Nos maisons...
Nos maisons.
La tienne sera grande spacieuse et accueillante
Tu y vivras l’amour et ses mille tourmentes
Je l’imagine blanche en confin de cité
Urbaine pleine d’ambre presque molletonnée
Tu y feras des fêtes très tard et déjantées
Les femmes y seront belles et les livres étalés
Un jour je viendrai même y garder vos enfants
Ne dis pas non je le sais tu seras bon parent
La mienne sera claire et en jardin lilas
Sur un vieux rocking chair tu t’y reposeras
Il y aura des mystères et des nuits de satin
J’y écrirai ma vie du soir jusqu’au matin
Les Variations Goldberg y côtoieront U2
Et tous mes vrais amis y seront un peu fous
Souvent traverseras la France en pleine nuit
Tu viendras t’épancher en mon sein bienveillant
Je te recueillerai comme on aime son frère
Au sortir de ton bain te masserai le cou
Tu pleureras l’horrible trahison d’un confrère
Ou bien la femme aimée qui t’aura dévasté
Je me ferai le lit de toutes tes rivières
Tu pourras tout me dire tu seras pardonné
Ou bien ce sera moi qui en nuit de novembre
Viendrai cuver chagrin comme feuille qui tremble
Tu me réchaufferas me serviras du vin
Me prendras dans tes bras comme ta bien aimée
Tu maudiras cet homme qui m’aura abîmée
Et tes éclats de rire sauront me conforter
Parfois encore un peu nous referons l’amour
Comme on aime à relire un roman d’infini
A regarder tableau à écouter en boucle
Les chansons qui vous bercent ou qui font frissonner
Tes femmes me craindront comme on haït rivale
Avant que de comprendre que je serai leur sœur
Leur amie leur chemin celle qui ouvrit la route
Celle qui la première aura percé tes doutes
Mes hommes t’en voudront pour ta belle insolence
Pour ta jeunesse folle et ton corps de Massaï
Ils ne comprendront pas la suprême indolence
Qui nous unira même à l’orée de ma nuit
Car nul ne verra clair en cette délivrance
Et des temps et des heures et des siècles à venir
Toi et moi c’est ailleurs au pays des immenses
Nous-mêmes ne savons pas comment vivre l’intense
Oui un jour viendra bien où la sororité
Prendra le pas sur l’extase devenant évidence
Ce jour là nous serons des voisins des amis
Un peu comme cousins qui dépassent les bornes
Tu seras mon gardien auras toutes mes clefs
Je serai ta grande sœur ton amie de toujours
Mais en attendant, en attendant garde moi ton amour
Parcourons la encore la forêt des étranges
Perdons nous jusqu’au bout dans ses incandescences
Il sera toujours temps de vivre convalescences
Demeurons un peu fous n’écoutons pas consignes
Escaladons ce mur jetons tous les insignes
Viens suis moi mon amour je connais le chemin
Parcourons les déserts et prenons tous les trains
Toi et moi c’est à vie t’as juste à prendre ma main.
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"Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue:
Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue.
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler:
Je sentis tout mon corps et transir et brûler."
Racine, "Phèdre"...