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     Le vitrail du p’tit JĂ©sus (nouvelle)
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Expéditeur Conversation
OLUCINEP
Envoyé le :  18/3/2012 9:30
Plume d'or
Inscrit le: 1/4/2010
De: France Centre
Envois: 1007
Le vitrail du p’tit Jésus (nouvelle)
Le vitrail du p’tit Jésus

Bien que le clocher ne soit pas tout à fait droit, l’église de ce village construite au XVème siècle et fort bien entretenue, était vraiment très jolie avec son promenoir, son presbytère couvert de lierre et sa grande cour descendant en pente douce vers la rivière.
Cette cour, avec sa perspective sur le pont de fer forgé, servait de cadre à toutes les photos de mariage dès la belle saison.

Trois particularités rendaient cette église célèbre.
D’abord sa couverture très travaillée, à laquelle les ardoises bleutées et les soulèvements de toit décalés donnaient une étonnante impression de volume.

C’était une toiture unique réalisée par un couvreur qui avait fait le vœu d’y mettre tout son art. A la suite d’une chute qui aurait du le tuer, il ne fut que légèrement blessé. Considérant qu’il devait la vie à la divine mansuétude, il réalisa une charpente incomparable ne comptant ni ses heures, ni sa fatigue.

Le maire du village était très fier de recevoir régulièrement des demandes d’élèves de plusieurs écoles d’architecture pour visiter le village.
Bien entendu, les étudiants venaient surtout pour dessiner et photographier l’église sous tous ses angles après s’être promenés, tête baissée, sous les poutres enchevêtrées du clocher.

Ensuite le fait que des faucons pèlerins aient élu domicile sur la face sud du clocher avait réjoui les superstitieux et les écologistes. Certains disaient que ces oiseaux porteraient bonheur au village tant qu’ils logeraient dans le clocher.
D’autres venaient en curieux, on les voyait, munis d’appareils photographiques allongés de téléobjectifs monstrueux, traquer les moindres mouvements de ces rapaces élégants, au vol silencieux et nonchalant, attendant de fondre sur toute proie digne de leur appétit.

Enfin la curiositĂ© principale Ă©tait le ʺvitrail du petit JĂ©susʺ qui, curieusement, reprĂ©sentait Sainte Solange, vierge et martyre, patronne du Berry, en prière avant d’être dĂ©capitĂ©e, mais le petit JĂ©sus ne figurait pas sur ce magnifique vitrail montĂ© au plomb et qui paraissait neuf tant les pavĂ©s de verre Ă©taient lumineux et les joints de plomb propres et brillants.

J’essayais de me renseigner pour connaitre l’origine du nom du vitrail qui, en fait, n’avait rien à voir avec ce qu’il représentait et l’historique de son apparition dans l’église.
En effet si l’église avait été terminée environ en 1620, ce vitrail avait été posé en 1771 ; l’année était gravée sur une des colonnes de l’église faisant face au vitrail et l’inscription :
ʺMDCCLXXI DEUS FECITʺ signifiait bizarrement : Dieu le fit en 1771.

Des personnes interrogées, aucune ne sut me répondre mais toutes, sans exception, me dirent d’aller voir le Curé de la paroisse, petit saint local, charitable, disponible et très actif et qui, érudit, parlant le grec et le latin était de plus féru d’histoire.

Ah ! Quel brave curé. En échangeant une poignée de main il ne vous disait pas bonjour mais « Que Dieu vous garde car seul Il le peut et moi je vais vous bénir, c’est dans mes cordes et ça ne peut vous être que bénéfique ».
Il émanait de lui une bonté, une attention, telles qu’on se sentait important à ses yeux.
J’étais entré dans l’église après la fin de sa première messe et il m’avait vu arriver, me signant après avoir pris de l’eau au bénitier et faisant une génu-flexion devant l’autel de Saint Joseph ou brillait une lampe rouge indiquant la présence du Saint Sacrement.
Il m’analysa très vite. Vous êtes catholique, vous croyez en Dieu mais vous êtes loin d’être un pratiquant assidu. Vous n’irez pas en enfer pour si peu ; mais, la messe, mon fils, même si elle semble parfois ennuyeuse est toujours une occasion de regarder en soi-même face à son Créateur.
Il changea de conversation aussitôt : je ne pense pas que vous veniez me voir pour un cours d’instruction religieuse ; que puis-je faire pour vous ?
Monsieur Le Curé pourriez vous me raconter l’histoire du vitrail du P’tit Jé-sus ? Je vous sais occupé sur plusieurs paroisses aussi je vous invite à déjeu-ner ou diner avec moi, quand il vous plaira, pour que nous puissions en parler au calme.
Je dus insister un peu pour qu’il accepte de diner avec moi le lendemain soir.

La ʺSonnerie de Corʺ Ă©tait un restaurant petit mais confortable oĂą la table avait une excellente rĂ©putation et oĂą, en pĂ©riode de chasse, le gibier le mieux cuisinĂ© de la rĂ©gion ainsi que les qualitĂ©s de saucier du chef attiraient les gourmets et les gourmands.

Le brave curé n’avait pas d’habitude gastronomique ; il but un verre de San-cerre en apéritif et continua à l’eau. Pour les plats, Il était curieux de tout et voulant gouter à des mets variés, nous décidâmes de commander des plats différents que nous partagerions. Nous choisîmes donc quatre demi-plats pour notre plus grande satisfaction.
Au moment du bĂ©nĂ©dicitĂ© le prĂŞtre plein d’humour transforma sa prière tra-ditionnelle en y ajoutant Ă  voix basse : ʺet soyez encore plus remerciĂ©, Mon Dieu, pour ce dĂ©licieux dĂ©bordement de mon ordinaireʺ.
Appréciant notre diner nous parlions peu, mais avant le fromage le sympa-thique ecclésiastique commença son récit.

Ce n’est pas l’histoire du vitrail que je vais vous raconter mais plutôt sa lé-gende. Elle est invérifiable mêlant des faits historiques à leur transmission orale évoluant de siècle en siècle.
Le récit prétend mettre en jeu un miracle que l’Eglise ne saurait reconnaitre mais qui est la cause d’une superstition bien assise dans l’esprit des gens de la région.

Lors de la construction de l’église on chargea un maître-verrier et ses élèves de la réalisation des vitraux.
A l’époque on taillait les verres colorés dans la masse, sur place, et on réalisait un dessin monté au plomb fondu sur un châssis que l’on plaçait dans la fenêtre correspondante.

On passait donc d’un dessin à un puzzle qui assemblé pouvait être fixé. Les pièces du puzzle étaient longues à préparer, la forme, la couleur, l’exposition à la lumière et la brillance jouaient un rôle essentiel dans la beauté du dessin.

Tout se serait passé très bien, grâce à Dieu, si hélas le diable n’y avait pas mis du sien !

Le jeune verrier qui réalisait le vitrail Sainte Solange était un superbe jeune homme qui dans le village avait déjà séduit quelques jeunes femmes sensibles à son charme et qui passait rarement ses soirées seul.
Un soir d’été ou il se promenait avec sa dernière conquête, descendant vers le pont de la rivière, pour cacher ses amours villageoises dans un petit bois, un orage terrible éclata.
Ils eurent juste le temps de se réfugier dans l’église pour ne pas être trem-pés.
La pluie durant, les jeunes gens firent, dans une église que la jeune fille croyait non consacrée, sur des bâches de coutil, ce qu’habituellement des amants font dans un lit.
Le jeune verrier savait que la veille des reliques de saints avaient été scellées dans la table de pierre de l’autel mais il n’en dit rien à sa maîtresse supposant que cela, ne suffisait pas pour faire d’un simple bâtiment un lieu saint.

Mais cela suffisait et le lieu Ă©tait saint.

Le jour où les vitraux furent posés en, présence de nombreux prélats, des autorités du village et de quelques dignitaires du département, on s’extasia sur leur perfection qu’un beau soleil de printemps faisait ressortir.
Soudain le ciel s’obscurcit le tonnerre gronda et un éclair zébra le ciel au mo-ment où la foudre tombait sur le vitrail de Sainte Solange.
Au lieu d’exploser le vitrail fut simplement, mais inexplicablement, percé de quatre trous de taille différente.
Tous les éléments saints du vitrail avaient été détruits par la foudre ; il ne res-tait qu’une femme sans tête donc sans auréole, sans livre de prière, sans cha-pelet et sans croix.

Bien que désagréablement surpris, les témoins de l’accident l’attribuèrent à une inévitable fatalité et dans les jours qui suivirent il fut prévu de refaire le vitrail à l’identique.
En fait on boucha les trous avec des verres neutres et il fallut cinquante ans pour que les travaux soient repris par un nouveau maitre-verrier et ses élèves.

La nouvelle Sainte Solange était encore plus lumineuse car au lieu de compléter le vitrail abimé
Il avait été démonté et refait avec des verres en provenance d’Italie supérieurs aux précédents.

Le vitrail fut remonté dans sa fenêtre un soir tard. Les verriers partirent se reposer en laissant l’œuvre qui leur avait parue merveilleuse à la lumière du couchant. Contents de leur travail, ils attendaient de le voir en pleine lumière du jour.
Il ne restait plus que le polissage des joints de plomb à effectuer et c’était un simple travail d’élève.

En pleine nuit, la porte de l’église fut fracturée et un groupe d’ivrognes, hommes et femmes, s’y réfugièrent et s’y livrèrent à des actes réprouvés par la morale, même en dehors des églises.
Au matin, en dehors de quelques bouteilles abandonnées et de la serrure, qu’il fallut réparer, on ne remarqua rien de particulier dans l’église.

Le nouveau vitrail, véritable chef d’œuvre, attendit le dimanche d’après pour sa bénédiction.

Au moment du signe de croix attendu, le ciel devint presque noir, on entendit des coups de tonnerre et au milieu d’éclairs flamboyants le vitrail explosa totalement ne laissant à l’intérieur de l’église que le morceau représentant la tête de Sainte Solange avec son auréole, face contre terre.

La consternation fut grande et on commença à parler de malédiction, de sort diabolique et de damnation de l’église ou de son lieu de construction.
On boucha la fenêtre avec du verre blanc et il fallut alors presqu’un siècle pour que l’on se décide enfin à finir ce dernier vitrail que Dieu lui-même n’aimait pas selon les rumeurs circulant dans le village.

Un grand maître-verrier vint ; seul, très âgé, et ne voyant bien que d’un œil, mais on lui avait confié les dessins historiques du deuxième vitrail, que l’église avait conservés et qui lui paraissaient incomparables.

Il tailla directement toutes les pièces de verre qu’il aurait à assembler ainsi que les baguettes de plomb.
Au moment ou il allait transférer les pièces sur le châssis, sa vue se brouilla une sorte de neige permanente tomba devant ses yeux et il sentit ses mains et se jambes devenir lourdes et immobiles.
Il peina pour s’agenouiller sur le sol et pria en pleurant « Seigneur aidez-moi à terminer cette œuvre à laquelle je tiens et qui a subi tant de malheurs».

Sa vue s’éclaircit un peu et il vit un jeune garçon d’environ dix ans s’approcher de la table de travail, prendre les pièces de verre une à une et les placer avec la précision d’un verrier expérimenté. Puis il coupa, couda mit en place les morceaux de baguettes de plomb avant de disparaitre derrière l’autel.

Le maitre verrier s’endormit, quand il se réveilla sa vue lui parut normale, il se remit au travail et termina le vitrail sur lequel, seule les soudures du plomb, restaient à faire.

Il appela alors le curé de l’époque pour qu’il puisse bénir de suite son œuvre, avant même de la monter à sa place définitive, sans manifestations inutiles.

Le châssis fut mis le lendemain dans sa fenêtre,
Le vitrail était encore plus beau que les précédents et le vieux verrier que l’on prit pour un gâteux disait à tous ceux qui voulaient bien l’entendre :
« Celui là, il ne lui arrivera rien, c’est le petit Jésus qui l’a monté ».

Voila mon fils pourquoi ce vitrail est appelé le vitrail du P’tit Jésus, encore de nos jours.

Mais mon père en regardant bien tous les vitraux de l’église j’ai remarqué que Sainte Solange paraissait, excusez l’expression, plus neuve que les saints des autres vitraux.

« Mon fils c’est exact les plus vieux ont environ cinq siècles et celui-ci environ trois siècles et demi ».
Au bout de trois siècles et demi, rien ne justifie que ce vitrail paraisse neuf et reste propre par rapport aux autres vitraux de l’église.

« Mon fils, pensez-vous qu’il soit nécessaire que tout s’explique ? ».

Olucinep (alias Armand JUPO dans certaines publications)
Honore
Envoyé le :  20/3/2012 10:33
Modérateur
Inscrit le: 16/10/2006
De: Perpignan
Envois: 39531
Re: Le vitrail du p’tit Jésus (nouvelle)
Merci car j'ai été vraiment passionné par ce récit si bien conté.
HONORE
Parceval
Envoyé le :  7/4/2012 10:01
Plume de platine
Inscrit le: 11/4/2011
De:
Envois: 3485
Re: Le vitrail du p’tit Jésus (nouvelle)
Une bien belle histoire
A conter aux veillées
On pourrait presque y croire
Tant c'est bien raconté

Amitiés à l'excellentissime
OLUNICEP

Parceval
OLUCINEP
Envoyé le :  9/4/2012 20:26
Plume d'or
Inscrit le: 1/4/2010
De: France Centre
Envois: 1007
Re: Le vitrail du p’tit Jésus (nouvelle)
Merci Ă  tout lecteur et tout commentateur
j'en pousse mon crayon avec bien plus d'ardeur.


Cordialement.
crisroche
Envoyé le :  17/4/2012 9:56
Plume de diamant
Inscrit le: 27/7/2008
De: RĂ©sistance
Envois: 13522
Re: Le vitrail du p’tit Jésus (nouvelle)


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cyrael
Envoyé le :  6/3/2013 12:38
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 30/10/2005
De: ****
Envois: 83557
Re: Le vitrail du p’tit Jésus (nouvelle)


bravo j'ai aimé
découvrir ce vitrail
qui vous a inspiré
belle prose

amitiés


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l'Amour rayonne quand l'Ame s'élève, citation maryjo

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