Je t’appellerai encore
Tes traits d’ange d’où s’inspirent
Mes vertiges voilés,
Vagues et doux soupirs,
Tu viens m’inventer.
Comme le jour qui succombe
Ton regard est un clair de lune,
Et même au fond de ma tombe
Ta beauté fera encore chanter ma plume.
J’y verrai ton ombre argentée
Que dissimulerait à peine le soir,
Jouer avec tes cheveux muets
Sortis de ton miroir.
Pourvu que l’on me couche
Bien sur le dos,
Que je puisse encore deviner ta bouche
Dans mon sommeil, mon fardeau.
Et avec mon beau costume
Qu’effraie la noirceur des lieux,
D’une érection posthume
J’entendrai peut être tes soupirs fameux.
Le voile infiniment blanc
Que chahutent tes hanches,
Se mêlera peut être au chant
De la lune qui sur toi se penche.
Je t’entendrai gémir
Près des chrysanthèmes effarouchés,
Quand tes frissons viendront finir
Sur ma tombe, épouvantés.
Et au petit matin quand la nuit
Aura sué la rosée,
Quand tu te seras enfuie
Après avoir osé.
Je t’appellerai encore dans le désastre
Obscur, que mes nuits éclairent,
Et je verrai ton corps, beau comme un astre,
Revenir sur mon lit de misère.
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Ne méprisez la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c'est son génie. ( Ch. Baudelaire )