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Expéditeur Conversation
benbouille
Envoyé le :  2/4/2010 19:24
Plume de satin
Inscrit le: 13/8/2009
De:
Envois: 24
Immersion
« L’objet gisait au milieu du sentier, parfaitement insolite dans ce cadre bucolique. Avait-il été perdu par un quelconque voyageur ? Avait-il été sciemment déposé à cet endroit dans le but de perturber la paisible vie des habitants du village, d’ordinaire si tranquille ? Nul ne semblait s’en soucier. Les roues des chariots des marchands et des diligences manquaient de l’écraser à chaque passage, le frôlant parfois de quelques centimètres à peine, sans même que ceux-ci s’en aperçoivent. Quelques chiens essayèrent bien de le renifler, mais ils s’en détournèrent rapidement, l’objet ne présentant aucun intérêt à leurs yeux. Ce n’est que quelques mois plus tard, à l’automne, qu’il fut découvert par hasard.

Juliette, une magnifique jeune fille de treize ans, suppliait sa mère depuis plusieurs jours de l’emmener dans le bois qui bordait le village afin de lui enseigner tout ce qu’elle avait à apprendre sur la cueillette des champignons. Elle voulait devenir une cuisinière hors pair. Son plus grand rêve était de se faire embaucher au château. Sa longue chevelure noire et son visage angélique lui avaient déjà valu les faveurs du prince héritier, et elle pensait pouvoir atteindre son objectif sans trop de difficultés. Mais pour cela, il lui fallait créer une recette originale et succulente, dont toute la cour raffolerait. Cassandre, sa mère, avait presque fini par accepter de l’accompagner, mais s’y était résignée lorsque la pluie avait fait son apparition. Juliette était donc finalement partie seule. Elle aimait s’inventer des histoires, comme toutes les jeunes filles de son âge. Mais contrairement aux autres filles de son âge, elle ne jouait pas le rôle de la princesse, mais plutôt celui de l’aventurière. Elle avait donc baptisé sa cueillette de l’après-midi, « l’aventure mycologique ». Son panier sous le bras, l’aventure pouvait commencer.

Après avoir passé une demi-heure à sautiller et à chanter pour se rendre dans le bois, Juliette arriva enfin à destination. Les genoux déjà écorchés, elle entreprit de commencer à collecter les ingrédients de sa fameuse recette. « Attention, déclara-t-elle à haute voix, s’adressant semble-t-il à un chêne centenaire, certains de ces champignons sont dangereux ! Je suis une cuisinière aventurière, pas une sorcière. Donc aujourd’hui, pas de champignons magiques pour faire des potions. Il faut aussi prendre garde à ces drôles de champignons rouges à pois blancs, ils provoquent des hallucinations ». Son panier bien rempli, Juliette décida de retourner vers le village et de commencer à concocter un bon petit plat pour ses parents. Elle commença à remonter le sentier en sautillant, comme elle était venue. Au bout de quelques mètres à peine, son pied heurta un gros caillou qui la fit trébucher. Juliette s’étala sur le sol, ramassant par la même occasion quelques kilos de poussière sur sa robe blanche, et en avalant autant. Surprise, vexée, elle se releva en toussant, regardant discrètement autour d’elle si personne n’avait été témoin de son vol plané spectaculaire. Heureusement, elle était seule sur le sentier. Elle fut alors prise d’une subite envie de pleurer. Pas de douleur, mais de colère. Elle s’en voulait terriblement d’être à tel point distraite et maladroite. Une aventurière contrôle ses mouvements, et l’environnement qui l’entoure, se dit-elle. Elle ne peut pas se permettre de se retrouver dans ce genre de situation. Ceci dit, une aventurière, ça ne pleure pas non plus. Juliette retint donc ses larmes et refoula sa colère. Alors qu’elle allait se remettre en route, son regard fut attiré par un éclat brillant au sol. « Ma petite Juliette, se dit-elle, ce n’est pas un caillou sur lequel tu as trébuché ! Voilà qui est bien étrange, une nouvelle aventure peut maintenant commencer ! » Elle s’accroupit à proximité de l’objet, à moitié enterré par le vent qui inexorablement avait soufflé pendant des mois pour tenter de le cacher, mais qui visiblement, avait échoué.

« Curieux… », s’exclama Juliette en extirpant l’objet de sa prison de terre. En effet, le terme ne pouvait être mieux choisi. Elle n’avait jamais rien aperçu de semblable. Elle décida de le déposer dans son panier, et de l’apporter à son père, le forgeron du village, qui aurait certainement une bonne explication à lui fournir. De retour au village, Juliette se rendit d’abord chez elle afin d’y déposer sa précieuse collecte de champignons, puis fila retrouver son père, qui tenait une petite boutique sur la place centrale. Celui-ci ne comprit pas immédiatement ce que sa fille lui voulait, tant elle était excitée par sa trouvaille et essoufflée par la distance qu’elle venait de parcourir à toute allure. Elle s’assit donc un instant pour reprendre le contrôle de ses émotions, puis elle présenta l’objet à son père. « Je l’ai trouvé sur le sentier menant au petit bois, lui expliqua-t-elle. Il devait y être depuis longtemps, il était presque complètement enterré. Juliette regarda son père, pleine d’espoir, avant de lui demander… Tu sais ce que c’est toi papa ? » Ses grands yeux noirs interrogateurs fixaient le visage du forgeron qui retournait l’objet dans tous les sens, tantôt cherchant à y apercevoir une inscription, tantôt le cognant du bout des doigts pour en entendre le son. Elle ne pouvait se résoudre à quitter la boutique sans réponse. « Je n’en ai pas la moindre idée, répondit-il. Mais cela me rappelle une histoire que m’a contée ma mère, lorsque j’avais à peu près ton âge… Mon père et elle avaient voyagé en Afrique du Nord, bien avant ma naissance, et ils avaient fait là-bas la connaissance d’un vieux mage qui prétendait détenir des objets magiques qui permettaient à leurs propriétaires d’obtenir tout ce qu’ils désiraient. Ils m’ont parlé d’une lampe à huile, semblable à toute autre, qui faisait apparaître un Djinn lorsqu’on la frottait. Le Djinn exauçait les souhaits du possesseur de la lampe, mais aux dépens des autres villageois. La folie des grandeurs de quelques égoïstes a causé bien des catastrophes, et tous les objets magiques ont été bannis de la cité et enterrés dans le désert. » Juliette, dubitative, entreprit de frotter l’objet de toutes ses forces, mais rien ne se passa. « Cela ne ressemble absolument pas à une lampe à huile, rétorqua-t-elle. Tu me racontes des histoires à dormir debout, je ne suis plus une enfant ! » Elle fit mine de tourner les talons, la tête haute, amplifiant exagérément ses mouvements pour exprimer son mécontentement. « Il y avait toutes sortes d’objets, des lampes, mais aussi des sceptres, des médaillons… Cet objet ne m’inspire pas confiance, je veux que tu t’en sépares immédiatement. D’ailleurs, ce type de métal m’est inconnu ! C’est tout de même un comble pour un forgeron ! Rapporte-le à l’endroit où tu l’as trouvé, il nous est inutile, et son propriétaire sera certainement bien content de le retrouver. Il est le seul à savoir quoi en faire. » Juliette essaya bien d’expliquer à son père qu’il s’agissait de sa première trouvaille d’aventurière, qu’il représentait un trésor pour elle, mais celui-ci ne voulut rien entendre. Juliette sortit donc de la boutique, dépitée, marchant droit devant elle sans quitter l’objet hexagonal des yeux. Elle se sentait liée à cet objet, et refusait de s’en séparer. Elle décida donc de le cacher dans sa chambre, à l’abri des regards.

Les jours suivants, Juliette resta enfermée dans sa chambre. Elle n’en sortait que pour manger. Elle restait des heures allongée sur son lit à fixer son trésor, le décortiquant dans les moindres détails, obnubilée par cet objet de métal froid sorti de nulle part et qui semblait ne servir à rien. L’odeur insupportable des champignons qui pourrissaient dans le panier d’osier déposé à la hâte dans la cuisine avait valu à Juliette des remontrances de la part de sa mère, de plus en plus inquiète face à cette étrange attitude. Juliette s’enfermait de jour en jour dans sa solitude, focalisant toute son attention sur sa merveilleuse découverte. Sa joie de vivre s’était envolée avec son ambition de devenir une grande cuisinière au château. L’objet avait profondément changé Juliette, même physiquement. Livide, amaigrie, plongée dans une déchéance irréversible, elle se laissa aller un matin, assise sur son lit, l’objet posé sur les genoux, elle autorisa enfin ses larmes à couler le long de ses joues creuses. Celles-ci finissaient leur course en se heurtant au métal bleuté, chaque impact en entraînant un autre, dans une harmonieuse symphonie de sons aléatoires. « Il y a plus de larmes versées sur la Terre que d’eau dans l’océan » balbutia Juliette. « C’est ce qu’on va voir ! » répondit une voix sortie de nulle part. La jeune fille n’entendit pas le grondement sourd qui fit trembler toutes les habitations du village. Elle ne remarqua pas que les éléments s’étaient subitement déchaînés, que le soleil avait entièrement disparu du ciel azur devenu noir, menaçant. Noyée dans un rêve, elle tournait le dos à la vague immense qui déferlait à toute allure… »

« Mademoiselle ? MADEMOISELLE ? Insista la vieille femme. Je suis désolée, mais il est 17 heures. Je peux vous suggérer d’emprunter cet ouvrage pour le finir chez vous. Vous avez passé une bonne partie de l’après-midi à le dévorer… » Brutalement extirpée du monde imaginaire dans lequel elle s’était engloutie, Marie Grandin mit quelques secondes à comprendre ce qu’il se passait. Reprenant peu à peu ses esprits, elle leva les yeux et dévisagea son interlocutrice, qui, souriante, lui demandait de bien vouloir quitter la bibliothèque du Val, qui fermait ses portes jusqu’au lendemain. Confuse, elle se leva en s’excusant et replaça « La malédiction de l’Atlantide » sur l’étagère des romans fantastiques. Quelques instants plus tard, elle se retrouva plongée dans la réalité de l’agglomération Toulousaine, bien loin du cadre pittoresque dans lequel elle venait de s’évader. Après plus de vingt minutes de transports en communs, elle poussa enfin le grand portail de la villa de ses parents, accueillie par le chant des oiseaux, appréciant d’être totalement coupée du monde, et retrouva un peu de sa sérénité. « Le jardinier va avoir du travail ces prochains jours, il aura besoin de l’aide d’un ou deux collègues pour entretenir convenablement toute la propriété », pensa-t-elle en balayant les feuilles de peuplier qui ne cessaient de tomber depuis le début de l’automne. La nuit tombant, elle pressa le pas, puis s’arrêta net au bout de quelques mètres, effrayée. L’objet gisait au milieu du sentier, parfaitement insolite dans ce cadre bucolique.
Jo-alsace
Envoyé le :  3/4/2010 15:46
Plume d'argent
Inscrit le: 24/2/2010
De:
Envois: 484
Re: Immersion
Superbe ! J'ai beaucoup aimé ! On se croit dans un conte de fée, je ne m'attendais vraiment pas à l'éveil dans la bibliothèque et la chute remet en route (histoire sans fin...)
Honore
Envoyé le :  4/4/2010 10:10
Modérateur
Inscrit le: 16/10/2006
De: Perpignan
Envois: 39530
Re: Immersion
Tellement captivant que l'on ne peut qu'attendre la suite.
HONORE
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