Journal de bord du second matelot Philippe Lemaitre du navire de la Méduse
Deux juillet mille neuf cent seize
Heure inconnue
A quelques miles de la Mauritanie
Voilà maintenant quelques heures que nous dérivons à bord de ce radeau de fortune
Je ne serai dire ö combien nous sommmes sous cette lune
Tant d'hommes abandonnés par notre commandant , monsieur Chaumarays
Cent-cinquante
Peut -être deux cent
Il y a une femme parmi nous
Je ne sais son nom
Je doute qu'elle connaisse le mien ....
Et je doute que celà ait quelque importance
Trois juillet mille neuf cent seize
Le peu de ration que nous avions sont maintenant épuisées
Un paquet de biscuits , juste un paquet de biscuits
Et quelques barriques de vin et d'eau
Elles aussi épuisées
Quelques hommes se sont jetés à l'eau
Sans doute dans un espoir meilleur
Ou quelques abandons de cette folie qui nous gagnent
Plusieurs de nos compagnons sont décédés
Certains dont le lieutenant Lescure ont décidés de les jeter par dessus bord
J'ai soif , si soif ,
J'ai faim , si faim ......
Sept juillet mille neuf cent seize
Le vigile qui était a mes cotés vient de mourir
Les étoiles se sont assoupies a notre infortune
La nuit j'entends des bruits , des mots des phrases sont lancées
Les hommes parlent de nourriture improvisée
Mais de quoi parlent ils donc ?
Quelles idées de folie les assaillent ?
Je ne peux me résoudre à dormir
Mon compagnon de naufrage me guette , m'observe incidieusement
La femme qui nous accompagnaient est morte
Ils ont décidés de garder son corps
Sans doute dans l'espoir vain de lui rendre une scepulture , un jour , un autre jour plus lointain
Que dieu ait pitié de nos âmes
Si dieu éxiste encore .
Huit juillet mille neuf cent seize , je crois
J'ai si soif , si faim
La nuit qui à précédé , ils l'ont faient
Cette femme et deux de ces hommes qui ont succombés
Ils l'ont faient
Ce mot que je n'ose prononcer :
Cannibalisme
Les restes et le sang de ces corps en attestent
Comment ont ils put ?
Mes lèvres me brûlent
Et ce vent , ce vent qui hurle
Et les hommes qui crient ,
Qui espèrent un secours de l'humanité
Mais sommes nous encore seulement humains ?
Douze juin mille neuf cent vingt
J'ai bu cette eau salé
je n'aurai pas dut
Mais j'ai si soif encore
Un de mes compagnons m'a offert un morceau de canard
Il était certes cru mais il a apaisé ma faim
Au moins pour quelques heures
Ma mère est venue me rendre visite ce matin
Nous avons parlés de tout et rien
j'ai demandé au matelot Legasquet d'arreter de me regarder fixement ,
Rien n'a changé , j'ai décidé de le jeter par dessus le pont
Lescure est mort , ils l'ont dévorés
Bientöt viendra l'heure du repas , la cloche va bientöt tinter ........
Seize mars mille neuf cent vingt-deux
J'ai mal au ventre , mais oú suis je
J'ai du m'endormir
Nous sommes si peu nombreux
Dix , vingt peut être
Ou est la dame qui nous accompagnaient
Je ne vois d'elle que des lambeaux de sa robe autrefois bleue
Et du sang , partout du sang !
Mon dieu qu'avons nous faient ?
Et oú est ma mère
Oú sont les hommes ?
Mes pieds alors que j'écris sont dans cette eau glacée
Oú est la terre ?
Oú est cette voile qui viendra nous sauver ?
J'ai la gangraine , c'est le médecin qui me l'a annoncé , le canard n'est pas revenu ce matin .
Douze juillet je crois
Année , e ne sais plus
Ait plus la force d'écrire , uste boire encore un peu
Elle m'aide à boire maman
Heureusement elle est lÃ
Et le canard
Mes lèvres brulent
J'ai si soif , maman encore un peu , uste un peu
Uste un peu
Trente trois mars
E m'en vais ailleurs
Ais j'ia maman avec moi
M'en vais aillurs
Aillueiurs
Trente neuf
Soif , si soif , faim
Fin
Si faim
----------------
la nostalgie est un bouquet de fleurs enfoui au fond de votre coeur ,
qui vous embaume quand remontent les souvenirs du bonheur ,
yohann