma détresse.



Je voudrai que quelqu'un me prenne dans ses bras, qu'on me dise que c'est faux,
Que mon ventre est vide, vide comme avant, comme la veille.
J'appelle mon copain, sanglote. Le téléphone me brûle l'oreille
Il ne comprend rien. Je pleure encore et ne dis pas un mot.

Je me dis que la meilleure personne pour m'aider, c'est ma mère.
Elle aussi a été enceinte. Alors ce soir, en descendant mettre la table...
"Maman..." j'éclate en sanglots. Elle accourt, me demande ce qui est si abominable
Et je lui dis... Son mouvement, son recul, en y repensant, me colle encore de l'urticaire.

Elle n'ose pas même me regarder
Prend sa tête dans les mains et hurle,
Me prend par les épaules et me bouscule
Elle me terrorise, me rejette. Je me suis trompée.

"T'as couché avec ce garçon? combien de fois?" Elle me terrorise.
Pourquoi ces cris? Pourquoi cette violence dans ses gestes?
"T'as toujours été, ton père le pense aussi, une peste!"
Les coups, les gifles volent, je m'écroule, j'agonise

Elle s'assoit et me dit, nerveuse: "on prend rendez-vous chez le gynéco!
Je ne veux plus t'entendre, demain tu avortes.
Ferme la, pas un mot. Si tu refuses, je te fous à la porte
Je te charcuterai moi-même si c'est trop tard, si il le faut!"

Et nous y sommes allées. Ils ont parlé pour et devant moi
Les procédures, les délais... de toute façon invisible, dépossédée de mon avenir
Transparente, inexistante, coupable, j'accepte de me faire punir.
Date fixée, cachée derrière mes larmes, je ne suis plus à moi.

Amas de chair à demi nu que l'on ausculte, que l'on occulte
On s'est introduit dans mon vagin, je n'ai rien vu, rien compris
Embryon volé, disparu. C'est aussi mon coeur qu'on a pris.
Pour seul réconfort maternel: "Tais-toi tu n'est pas une adulte".

Ce souvenir m'appartient mais chaque histoire est unique.
Nous ne sommes pas seules, des portes s'ouvrent
D'autres se ferment et alors, face au monde, on se découvre
Une force, des ressources et des soutiens non toxiques.

D'autres, je le sais maintenant, m'auraient écoutée, soutenue
L'oreille d'un étranger, d' un docteur, d'un psy est souvent plus réceptive
Que la confiance en nos parents, nos amis: sensations si faciles et suggestives
N'oublie jamais: Tu es peut-être jeune mais jamais seule et toujours maître de l'issue.
Bubblegum
Envoyé le :  6/11/2014 8:44
Plume de platine
Inscrit le: 2/9/2014
De:
Envois: 2089
Re: En cloque
Poème très émouvant, quelle triste situation, et c'est si bien conté. Pauvre jeune fille, et quand je pense que ça doit arriver à pas mal d'entre elles. C'est affreux. Mais en effet, un psy dans ce cas là, je le pense aiderait beaucoup, quand ce n'est pas la mère. Cicatrices, pour la vie. Merci de ce partage.
yoledelatole4
Envoyé le :  6/11/2014 13:12
Modérateur
Inscrit le: 15/3/2010
De: là où personne ne revient ....
Envois: 32258
Re: En cloque
D'autres, je le sais maintenant, m'auraient écoutée, soutenue
L'oreille d'un étranger, d' un docteur, d'un psy est souvent plus réceptive

si vrai et si triste aussi
mes amitiés
yohann


----------------
la nostalgie est un bouquet de fleurs enfoui au fond de votre coeur ,
qui vous embaume quand remontent les souvenirs du bonheur ,
yohann

franie
Envoyé le :  6/11/2014 13:56
Modératrice
Inscrit le: 28/5/2012
De: BRETAGNE
Envois: 39234
En ligne
Re: En cloque
Bonjour Bombay

Un témoignage poignant drame d'une adolescente que personne n'écoute, incompréhension, manque de dialogue. Certaine colère bien exprimée en cette poésie d'un choix imposé.

Profondément touchant.

Amicalement Franie


----------------

anonyme
Envoyé le :  6/11/2014 15:24
Re: En cloque
J'ai eu beaucoup de mal à lire cet écrit jusqu'au bout tellement c'est poignant et j'ai eu des frissons en pensant à cette adolescente et à tout ce qu'elle a pu ressentir et subir.

Malheureusement certaines jeunes filles vivent cela et c'est terrible.

Bleuet

encrenoire
Envoyé le :  6/11/2014 15:44
Plume de platine
Inscrit le: 11/6/2013
De: Nord
Envois: 2868
Re: En cloque
Un poème très courageux...
alexcris16
Envoyé le :  7/11/2014 9:56
Plume d'argent
Inscrit le: 7/3/2014
De: Dari Bulan...
Envois: 464
Re: En cloque
un texte hors norme... tellement touchant, poignant, dur aussi.

Alexandre
eden33
Envoyé le :  7/11/2014 10:59
Plume de platine
Inscrit le: 6/3/2014
De:
Envois: 3059
Re: En cloque
Fort ressenti pour cet extrait terrible de vie, oui chaque histoire est différente, la famille, cette science infuse qui décide...

Mais, il y a des rebelles qui à ce jour admirent leurs enfants devenus adultes

Merci

Eden


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Il y a des chevaux d'argent qui brillent de mille feux, lorsque s'éteint le jour, lorsque tout n'est plus bruit. Lorsque la folie anime le ciel plein d'étoiles...alors pour quelques instants, quelques instants seulement, rêvons...

Anamorphose
Envoyé le :  10/11/2014 17:49
Plume de platine
Inscrit le: 3/11/2009
De: Terre
Envois: 2141
Re: En cloque
Sur ce moment de vie tres triste, j adore votre plume...
Ecrits et cris de main de maitre, sincerement

Amitiés
Anamorphose


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Je suis un cartésien désabusé : Je pense, donc je suis mais.... je m'en fous

La solitude aspire dès lors où nous aspirons à être solitaires

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