Toutes les émotions passent sous ma fenêtre
Comme d’insaisissables vagues sur la plage,
Qui dans le monotone mouvement des âges
Se laissent quelquefois sur le sable paraître.
Et je vis seul tel un sphinx trônant sur l’azur,
Ne répondant de rien devant ces tristes cieux
Qui s’écoulaient en moi comme dans un grand creux,
Et paraient mon esprit de sinistres teintures.
O vous étoiles qui tachaient les grands cieux noirs,
Ces immensités vidées de tous sentiments
Qui par leur calme infini me ressemblaient tant,
Comme je vous hais miroirs de mon désespoir !
Et vous soleil, despotique roi des mortels,
Voici bien longtemps que j’ai déchiré vos robes
De chaleurs et que de ce temps je me dérobe,
Pour devenir à mon tour un astre cruel.
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J'ai tendu des cordes de clocher à clocher ; des guirlandes de fenêtre à fenêtre ; des chaînes d'or d'étoile à étoile, et je danse.(Arthur Rimbaud).