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     Les adieux de grand-père
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Expéditeur Conversation
edson10
Envoyé le :  24/1/2012 8:45
Plume de soie
Inscrit le: 14/7/2011
De: droit devant
Envois: 143
Les adieux de grand-père
«Un vieux qui meurt en Afrique est une bibliothèque qui brûle.»

Cette pensée a toujours été pour moi qui suis jeune, l’objet d’une motivation personnelle, d’une émotion continuelle, voire même perpétuelle. Elle constitue une endigue dans les rapports qui me lient à tous ceux qui, de près ou de loin, me précèdent.
A la question qui m’avait été posée, à savoir que:
« Si Dieu venait à te demander un jour de formuler un vœux qui te tient particulièrement à cœur, et qu’il affirme pouvoir exaucer, que trouveras-tu à lui dire?»
Je me souviens avoir répondu:
«Heu… Je n’aurai pas de vœux à formuler. Je lui dirai simplement merci de m’avoir permis de trouver, à ma naissance, certains de mes ancêtres encore en vie.»

En cette journée de juin mil neuf cent cinquante-sept, grand-père dit définitivement adieu à tous ceux qui l’ont connu, ou approché. Il s’en va rejoindre ses ancêtres partis là-bas… Longtemps avant lui, quelque part dans l’univers près des étoiles.
Avec ce voyage sans retour, je ne l’ai jamais vu, je ne le verrai plus jamais. Mais quelque chose me dit que je saurai le reconnaître, tellement il a laissé des copies authentiques, notamment mes pères, donc l’oncle Baro!
Soit! Ce n’est pas ce qui m’intéresse, moi qui suis né quatorze années après son départ. Ce qui m’intéresse le plus et qui est prodigieux, c’est d’essayer de comprendre ce grand-père, le côtoyer dans sa vision muette des choses.
Quelle chance! D’avoir encore à mes côtés certains ascendants… Un oncle qui, on aurait dit lui-même. Rien à base de cela n’est apparemment à tenter.
«Fils! Aime me dire l’oncle Baro, c’était le jour de mon examen de Certificat d’Etudes Primaires et Élémentaires, j’avais dix-neuf ans, j’étais toujours au chevet de papa qui restait très souffrant, je m’en souviens à la virgule près.»

-Père je pense que je ne devrais pas aller à mon examen en t’abandonnant dans ton état là…

-Oh mon fils! C’est bien gentil de tenir compte de mon état de santé, de songer à ton père avant toute autre considération, mais tu dois te présenter à ton examen, ce sera important pour toi demain et dans ton proche avenir.
Va maintenant, tu risques d’être en retard.

-Mais papa…

-N’aie crainte mon fils. Bon courage. Je sais que tu réussiras. N’as-tu pas confiance en ton père? Va je te dis, d’ailleurs je ne partirai pas sans t’avoir dit au revoir.

Je partis en marchant sans vraiment marcher, sans même m’imaginer que j’allais faire un examen, que j’allais à la conquête d’une forme de lumière. Tout était flou dans mon esprit. C’est avec grande peine, avec un esprit torturé que je dus faire face aux différentes questions qui m’étaient posées.

* * * * * *

L’examen terminé et sans toutefois prêter oreille aux spéculations des candidats caractérisant chaque fois la fin d’une quelconque épreuve, je me résolus de rentrer retrouver papa dans sa chambre de malade. Ce retour me tourmentait! En fait ce qui me tourmentait le plus, c’étaient les termes employés par papa au moment où je prenais congé de lui: «Je ne partirai pas sans t’avoir dit au revoir…». Tout allait se jouer dans cette phrase sibylline, même mon destin peut-être.
J’aurais bien voulu que maman soit là, mais douze kilomètres séparaient notre village de EVORD DOULA où nous nous trouvions, en plus rien ne prévoyait un départ précoce de papa avant l’arrivée de maman et des autres à l’hôpital. Mais de que départ au juste voulait parler papa au moment de notre séparation? J’arrivai enfin et j’ouvris la porte, il était encore là.

-Ah! Déjà de retour, vous avez fini? M’accueillit papa.

-Oui père.

Dis-je en dissimulant mon angoisse.

-Tu as très bien écrit, j’espère! Écrit ou fait ce qu’il fallait et comme il fallait?

-J’ai écrit c’est tout! Mais…

-Ne me dis surtout pas que tu ne réussiras pas!

-Non, il ne s’agit pas de cela, loin de là…

-Il s’agit donc de quoi? Dis-le moi mon fils!

Les larmes me vinrent aux yeux avec une chaleur indicible

- Il…il s’agit de…de toi!…de ton état de santé, qu…quand je par…partais le matin, tu as dit…dit que tu ne partirai pas sans m’avoir dit…dit au revoir…voir.
Il devint sérieux tout à coup

- Je comprends, ce n’est pas une raison pour que tu pleures. Tu me fais mal en pleurant comme tu es en train de le faire et en plus, tu devais chasser de ton esprit ces idées afin d’être entièrement dans le bain de l’examen. Soit, il se fait tard! A présent couche-toi là derrière-moi, nous allons faire une mise au point avant les premières lueurs du soleil.
Quelques instant après m’être couché derrière lui, j’explosai

- Papaaaaaa ! J’ai peur ! J’ai peur !

-Couche-toi là et boucle moi ça!
Je continuai de pleurer. Les larmes et les sanglots prirent possession de moi. Je me couchai derrière lui, j’avais toujours si peur. Qu’allait-il advenir ? Je guettais ses moindres gestes, je retournais sans cesse dans mon esprit les paroles sibyllines de la matinée «Je ne partirai pas sans t’avoir dit au revoir».

Je ne voyais rien en perspective. Papa allait mieux, son état ne permettait pas d’entrevoir un départ précoce, l’autre départ… Que je chassais désespérément de mon esprit.
Le silence était pesant, le noir s’épaississait considérablement dans la chambre, j’étouffais! J’étouffais sans trouver une explication à cela. Toutes les idées bizarres défilaient dans ma tête, une tête si c’en était encore une, une qui était au-dessus de mes épaules sans l’être vraiment. Je puis l’affirmer à toi surtout mon petit, que je ne la sentais plus du tout!
Ce fut un cri déchirant de papa qui me tira de mes sombres pensées. Il était vingt trois heures, je le supposais.

-Aaaaaah…!

-Papa!…papa!…C’est quoi, qu’est-ce qui t’arrive?

-Fils, fils…Je ne dois plus rien te cacher, je pense que maintenant mon heure est proche, je le sens! Prends vite du papier et un stylo, tu dois écrire tout ce que je vais te dire, et ceci intégralement.

-Mais papa… Je ne te comprends plus! Qu’est-ce qu’il y a ? Pourquoi cette agitation ? Ce changement subit?

-Vite je te dis! Ce n’est plus qu’une question de minutes à présent.

Je pris donc une feuille et un stylo comme demandé. Je m’assis à même le sol, nonobstant l’épais noir de notre chambre, que voulais-tu je devais écrire sur une feuille blanche!

-Papa! J’ai le papier et le stylo que tu as demandé.

-Le papier est-il blanc?

-Oui, papa.

-C’est bien, alors écoute bien.
Note ceci: ton père est l’aîné d’une famille dont les origines proches sont connues, mais dont les origines fondamentales restent méconnues. Nous avions émigrés vers là où nous sommes installés aujourd’hui. Je suis la troisième génération de ces pionniers.

-Papa, est-ce que cela voudrait dire que moi je suis l’aîné de la quatrième génération, puisque je suis ton premier fils vivant…?

-C’est exact de ta part, mais tâche de ne plus m’interrompre dans mon récit. J’ai eu une seule richesse dans ma vie: les hommes! Certains de ces hommes m’ont apprécié, aimé, respecté, ils avaient placé en moi leurs espoirs. D’autres par contre, m’en voulaient terriblement, j’ai voulu les amener tous à moi, j’ai commencé mais pas terminé…L’Homme se sent bien là où il est à l’aise, lorsqu’il ne l’est plus il voyage… Fils, tu l’as déduit toi-même il y a un moment que tu es la quatrième génération après celle des pionniers, c'est bien ! Notre famille a quitté autrefois une forêt dense pour une forêt moins dense. J’ai contribué à la rendre moins dense, le plus possible. Je compte sur toi pour mener notre famille au seuil de la savane, je veux dire aux limites de l’écrasante forêt. Je n’ai pas une richesse considérable spéciale à te léguer pour cette mission. Tu es encore trop jeune, j’en suis conscient; Prends cette machette et cette lime, elles te seront d’une grande utilité…Adieu mon fils! Ha…

-Papa! Papa… Je commençais à comprendre.

Mon enfant (s’adressant à moi), à dix-neuf ans c’était un coup très dur, non pour ce qui m’attendait, mais pour ce que je venais de vivre! Je suis alors sorti porter la nouvelle du départ précipité de papa aux différents concernés.
C’est avec beaucoup de peine que je dus l’annoncer à maman. Une bataille nouvelle venait de commencer pour moi.
Les funérailles eurent lieu cinq jours plus tard, un samedi, dans son village natal, le nôtre, au milieu de la forêt. Je fus partout aux quatre coins de notre circonscription porter la nouvelle aux autorités administratives de l’époque, des blancs. Ton grand-père était chef de village. Quelles histoires tu as avec les chefs! Ton grand-père maternel l’était aussi. Sur sa tombe tu peux lire ceci: SOUVENIR DE DAMIEN N.


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EDSON

Honore
Envoyé le :  26/4/2012 10:34
Modérateur
Inscrit le: 16/10/2006
De: Perpignan
Envois: 39531
Re: Les adieux de grand-père
Un touchant récit écrit avec le cœur ce que j'ai particulièrement apprécié.
HONORE
edson10
Envoyé le :  28/4/2012 9:57
Plume de soie
Inscrit le: 14/7/2011
De: droit devant
Envois: 143
Re: Les adieux de grand-père
vraiment très sincère de ta part!!!!!!!!!


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EDSON

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