J’aurais pu, c’est certain, terminer dans un pré,
Décrochée de ma branche et retomber dans l’herbe.
Après avoir grossi, pris un teint empourpré,
J’aurais été, c’est sûr, une pomme superbe.
Une vache normande aurait croqué ma chair
Puis aurait fait de moi quelques gouttes de lait,
Vous l’auriez siroté dans votre rocking-chair
M’offrant ainsi la joie de finir au « palais »…
J’aurais pu devenir breuvage pétillant,
Jus de pomme et puis cidre aux bulles merveilleuses.
Vous m’auriez dégusté, tous vous émoustillant
Les papilles à sec un peu trop sommeilleuses.
Mais vous m’avez pressée, compressée, écrasée
Afin de vous donner mes jus les plus intimes,
Pour allumer ce feu dans la gorge embrasée
Dont vous serez un jour les futures victimes.
Je suis si raffinée qu’on me nomme « Calva ».
Je sais un « équipage », en très grand connaisseur,
Qui ne connaît que moi pour danser la java,
Assurant que je suis un antidépresseur.
Lui puis ses compagnons me boivent au goulot,
Chantent tels carabins qui vont au turlupin.
La pomme que je fus les laissera pâlots
Car même distillée je suis un gros… pépin.