Je suis saigné à blanc
Par cette chienne de vie
Qui va toujours mordant
Dans mes chairs trop meurtries,
Je suis saigné du Temps
Qui s’en va et me fuit
Pareil Ă ces serpents
Qui glissent et s’enfuient
Quand ils vous ont mordu…
Je suis saigné à blanc
Et ne suis plus
Qu’un pauvre mort-vivant,
Automate dans les rues,
Ne comprenant rien Ă rien
Avec son cœur à nu
Dans le creux de ses mains ;
Et saigné de mes chants,
De toutes mes envies,
Je marche en tâtonnant
Au long des murs fendus
Avec leurs trous béants
OĂą des morceaux de ciel
Font comme du verre brisé,
Mon sang n’est plus que fiel,
En moi le serpent s’est glissé…
Je suis saigné à blanc
Par des couteaux pointus
Qui, plantés dans mes flancs,
Tremblotent doucement
Dans une sorte d’agonie,
Mon cerveau se défend
Et ne veut pas mourir,
Il n’en peut plus :
Le corps n’est pas content
Et sait bien là le dire…
Il est tout blanc,
Saigné de mots,
Sang couleur d’encre
Qui sèche au vent,
C’est la mort lente…
Jacques Hiers
Texte déposé. Tous droits réservés.
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