A Toi
Mon cœur était fermé pour cause de dégoût,
Antre désaffecté où erraient des garous.
Regard indifférent, mon esprit contemplait
Le pillage incessant, les défunts et les plaies.
Blanchie sous le harnais, ma lourde carapace
Semblait me protéger de toutes les menaces.
Je regardais passer, dégoulinants d’amour,
D’un œil désabusé, les couples alentour.
Derrière moi je traînais, lambeaux sanguinolents,
Les restes écharpés d’un vieux cœur inconstant,
Prenant pour de l’amour tous ces corps de passage,
Et qui, au petit jour, révèlent le saccage.
Ultime punition d’une vie de débauche,
Une révélation ; des rêves qui s’ébauchent.
Un regard qui se pose et qui me tétanise,
Ma certitude explose, une passion s’attise.
Ton corps, je ne l’ai vu. Je n’ai vu que ton âme,
Et je me sens perdu, je coule corps et âme.
Comment puis-je t’aimer du profond de mon être,
Sans même désirer, sans même te connaître ?
Tu occupes mes heures, tu habites mon âme.
Un mot sort de ton cœur ! C’est pour moi une lame
Qui plonge au plus profond de mon corps viscéral,
Son fil dur qui me rompt de son acier brutal.
« Tu me veux pour ami ! » Ce petit mot banal,
Qui de toute ma vie ne m’avait fait si mal,
Pénètre lentement, s’insinue dans mes veines,
Et creuse à chaque instant, le gouffre de ma peine.
J’aurai donc des regrets accrochés aux remords.
Je t’aurais tant aimée en femme de ma mort,
Qui aurait pris ma main à l’heure du départ,
Et puis laissé empreint le plus beau des regards.
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KukiKuki