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     J'AVAIS DIX ANS... mes années dans le Vercors
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Expéditeur Conversation
xophe13
Envoyé le :  16/5/2011 9:31
Plume d'or
Inscrit le: 25/6/2010
De:
Envois: 666
J'AVAIS DIX ANS... mes années dans le Vercors
Après un mauvais trimestre en CM1, je redoubla cette classe dans un internat à 1 000 mètres d'altitude dans le Vercors. Je découvris la vie en groupe, le partage d'une chambre à trois pensionnaires, le lait que l'on allait chercher directement à la ferme, le sport (aïkido, ski de fond, vélo, randonnées pédestres), les chaussons…en classe, mais aussi les goûters frugales, la langue-de-boeuf au déjeuner… et la séparation d'avec maman.

Edith le dimanche soir

Les week-ends-ends débutaient le samedi en fin de matinée et se terminait l'après-midi vers les 18 heures où il fallait, après l'Ecole des Fans présenté par Jacques Martin à la TV, se préparer pour une semaine de pensionnat. Même si le lieu était magnifique, sorte de bulle protectrice, loin du chaos de la vallée et des problèmes du quotidien, la fin du week-end, je la vivais très mal. Cette séparation d'avec maman était douloureuse. Ensemble, j'avais l'impression que l'on pouvait se protéger mutuellement. D'ailleurs à l'époque, j'avais certains rituels pour éloigner le mauvais sort en touchant l'un des barreaux en bois de mon lit d'enfant.
Puis, nous traversions le long cours de Grenoble, puis les communes du Pont de Claix, Le Gua et cette route sinueuse et parfois verglaçante en hiver qui nous menait à Prélenfrey dans le Vercors. Arrivé, il faisait nuit. Je ne me souviens que des mois d'hiver, bizarrement. Et maman, qui repartait, seule, sous le mauvais temps ou dans la nuit la plus noire. Moi, derrière les larges fenêtres de la salle à manger, je retenais mes larmes.
Lors de cette heure de trajet, il y avait des K7 dans la boîte à gants de la voiture de mana, notamment une compilation d'Édith Piaf que j'ai passée en boucle. Mes chansons favorites allaient aux airs les plus mélancoliques, Milord (écrite par Georges Moustaki) ou Mon Dieu, écrite après la disparition de Marcel Cerdan, grand amour de Piaf. Plus tard, j'ai retrouvé le morceau sur cd en version anglaise. L'émotion était intacte. Je n'ai pourtant pas apprécié le film tant acclamé et interprétée par Marion Cotillard qui je trouve, traîne en longueur et dont le jeu de l'actrice comme le maquillage sont trop accentués. Dans le genre biopic, je préfère la performance, ô combien, juste et génialissime de Sylvie Testud dans le rôle de la romancière Françoise Sagan dont j'ai apprécié certains ouvrages dont le dernier Derrière l'épaule (où l'auteur après avoir relu toute son œuvre romanesque en fait une critique des plus objectives) ou Un chagrin de passage qui raconte l'histoire d'un homme apprenant qu'il a un cancer incurable et qui va se rapprocher aux femmes de sa vie jusqu'au "passage" de l'erreur de diagnostic.


Martine d'Albion

Mon instititutrice s'appelait Martine Peters. Elle avait un charme fou qui ne laissait pas insensible la gent masculine dont le mono prof d'aïkido qui était marié à l'une d'entre elles (elles étaient trois). D'ailleurs, ils n'arrêtaient pas de se taquiner gentiment lors des récrés. Elle avait grande et de légères rondeurs qui lui allaient bien. Martine m'avait même envoyé une carte postale du Kent avec ses mots inscrits au dos : "bonjour Christophe, je suis tout là-haut dans le Nord, pourtant il fait un temps radieux depuis mon arrivée ici. Je souhaite que de ton côté, les vacances bien méritées se passent agréablement. A bientôt, je t'embrasse." J'ai trouvé que la paroisse de Westerham représentée sur cette carte, assez austère, était aux antipodes de son caractère solaire mais ce fut une grande joie de la recevoir avec notamment ce timbre de 10 pences où figure comme à l'accoutumée Sa Très Gracieuse Majesté. J'ai aussi conservé une photo de Martine remettant des cadeaux lors de la fête de fin d'année, tout près du sapin, décoré « pauvrement » lors de travaux manuels. J'aimerais bien vous revoir Martine. Where do u live now?

La récré

La récré, c'est l'attente des lettres que m'envoyaient maman, mon beau-père et parfois cousins, tante et marraine. Maman m'écrivait le lundi pour que je reçoive le lendemain sa lettre ; celle de mon beau-père (souvent une carte poste de Grenoble et sa région) était reçue en fin de semaine. Ce moment était précieux et la jalousie fréquente car étions qu'un petit nombre à réceptionner ces plis. Avais-je à cette époque à l'esprit d'être privilégié ? J'ai longtemps été un enfant roi qui pour Noël recevait une dizaine de cadeaux plus beaux et impressionnants les uns les autres autour d'un sapin sublimement décoré avec sa crèche immense décorée de santons. J'ai été, en effet, très privilégié durant mes premières années. Peut-être ai-je dû payer tout ça ainsi que mon égoïsme de jadis via ma santé fragile et les vaches maigres qui suivirent lors du changement de situation de mon beau-père qui perdit son statut de patron pour devenir simple chômeur... Durant quinze longues années, j'ai vu maman et mon beau-père se contenter de sardine à l'huile, le soir, pour dîner et compter jusqu'au centime près, pour finir la semaine. A cetté période, mon beau-père buvait plus que de raison. Maman devait cacher les bouteilles de vin jusqu'aux alcools de la pharmacie mais quand on souffre d'alcoolisme, s'il faut passer des heures, on les passe à trouver la planque et à boire en cachette pour soulager sa peine. M. est mort au début des années 1990 d'un cancer de la gorge (il fumait aussi beaucoup). Paix en son âme même si je n'ai jamais été proche de lui à cause de son éducation un peu stricte et son manque de virilité qui me gênait un peu. Cependant, M. était le cerveau de la famille recomposée. On pouvait tout lui demander, il avait une connaissance impressionnante. Insomniaque, il pouvait lire un livre par nuit notamment des essais historiques ou des polars.

Le passe-plat

Je me souviens, avec mes camarades, attendre que la cuisinière principale dépose sur le buffet du réfectoire, les biscuits fourrés à la vanille (trois par sachet). Et hop, dès qu'elle eut tourné le dos, nous en mettions dans nos poches sans toutefois trop éveillé les soupçons.
Le pire était le jour de la langue de boeuf. Plus tard, on a eu beau me dire que bien préparé, ce plat pouvait être succulent, je n'ai jamais pu en goûter à nouveau. Le jour de cette langue-là, le ou la monitrice qui encadrait l'une des trois tables (la quatrième était séparée d'un rideau opaque et réservée aux institutrices) devaient batailler pour nous obliger à terminer nos assiettes. Beaucoup redoutaient ce moment. Les meilleurs menus étaient réservés pour les veilles de congés comme pour Noël ou l'on nous préparait notamment des endives au jambon (devenues un de mes plats préférés). Comme tous les gamins, ce sont les pâtes qui faisaient l'unanimité à contrario du poisson ou de la salade qui de temps en temps cachait une petite limace dans son univers de chlorophylle.
A chaque repas, l'un des internes de chaque table étaient de corvée de service et devais apporter les plats via le passe du même nom qui séparait la cuisine du "mess" des enfants du CP au CM2 que nous étions.

Les mercredis sans TV

Le mercredi, c'était le jour des loisirs comme le ski de fond en hiver ou la montée "en danseuse" jusqu'au Col de l'Arzelier, l'été : des jeux de pistes qui d'un indice nous menait à la cachette suivante et ainsi de suite jusqu'au lieu de rendez-vous où souvent nous goûtions. Le mercredi, c'était aussi l'après-midi où la directrice était la plus généreuse en puisant davantage dans les réserves de confiseries qu'apportaient nos parents pour la "communauté". Le chocolat noir était souvent remplacé par du "au lait" et le pain un peu sec de la veille remplacé par du frais. J'en parle un peu à la Zola mais c'était la réalité. Un des mono nous apprenait même l'aïkido dont il était ceinture noire. Il était "à la colle" avec l'instit' des petites classes. Ils vivaient sur place à quelques mètres de notre pensionnat. Il avait un gros chien qui m'impressionnait et qui aboyait souvent. Aussi, dans leur chambre, la fenêtre était bloquée car entre le volet et la vitre, des guêpes avaient investies les lieux pour en faire leur nid.
En fin d'après-midi, la directrice -assez old school- nous autorisait une fois de temps en temps à regarder un programme TV pour la jeunesse, à l'époque Capitaine Flam (...tu n'es pas de notre galaxie / mais du fond de la nuit, Capitaine Flam / d'aussi loin que l'infini, tu descends jusqu'ici / pour sauver tous les hommes...). La musique du générique de cette série d'animation japonaise a été signée par Jean-Jacques Debout ce que je su bien plus tard. Il y avait un calme quasi religieux lors de ce programme que nous attendions impatiemment et il était hors de question d'en rater une seule image.

Opération "Bonbons"

Pour un souci de partage, comme il était écrit dans le règlement intérieur, toute confiserie était mise en commun. Nous trouvions que celles-ci étaient davantage distribuées pour le personnel et moins à ceux qui les avaient apportées. La planque était à l'infirmerie dans une boîte en fer blanc remplie à ras-bord. Un soir, après que la mono de garde est fait le tour des chambres pour vérifier que nous ayons bien respecté le "couvre-feu" des
21 H 30 et ayons bien brossé nos dents, alors nous vint une idée diabolique. Les cornes et le trident ainsi que l'air de La Salsa du Démon nous ayant habité, nous commençâmes à descendre les escaliers, le commando était formé de trois garçons de chambrée. A tâtons, nous marchions jusqu'à la caverne d'Ali Baba. Nous avions pas besoin du sésame ou d'un passe, seulement la motivation d'aller jusqu'au bout de notre envie. Il faisait noir, il y avait quelques craquements dans cette grande maison de trois étages, immense chalet que l'on remarquait de loin en arrivant à Prélenfrey, situé au sortir du village. L'infirmerie était accolée au bureau de la directrice qui servait aussi aux entretiens avec l'orthophoniste et les psychologues. Je n'aimais pas qu'en plein milieu de la classe, l'une d'entre elle (pour moi, la psy.) vienne interrompre mon activité scolaire pour me faire travailler avec des cubes ou m'allonger sur le tapis de sol pour une séance de relaxation. Je n'en voyais pas l'utilité. Il me tardait de remonter et de rattraper le retard de ma leçon laissée en plan.
Arrivé en bas de l'escalier, nous avions plus qu'à nous rendre à la deuxième porte sur notre gauche, la première étant la blanchisserie. Et hop, monter sur un tabouret et prendre à pleine main, un peu du trésor de douceur qui nous tendait les mains et surtout nous narguait depuis tant de temps. Nous étions comme des toxicos en manque. Et nous remontions les marches jusqu'à notre chambre du premier et sous les draps, nous nous gavions de sucreries, tout en rigolant "comme des bossus" jusqu'à réveiller la mono qui survint dans notre chambre, éclairant la pièce mais ne découvrant pas notre larcin. Seulement, une fois de bonheur, ne nous suffisait pas. Il a fallu une seconde tentation. Et cette fois, j'ai eu juste le temps de me cacher aux toilettes de mon niveau, tandis que mes deux compagnons d'infortunes furent pris en remontant les escaliers et… punis. J'attendais que tout revienne silencieux pour regagner ma chambre comme si de rien n'était.

Privé de veillée

S'il y avait bien un événement que l'on ne ratait pour rien au monde, c'était bien une veillée d'anniversaire pour égayer les soirées sans TV, sans famille...
C'était un mercredi après-midi, je revenais du ski de fond. Mes copains et moi-même rendions la matériel le ski et nous nous changions pour regagner notre pensionnat. La monitrice-accompagnatrice était la femme du maire de Trucmuche-les-Oies (ex prof de philo.) et très dirigiste. En un mot, une personne avec qui on n'envisage pas de faire la fête ou nous remonter le moral. Je crois qu'elle m'avait pris un peu "en grippe". En général, je sentais que les femmes du pensionnat, exceptée la blanchisseuse (qui désirait s'élever socialement), étaient jalouses de maman, qui avait "la mauvaise idée" d'être bourgeoise et rendait encore un peu plus sectaire le système enseignant.
Cela étant dit, cet ex-prof de philo reconvertie en mono a cru lorsque je me grattais à travers mon bonnet, que je lui faisait le signe "t'es folle, toi". Comme une furie, elle vint vers moi et me priva de veillée du soir ! Après le dîner, je dus aller me coucher sans dessert. A l'époque, cette punition marqua car le soir, elle vous isolait davantage et vous apprenait avec amertume ce qu'était l'injustice.

Il a neigé yesterday

En 1977, ma tante Janine m'a offert le 45 tours de Marie Laforet, Il a neigé sur Yesterday sans doute pour ma fête. J'adore toujours ce morceau même si l'orchestration date un peu. Cette artiste m'a toujours fasciné. Sans doute, son non-confirmisme et franc parler.
L'hiver à Prélenfrey, l'on passait nos mercredis après-midi à pratiquer le ski nordique à même le village et cela m'ennuyait profondément. J'avais froid et la réverbération du soleil sur la neige me faisait mal aux yeux malgré des lunettes adaptées. Le sport d'endurance m'a toujours déplu et pourtant je m'efforce de me balader en montagne dès la belle saison, certainement pour me donner bonne conscience mais aussi pour me sociabiliser en sortant avec des amis. Souvent quand les mêmes s'émerveillent devant un massif montagneux, je reste de marbre et m'extasie plutôt sur la marmotte ou le parterre de gentianes et pour sortir de mon ennui, je me chante des airs de Véronique Sanson.

Quand François est devenu président

Je me souviens du visage consterné de la Directrice et de la joie dissimulée des trois institutrices, ce lundi-là. C'était au lendemain de l'élection de la Présidentielle de 1981. Mitterrand venait de remporter la magistrature suprême. Dans son sillage, les radios libres, l'abolition de la peine de mort, la cinquième semaine de congés payés jusqu'au silence de l'existence de sa fille Mazarine, sur son état de santé, son passé trouble, même bref, sous Vichy et son amitié -étrange- avec Papon. Il y eut Giscard et l'affaire des bijoux, Pompidou et Le Général dans une France où la presse étaient muselée et aujourd'hui, le nouveau monarque de l'Élysée qui ne vaut guère mieux. A quand un président, digne de cette responsabilité, non opportuniste, tenant ses paroles et qui en augmentant son salaire, fasse idem pour le peuple dont il a la charge. A quand un président qui paye une partie de ses frais, qui doit rendre des comptes, un bilan chaque année et pouvant être révoquer par le parlement en cas de non engagements tenus. Je sais, une sorte de société utopique mais il est bon de rêver un peu.

Bulletins de notes

Chaque mois, nous recevions un bulletin de notes assez original dans sa conception. Il était sous forme de graphique parsemés de ronds de différentes couleurs selon la matière et reliés les uns les autres par discipline. Mon goût pour les statistiques, les hit-parades sont-ils peut-être nés à cette période-là ? J'ai commencé par un 8 sur 10 de moyenne générale en septembre 1979 (CM1) avec l'appréciation suivante : "bonne adaptation. Travail sérieux et appliqué" jusqu'à 8,94 sur 10 en mai 1980 ("Très bon travail. Christophe est toujours appliqué et sérieux pour le travail scolaire. Il mérite beaucoup d'encouragements.") Mes points forts : la lecture, j'adorais notamment, lire à haute voix les exploits de Delphine & Marinette des Contes du chat perché de Marcel Aymé (jamais en dessous de 9 de moyenne), la grammaire, la récitation, mais des faiblesses en logique (problèmes mathématiques) et en orthographe. En rédaction, cela variait de 6,5 à 9 et déjà mes problèmes de sociabilisation et d'humeur fluctuante étaient révélés sur le bulletin du mois de février 1980 : "Christophe doit faire des efforts pour avoir meilleur caractère en classe". A l'époque, je ne lisais qu'en classe ou ne regardais que les images des aventures de Tintin & Milou. Je crois que l'image et la musique l'ont toujours emporté sur les mots. En 1980, Little Jeannie et en 1981 Donner pour Donner d'Elton John & France Gall étaient diffusés sur les radios et inconsciemment; j'ai commencé à m'intéresser intensément à l'écoute de la musique pop. Avant ça, j'avais déjà des goûts musicaux d'adulte mais plutôt tournés vers la variété française : surtout Sheila dont j'adorais Kennedy Airport ou Spacer.

Remise de prix

J'avais redoublé mon CM1. Et au vu de mes notes médiocres sur Grenoble dues à mon alopécie à l'âge de neuf ans, qu'aucun spécialistes (dermatologues, magnétiseurs et j'en passe) n'ont su stoppé, ce jeu de massacre. La raison invoquée fut psychosomatique. Un adjectif que j'ai toujours trouvé un peu passe-partout et qui permet aux médecins de se dédouaner même si ma perte capillaire n'est pas d'origine organique. Il est vrai que mon beau-père commençait à picoler après son déclin professionnel et l'ambiance à la maison n'était pas des plus sereines. A chaque repas, j'attendais son arrivée avec une certaine angoisse et souvent quand il avait trop bu, les insultes fusaient sur maman et mes origines italiennes. Mon père avait refait sa vie depuis longtemps et avait tiré un trait sur mon existence. Seule maman gérait ma situation avec affection mais aussi avec un peu de possessivité. Ce drame nous a toujours liés et nous avons jamais pu nous détacher.
A la fin de l'année scolaire 1979-1980, venait la cérémonie des remises de prix et bien sûr dans ces moments-là, l'on reçoit souvent un cadeau utile, par exemple, un livre et cet ouvrage est souvent un classique. Le roman choisi par la directrice fut le plus célèbre livre d'Antoine de Saint-Saint-Exupéry en collection de poche. Je n'ai pas osé lui dire que j'avais la collection brochée illustrée d'aquarelles par l'auteur lui-même. Par lâcheté ou pour faire plaisir, j'ai reçu ce prix comme une sorte de baccalauréat avant l'heure. Je me suis senti un peu imposteur. Un rôle qui m'a longtemps collé à la peau. Plaire à tout prix, ne pas faire de vague, être sage, discret jusqu'à la colère qui monte et qui fait mal en moi et autour. A vouloir toujours sourire, l'on se détruit. "La vérité d'un homme, c'est d'abord ce qu'il cache" dixit André Malraux.

Romy 'n Me

Je fus profondément bouleversé lorsque maman m'appris que le fils de Romy s'était empalé en voulant escaladé la grille de la maison de l'ex-compagnon de Romy Schneider. A chaque apparition de Romy, comme aux soirées de cérémonie des César, j'attendais avec fébrilité le moment où l'acteur décachettait l'enveloppe et que sa partenaire d'un soir citaut la phrase magique «et la meilleur actrice de l'année 1976 (et 1979, elle a remporté le trophée à deux reprises) est...» . De ses soixante films, j'ai souvent en tête Max et les Ferrailleurs où elle joue Lili, la pute face à un Michel Piccoli flic véreux et manipulateur. D'autres images fortes comme dans L'important, c'est d'aimer est cette tragique réplique : "Non, je vous en prie pas de photos. Je suis comédienne. Je peux faire des choses bien, vous savez ! Ça, je le fais pour bouffer." Dans Une Histoire simple de Claude Sautet, son réalisateur fétiche (ils travaillerons ensemble sur cinq films) qui relate l'histoire banale d'une femme amoureuse de deux hommes qui finalement prendra la tangente en quittant les deux, et puis, son second rôle dans Garde à vue de Claude Miller où elle joue la femme de Michel Serrault, qu'on accuse à tort du meurtre et viol de deux fillettes et dont Romy-Chantal, lasse de sa relation amoureuse fera tout pour amener les enquêteurs vers de fausses pistes pour faire écrouer son mari. Elle finira par se suicider dans sa voiture en bas d'où se déroule l'interrogatoire musclé entre Lino Ventura et Serrrault.

Thermomètre

Le week-end-end approchait et la fièvre aussi. Je ratais la classe du vendredi pour rester dans mon lit de pensionnaire. Martine Peters venait de temps en temps s'enquérir de mon état de santé. Je sentais bien qu'il serait difficile de faire baisser la température en 48 heures. Pour ajouter à mon anxiété, la mono que je préférais le moins, était de garde ce week-end-là, et c'est d'ailleurs, cette personne qui me tendit le thermomètre le lendemain matin. Alea jacta est. Il fallait trouver une ruse et vite ! J'eus la présence d'esprit de m'introduire le thermomètre mais très vite de l'en ressortir pour truquer le "verdict". Je voulais à tout prix que maman vienne me chercher. Malgré tout, ces deux années scolaire furent agréables. Elles me permirent de m'endurcir un peu, de gagner en autonomie. En me remémorant ces passages, ils me sont plutôt doux à raconter. Il y avait aussi nos balades "intéressées", celles des friandises qu'on allait acheter à l'épicerie à quelques kilomètres en descendant du village où nous nous trouvions. Alors, faut-il faire de la publicité pour l'internat, revenir à l'uniforme, séparer les garçons, des filles, lire l'essai de Daniel Pennec "Chagrin d'école" (l'auteur possède une maison dans le Vercors provençal) ? A vous d'en juger. Pour ma part, il faut vivre avec son temps mais savoir aussi retenir "certaines" bonnes idées de "l'ancien temps" sans être trop nostalgique. J'aimais bien aussi, à l'insu du personnel et des élèves, entrer en douce dans l'une des classes quand tout était éteint, et fouiller dans les placards afin d'y trouver des trésors : vieux carnets de notes, manuels anciens et m'y plonger, ma madeleine de Proust car "longtemps je me suis couché de bonne heure"… de part le règlement intérieur.

(c) xophe13
MrsDreams
Envoyé le :  16/5/2011 17:58
Plume d'or
Inscrit le: 4/3/2011
De:
Envois: 1936
Re: J'AVAIS DIX ANS... mes années dans le Vercors
Une vie riche en émotions et pas très facile pour un petit garçon de 10 ans... Merci pour ce partage, j'ai aimé vous lire, on sent bien "une part" de votre personnalité (c'est mal dit mais je ne trouve pas les mots ;) )


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xophe13
Envoyé le :  16/5/2011 19:25
Plume d'or
Inscrit le: 25/6/2010
De:
Envois: 666
Re: J'AVAIS DIX ANS... mes années dans le Vercors (version revue et corrigée)
J'avais 10 ans... mes années d'internat dans le Vercors
Christophe David L.

Après un mauvais trimestre en CM1, je redoublai cette classe dans un internat à 1 000 mètres d'altitude dans le Vercors. Je découvris la vie en groupe, le partage d'une chambre à trois pensionnaires, le lait qu'on allait chercher directement à la ferme, le sport (aïkido, ski de fond, vélo, randonnées pédestres), les chaussons…en classe, mais aussi les goûters frugales, la langue-de-boeuf au déjeuner… et la séparation d'avec maman.

Edith le dimanche soir
Les week-ends débutaient le samedi en fin de matinée et se terminaient l'après-midi vers les 18 heures où il fallait, après l'Ecole des Fans se préparer pour une semaine de pensionnat. Même si le lieu était magnifique, sorte de bulle protectrice, loin du chaos de la vallée, je le vivais très mal. Cette séparation d'avec maman était douloureuse. Ensemble, j'avais l'impression que l'on pouvait se protéger mutuellement. D'ailleurs à l'époque, j'avais certains rituels pour éloigner le mauvais sort en touchant l'un des barreaux en bois de mon lit d'enfant.
Puis, nous traversions Grenoble, puis les communes de Pont de Claix, Le Gua et cette route sinueuse et parfois verglaçante en hiver qui nous menait à Prélenfrey dans le Vercors. Arrivé, il faisait nuit. Je ne me souviens que des mois d'hiver, bizarrement. Et maman, qui repartait, seule, sous le mauvais temps ou dans la nuit la plus noire. Moi, derrière les larges fenêtres de la salle à manger, je retenais mes larmes.
Lors de cette heure de trajet, il y avait des K7 dans la boîte à gants de la voiture de manan, notamment une compilation d'Édith Piaf que j'ai passée en boucle. Mes chansons favorites allaient aux airs les plus mélancoliques, Milord (écrite par Georges Moustaki) ou Mon Dieu, écrite après la disparition de Marcel Cerdan, grand amour de Piaf. Plus tard, j'ai retrouvé le morceau sur cd en version anglaise. L'émotion était intacte. Je n'ai pourtant pas apprécié le film tant acclamé et interprétée par Marion Cotillard qui je trouve, surjoue. Dans le genre biopic, je préfère la performance, ô combien, juste et génialissime de Sylvie Testud dans le rôle de la romancière Françoise Sagan dont j'ai apprécié certains ouvrages dont le dernier Derrière l'épaule (où l'auteur après avoir relu toute son œuvre romanesque en fait une critique des plus objectives) ou Un chagrin de passage qui raconte l'histoire d'un homme apprenant qu'il a un cancer incurable et qui va se rapprocher des femmes de sa vie jusqu'au "passage" de l'erreur de diagnostic.


Martine d'Albion
Mon institutrice s'appelait Martine Peters. Elle avait un charme fou qui ne laissait pas insensible la gent masculine dont le prof d'aïkido qui était marié à l'une d'entre elles (elles étaient trois). D'ailleurs, ils n'arrêtaient pas de se taquiner gentiment lors des récrés. Elle était grande et avait de légères rondeurs qui lui allaient bien. Martine m'avait même envoyé une carte postale du Kent avec ses mots inscrits au dos : "bonjour Christophe, je suis tout là-haut dans le Nord, pourtant il fait un temps radieux depuis mon arrivée ici. Je souhaite que de ton côté, les vacances bien méritées se passent agréablement. A bientôt, je t'embrasse." J'ai trouvé que la paroisse de Westerham représentée sur cette carte, assez austère, était aux antipodes de son caractère solaire mais ce fut une grande joie de la recevoir avec notamment ce timbre de 10 pences où figure comme à l'accoutumée Sa Très Gracieuse Majesté. J'ai aussi conservé une photo de Martine remettant des cadeaux lors de la fête de fin d'année, tout près du sapin, décoré chichement lors de travaux manuels. J'aimerais bien vous revoir Martine. Where do u live now?

La récré
La récré, c'est l'attente des lettres que m'envoyaient maman, mon beau-père et parfois cousins, tante et marraine. Maman m'écrivait le lundi pour que je reçoive le lendemain sa lettre ; celle de mon beau-père (souvent une carte poste de Grenoble et sa région) était reçue en fin de semaine. Ce moment était précieux et la jalousie fréquente car nous étions qu'un petit nombre à réceptionner ces plis. Avais-je à cette à l'esprit d'être privilégié ? J'ai longtemps été un enfant roi qui pour Noël recevait une dizaine de cadeaux plus beaux et impressionnants les uns les autres autour d'un sapin sublimement décoré avec sa crèche immense décorée de santons. J'ai été, en effet, très privilégié durant mes premières années. Peut-être ai-je dû payer tout ça ainsi que mon égoïsme de jadis via ma santé fragile et les vaches maigres qui suivirent lors du changement de situation de mon beau-père qui perdit son statut de patron pour devenir simple chômeur... Durant quinze longues années, j'ai vu maman et mon beau-père se contenter de sardine à l'huile, le soir, pour dîner et compter jusqu'au centime près, pour finir la semaine. A cette période, mon beau-père buvait plus que de raison. Maman devait cacher les bouteilles de vin jusqu'aux alcools de la pharmacie mais quand on souffre d'alcoolisme, s'il faut passer des heures, on les passe à trouver la planque et à boire en cachette pour soulager sa peine. M. est mort au début des années 1990 d'un cancer de la gorge (il fumait aussi beaucoup). Paix en son âme même si je n'ai jamais été proche de lui à cause de son manque de virilité qui me gênait un peu. Cependant, M. était le cerveau de la famille recomposée. On pouvait tout lui demander, il avait une connaissance encyclopédique. Insomniaque, il pouvait lire un livre par nuit notamment des essais historiques ou des polars.

Le passe-plat
Je me souviens, avec mes camarades, attendre que la cuisinière principale dépose sur le buffet du réfectoire, les biscuits fourrés à la vanille (trois par sachet). Et hop, dès qu'elle eut tourné le dos, nous en mettions dans nos poches sans toutefois éveiller les soupçons.
Le pire était le jour de la langue de boeuf. Plus tard, on a eu beau me dire que bien préparé, ce plat pouvait être succulent, je n'ai jamais pu en goûter à nouveau. Le jour de cette langue-là, le ou la monitrice qui encadrait l'une des trois tables (la quatrième était séparée d'un rideau opaque et réservée aux institutrices) devaient batailler pour nous obliger à terminer nos assiettes. Beaucoup redoutait ce moment. Les meilleurs menus étaient réservés pour les veilles de congés comme pour Noël ou l'on nous préparait notamment des endives au jambon (devenues un de mes plats préférés). Comme tous les gamins, ce sont les pâtes qui faisaient l'unanimité à contrario du poisson ou de la salade qui de temps en temps cachait une petite limace dans son univers de chlorophylle.
A chaque repas, l'un des internes de chaque table était de corvée de service et devais apporter les plats via le passe du même nom qui séparait la cuisine du "mess" des enfants du CP au CM2.

Les mercredis sans TV
Le mercredi, c'était le jour des loisirs comme le ski de fond en hiver ou la montée "en danseuse" jusqu'au Col de l'Arzelier, l'été : des jeux de pistes qui d'un indice nous menait à la cachette suivante et ainsi de suite jusqu'au lieu de rendez-vous où souvent nous goûtions. Le mercredi, c'était aussi l'après-midi où la directrice était la plus généreuse en puisant davantage dans les réserves de confiseries qu'apportaient nos parents pour la "communauté". Le chocolat noir était souvent remplacé par du "au lait" et le pain un peu sec de la veille remplacé par du frais. J'en parle un peu à la Zola mais c'était notre réalité. Un des mono nous apprenait même l'aïkido dont il était ceinture noire. Il était "à la colle" avec l'institutrice des petites classes. Ils vivaient sur place à quelques mètres de notre pensionnat. Il avait un gros chien qui m'impressionnait et qui aboyait souvent. Aussi, dans leur chambre, la fenêtre était bloquée car entre le volet et la vitre, des guêpes avaient investies les lieux pour en faire leur nid.
En fin d'après-midi, la directrice -assez old school- nous autorisait une fois de temps en temps à regarder un programme TV pour la jeunesse, à l'époque Capitaine Flam (...tu n'es pas de notre galaxie / mais du fond de la nuit, Capitaine Flam / d'aussi loin que l'infini, tu descends jusqu'ici / pour sauver tous les hommes...). La musique du générique de cette série d'animation japonaise a été signée par Jean-Jacques Debout ce que je su bien plus tard. Il y avait un calme quasi religieux lors de ce programme que nous attendions impatiemment et il était hors de question d'en rater une seule image.

Opération "Bonbons"
Pour un souci de partage, comme il était écrit dans le règlement intérieur, toute confiserie était mise en commun. Nous trouvions que celles-ci étaient davantage distribuées pour le personnel et moins à ceux qui les avaient apportées. La planque était à l'infirmerie dans une boîte en fer blanc remplie à ras-bord. Un soir, après que la mono de garde est fait le tour des chambres pour vérifier que nous ayons bien respecté le "couvre-feu" des
21 H 30 et ayons bien brossé nos dents, alors nous vint une idée diabolique. Les cornes et le trident ainsi que l'air de La Salsa du Démon nous ayant habité, nous commençâmes à descendre les escaliers, le commando était formé de trois garçons de chambrée. A tâtons, nous marchions jusqu'à la caverne d'Ali Baba. Nous avions pas besoin du sésame ou d'un passe, seulement la motivation d'aller jusqu'au bout de notre envie. Il faisait noir, il y avait quelques craquements dans cette grande maison de trois étages, immense chalet que l'on remarquait de loin en arrivant à Prélenfrey, situé au sortir du village. L'infirmerie était accolée au bureau de la directrice qui servait aussi aux entretiens avec l'orthophoniste et les psychologues. Je n'aimais pas qu'en plein milieu de la classe, l'une d'entre elle (pour moi, la psy.) vienne interrompre mon activité scolaire pour me faire travailler avec des cubes ou m'allonger sur le tapis de sol pour une séance de relaxation. Je n'en voyais pas l'utilité. Il me tardait de remonter et de rattraper le retard de ma leçon laissée en plan.
Arrivé en bas de l'escalier, nous avions plus qu'à nous rendre à la deuxième porte sur notre gauche, la première étant la blanchisserie. Et hop, monter sur un tabouret et prendre à pleine main, un peu du trésor de douceur qui nous tendait les mains et surtout nous narguait depuis tant de temps. Nous étions comme des toxicos en manque. Et nous remontions les marches jusqu'à notre chambre du premier et sous les draps, nous nous gavions de sucreries, tout en rigolant "comme des bossus" jusqu'à réveiller la mono qui survint dans notre chambre, éclairant la pièce mais ne découvrant pas notre larcin. Seulement, une « descente » ne nous suffisait pas. Il a fallu une seconde tentation. Et cette fois, j'ai eu juste le temps de me cacher aux toilettes de mon niveau, tandis que mes deux compagnons d'infortunes furent pris en remontant les escaliers et… punis. J'attendais que tout revienne silencieux pour regagner ma chambre comme si de rien n'était.

Privé de veillée
S'il y avait bien un événement que l'on ne ratait pour rien au monde, c'était bien une veillée d'anniversaire pour égayer les soirées sans TV, sans famille...
C'était un mercredi après-midi, je revenais du ski de fond. Mes copains et moi-même rendions la matériel de ski et nous nous changions pour regagner notre pensionnat. La monitrice-accompagnatrice était la femme du maire de Trucmuche-les-Oies (ex. prof de philo.) et très dirigiste. En un mot, une personne avec qui on n'envisage pas de faire la fête ou nous remonter le moral. Je crois qu'elle m'avait pris un peu "en grippe". En général, je sentais que les femmes du pensionnat, exceptée la blanchisseuse (qui désirait s'élever socialement), étaient jalouses de maman, qui avait "la mauvaise idée" d'être bourgeoise.
Cela étant dit, cet ex-prof de philo reconvertie en monitrice a cru lorsque je me grattais à travers mon bonnet, que je lui faisait le signe "t'es folle, toi !". Comme une furie, elle vint vers moi et me priva de veillée du soir. Après le dîner, je dus aller me coucher sans dessert. A l'époque, cette punition me marqua car le soir, elle vous isolait davantage et vous apprenait avec amertume ce qu'était l'injustice.

Il a neigé yesterday
En 1977, ma tante Janine m'a offert le 45 tours de Marie Laforet, Il a neigé sur Yesterday sans doute pour ma fête. J'adore toujours ce morceau même si l'orchestration date un peu. Cette artiste m'a toujours fasciné. Sans doute, son non-confirmisme et franc parler.
L'hiver à Prélenfrey, l'on passait nos mercredis après-midi à pratiquer le ski nordique à même le village et cela m'ennuyait profondément. J'avais froid et la réverbération du soleil sur la neige me faisait mal aux yeux malgré des lunettes adaptées. Le sport d'endurance m'a toujours déplu et pourtant je m'efforce de me balader en montagne dès la belle saison, certainement pour me donner bonne conscience mais aussi pour me sociabiliser en sortant avec des amis. Souvent quand les mêmes s'émerveillent devant un massif montagneux, je reste de marbre et m'extasie plutôt sur la marmotte ou le parterre de gentianes et pour sortir de mon ennui, je me chante des airs de Véronique Sanson.

Bulletins de notes
Chaque mois, nous recevions un bulletin de notes assez original dans sa conception. Il était sous forme de graphique parsemés de ronds dessinés au feutre de différentes couleurs selon la matière et reliés les uns les autres par des flèches comme un graphique. Mon goût pour les statistiques, les hit-parades sont-ils peut-être nés à cette période-là ? J'ai commencé par un 8 sur 10 de moyenne générale en septembre 1979 (CM1) avec l'appréciation suivante : "bonne adaptation. Travail sérieux et appliqué" jusqu'à 8,94 sur 10 en mai 1980 ("Très bon travail. Christophe est toujours appliqué et sérieux pour le travail scolaire. Il mérite beaucoup d'encouragements.") Mes points forts : la lecture, j'adorais notamment, lire à haute voix les exploits de Delphine & Marinette des Contes du chat perché de Marcel Aymé (jamais en dessous de 9 de moyenne), la grammaire, la récitation, mais des faiblesses en logique (problèmes mathématiques) et en orthographe. En rédaction, cela variait de 6,5 à 9 et déjà mes problèmes de sociabilisation et d'humeur fluctuante étaient révélés sur le bulletin du mois de février 1980 : "Christophe doit faire des efforts pour avoir meilleur caractère en classe". A l'époque, je ne lisais qu'en classe ou ne regardais que les images des aventures de Tintin & Milou. Je crois que l'image et la musique l'ont toujours emporté sur les mots. En 1980, Little Jeannie et en 1981 Donner pour Donner d'Elton John & France Gall étaient diffusés sur les radios et inconsciemment, j'ai commencé à m'intéresser intensément à l'écoute de la musique pop. Avant ça, j'avais déjà des goûts musicaux d'adulte mais plutôt tournés vers la variété française : surtout Sheila dont j'adorais Kennedy Airport.

Remise de prix
J'avais redoublé mon CM1. Et au vu de mes notes médiocres sur Grenoble dues à mon alopécie à l'âge de neuf ans, qu'aucun spécialistes (dermatologues, magnétiseurs et j'en passe) n'ont su stoppé, ce jeu de massacre. La raison invoquée fut psychosomatique. Un adjectif que j'ai toujours trouvé un peu passe-partout et qui permet aux médecins de se dédouaner même si ma perte capillaire n'est pas d'origine organique. Il est vrai que mon beau-père commençait à picoler après son déclin professionnel et l'ambiance à la maison n'était pas des plus sereines. A chaque repas, j'attendais son arrivée avec une certaine angoisse et souvent quand il avait trop bu, les insultes fusaient sur maman et mes origines italiennes. Mon père avait refait sa vie depuis longtemps et avait tiré un trait sur mon existence. Seule maman gérait ma situation avec affection mais aussi avec un peu de possessivité. Ce drame nous a toujours liés et nous avons jamais pu vraiment nous détacher.
A la fin de l'année scolaire 1979-1980, venait la cérémonie des remises de prix et bien sûr dans ces moments-là, on reçoit souvent un cadeau utile, par exemple, un livre. Cet ouvrage est souvent un classique. Le roman choisi par la directrice fut le plus célèbre livre d'Antoine de Saint-Exupéry en collection de poche. Je n'ai pas osé lui dire que j'avais la collection brochée illustrée d'aquarelles par l'auteur lui-même. Par lâcheté ou pour faire plaisir, j'ai reçu ce prix comme une sorte de baccalauréat avant l'heure. Je me suis senti un peu imposteur. Un rôle qui m'a longtemps collé à la peau. Plaire à tout prix, ne pas faire de vague, être sage, discret jusqu'à la colère qui monte et qui fait mal en moi et autour. A vouloir toujours sourire, on se détruit. "La vérité d'un homme, c'est d'abord ce qu'il cache" dixit André Malraux.

Romy 'n Me
Je fus profondément bouleversé lorsque maman m'appris que le fils de Romy s'était empalé en voulant escaladé la grille de la maison de l'ex-compagnon de Romy Schneider. A chaque apparition de Romy, comme aux soirées de cérémonie des César, j'attendais avec fébrilité le moment où l'on décachettait l'enveloppe en espérant qu'elle apparaisse sur scène. De ses soixante films, j'ai souvent en tête Max et les Ferrailleurs où elle joue Lili, la pute face à un Michel Piccoli flic véreux et manipulateur. D'autres images fortes comme dans L'important, c'est d'aimer et cette tragique réplique : "Non, je vous en prie pas de photos. Je suis comédienne. Je peux faire des choses bien, vous savez ! Ça, je le fais pour bouffer." Dans Une Histoire simple de Claude Sautet, son réalisateur fétiche (ils travaillerons ensemble sur cinq films) qui relate l'histoire banale d'une femme amoureuse de deux hommes qui finalement prendra la tangente en quittant les deux, et puis, son second rôle dans Garde à vue de Claude Miller où elle joue la femme de Michel Serrault, lasse de sa relation amoureuse, elle fera tout pour amener les enquêteurs vers de fausses pistes pour faire écrouer son mari. Elle finira par se suicider dans sa voiture en bas d'où se déroule l'interrogatoire musclé entre Lino Ventura et Serrault.

Thermomètre
Le week-end approchait et la fièvre aussi. Je ratais la classe du vendredi pour rester dans mon lit de pensionnaire. Martine Peters venait de temps en temps s'enquérir de mon état de santé. Je sentais bien qu'il serait difficile de faire baisser la température en 48 heures. Pour ajouter à mon anxiété, la monitrice que je préférais le moins, était de garde ce weekend-là, et c'est d'ailleurs, cette personne qui me tendit le thermomètre le lendemain matin. Alea jacta est. Il fallait trouver une ruse et vite. J'eus la présence d'esprit de m'introduire le thermomètre mais très vite de l'en ressortir pour truquer le "verdict". Je voulais à tout prix que maman vienne me chercher. Malgré tout, ces deux années scolaire furent agréables. Elles me permirent de m'endurcir un peu, de gagner en autonomie. En me remémorant ces passages, ils me sont plutôt doux à raconter. Il y avait aussi nos balades "intéressées", celles des friandises qu'on allait acheter à l'épicerie à quelques kilomètres en descendant du village où nous nous trouvions. J'aimais bien aussi, à l'insu du personnel et des élèves, entrer en douce dans l'une des classes quand tout était éteint, et fouiller dans les placards afin d'y trouver des trésors : vieux carnets de notes, manuels anciens...Alors, faut-il faire de la publicité pour l'internat, revenir à l'uniforme, séparer les garçons, des filles, lire l'essai de Daniel Pennac "Chagrin d'école" (l'auteur possède une maison dans le Vercors provençal) ? A vous d'en juger...
Honore
Envoyé le :  17/5/2011 9:56
Modérateur
Inscrit le: 16/10/2006
De: Perpignan
Envois: 39531
Re: J'AVAIS DIX ANS... mes années dans le Vercors
j'ai apprécié ce récit d'une tranche de vie dont le récit nous prouve qu'elle est particulièrement inoubliable;
HONORE
Mana56
Envoyé le :  28/12/2011 22:39
Plume d'argent
Inscrit le: 17/12/2011
De:
Envois: 328
Re: J'AVAIS DIX ANS... mes années dans le Vercors


J'ai lu ce récit avec beaucoup d'émotion et d'attention... et un pincement au coeur pour ce petit garçon loin de sa maman ...10 ans ce n'est pas vieux et je me dis toujours que les années perdu avec la famille, les enfants ou amis....là c'est votre mère, votre seul repère et votre vie d'enfant a dû être trés difficile.
peut-être que que l'internat vous a fait grandir plus vite ...pour votre maman aussi cela été un déchirement ....je suis tellement" maman poule" que je n'imagine pas les enfants loin de la maison... enfin à cet instant les filles sont grandes ...mais étant petites je devais les laisser en nourrice pour la journée car j'ai toujours travaillée...et bien j'étais mal au moins pendant six longs mois ...jusqu'à ce que je m'apperçois qu'elles allaient trés bien de ce mode de vie ....mais j'ai toujours culpabilisé ...pas facile la vie !! ni pour les enfants ...ni pour les parents !
Merci xophe de ce partage oh combien précieux
douce soirée à vous a bientôt sur vos pages


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Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé."

Alphonse de Lamartine, Méditations.

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