Le matin qui s'en vint me souffler au visage
Le parfum d'un regret autrefois contenu
Me dit de sa lourdeur, dans un soudain orage:
"Si jeune et déjà sourd, n'as-tu rien retenu

De la rage étoilée qui, un jour de grand vent
Te couvrit pour voiler les âmes des miroirs
Jusqu'à coucher ta voix et, tel un triste enfant
Marcher au dos des rires sous des lumières noires?

Que sont pour toi ces vastes expiations
Qui furent tes serments, tes filles trop faciles?
Crois-tu te rassembler par l'extirpation
De l'équilibre ingrat de ta folie tranquille?

Et tel un prêtre nu de foi et de scrupule
Tu prêchas seul dans un océan de papier
Ces torts que tous renient lorsque la mort accule
Celui qui lui sourit pour mieux l'épier.

Et tu te rêves errant dans tant d'états critiques.
Et je t'en sais menteur, enterré par le cœur
Révérant tes tremblants hurlements de panique
Traînant dans leur lenteur leur si tendre torpeur.

Entends-tu ces tempêtes cherchant un abri
Dans cette forte tête que tu crois conquise?
Ton âme se déplume et les mots te fuient.
En ces temps d'amertume, contemple ta hantise."

Et ma gorge gronda tel un glorieux tonnerre
Le chagrin inonda ma sècheresse vide
Et puis tout me revint: ta flamme et puis ton air
De sirène embusquée, paradoxe timide

Ton grand théâtre humide, terre de trop d'erreurs
Ton beau tombeau de craie pour nos égarements
Et puis comme un regret, tes yeux inquisiteurs
La pluie et le beau temps jetés en un instant

Ta flamme qui m'atterre, nuée de vains reproches
Tes larmes qui maternent les voix qu'elles engendrent
Un regret me revient, un grain qui se raccroche
C'est vrai je me souviens mais ne veux plus entendre

Toi qui, dans mes tourments intimes et privés
Crois parler de ta voix, de tes mots, de ton être
Retourne à ton néant - mains figées, écrivez:
"Le passé parle trop quand il remue les lettres

Le temps sépare les mots qu'on prononce peut-être
Le cœur a ses réponses toutes préparées
De pleurs acérés, ronces, mal-être à la lettre
De plumes épineuses aux branches fracturées"

Ainsi dans la nécropole de mon passé
Un autel est pour toi laissé à l'abandon
Car le jour qui surgit peut déjà te chasser
Apportant par magie l'oubli, m'en faisant don

Je ne regrette rien car j'ai tout oublié
Balancé dans les coulisses de ma mémoire
Où tu dors goulument comme un arbre plié
Par l'orage éclatant d'un matin noir de soir

Enfin, j'entends la vie qui patientait en moi
Cachée sous les regrets comme un trésor enfoui
Et je ne t'entends plus car tu n'existes pas
Enfin, j'entends ces chants que je croyais enfuis

Et le tambour de pluie salue puis se retire
Délivrant le silence, dévorant mes tourments
Et tout ce dont j'ai cru vouloir me repentir
Une nouvelle page sourit et m'attend

Une partition de moi-même à jouer
Jouer à être moi, jouer à composer
M'arrachant une plume de ma voix levée
Je ne regrette rien car j'ai tout oublié

Ben je ne trouve vraiment pas les mots qui puissent décrire ac fidélité l'effet de tes paroles c'est tout simplement magique.
Bravo !

BONSOIR LUIS-MANUEL, J'AI ADORÉ TON POÈME , DES VERS MAGNIFIQUES. BIENVENUE.OKANA

Le matin qui s'en vint me souffler au visage
Le parfum d'un regret autrefois contenu
Me dit de sa lourdeur, dans un soudain orage:
"Si jeune et déjà sourd, n'as-tu rien retenu

De la rage étoilée qui, un jour de grand vent
Te couvrit pour voiler les âmes des miroirs
Jusqu'à coucher ta voix et, tel un triste enfant
Marcher au dos des rires sous des lumières noires?

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La douleur est comme un arbre tordu par les morsures des grands froids d'hiver...


Citation de Nicole Chaput

Salut Luis_manuel
Je tiens à t'exprimer mes vifs remerciements pour ce nouveau regard sur le monde;un poème que j'ai hautement apprécié !
Au plaisir de te relire
Amitiés
Farid

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"Je n'existe que dans la mesure où j'existe pour autrui"
Manet




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