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Élégie, à Cynthie (Inspirée de la deuxième élégie de Properce) Élégie, à Cynthie
Crede mihi; non ulla tuæ est medicina figuræ. Nudus amor formæ non amat artificem. (Sextus Propertius)
Jeune femme dont le sourire est charmant, Ta beauté suffit. Ces vains ornements Ne peuvent t'embellir, tant tu es belle! Pourquoi appesantir ta chevelure rebelle Avec ce voile ennemi de tes attraits? Tu empourpres maints cœurs avec tes traits, Athéna elle-même t'arme de sa lance, Cupidon craint ta superbe violence Ô, Cynthie! Pour moi, poète, laisse le vent Caresser cette chevelure en rêvant! Pourquoi cette myrrhe de la fière Oronte Dont le parfum jusqu'aux cieux monte Et berce les sens des impurs mortels? Aphrodite n'encense point ses autels! Pourquoi, aux regards dont tu te dérobes Montrer les doctes plis de ta robe? Tu éblouis les cœurs, n'éblouis point les yeux! Car la chasteté t'eût embellie mieux Que ces parures qui plaisent aux Barbares! Ta beauté gémit de cet or qui pare De ta chair délicate la douceur! Pour seul appareil garde ta blancheur! Des flots de Cythère Vénus sortit nue, Le soleil qui rayonne dans la nue Aux hommes ne montre que ses rayons! La lune avec ses doigts berce Endymion Avec ses doigts dont les caresses sont douces! La fleur parfumée qui dans les prés pousse Belle, raille la rosée qui veut l'embellir, Le ruisseau léger que l'on voit courir , Radieux comme le soleil qui l'éclaire, Ne ralentit point son pas pour plaire, Et pour plaire ne parfume point ses eaux, La lyre n'imite point le chant des oiseaux, De la douce mer le doux rivage N'est embelli que par ses coquillages Dont elle bénit l'éclat naturel! Ô, reine pareille aux dieux immortels, Ta beauté abhorre ces artifices! Crois-moi, les Muses à mes yeux t'embellissent Plus que ces ornements et ces regards! Le lierre esseulé qui croît au hasard Est plus beau que la plus belle rose Que les larmes de l'azur arrosent! Rappelle-toi, rivale de Vénus, Jadis, la chaste fille d'Évenus D'un dieu et d'un homme alluma la flamme, D'Apollon l'amante et d'Idas la femme Marpessa éplorée de son époux Répéta à Jupiter le nom doux! Filles de Leucippe, Phébée et Flore Belle comme la nuit et douce comme l'aurore, Avec pour seul fard un feu sans remords, Domptèrent deux héros, Pollux et Castor, L'âme par les traits de Cupidon rougie, Hippodamie, sur un char de Phrygie, Avec un amant de ses charmes épris, Monta, le cœur de cette flamme surpris. Ô, Cynthie! Toutes ces femmes étaient pures, De leurs bouches il ne sortait qu'un pieux murmure, Comme de la bouche de l'oiseau un pieux chant! Les fleurs s'épanouissaient quand, les touchant Avec leurs doigts, elles touchaient leurs pétales! Douce femme, sache que les ornements pâle Les riches parures et les riches odeurs, T'embellissent moins que ta chaste pudeur! Quand ta lyre éplorée chante avec verve, Tu plais à Vénus et à Minerve! Que t'importe la mortelle beauté? Mieux que l'or, ta divine chasteté Sœur d'Artémis, sur ton front rayonne Et avec ses lauriers te couronne! Comme le jour qui illumine la nuit, La beauté sur nos fronts heureux reluit Et embrase nos flambeaux éphémères, Mais elle déploie son aile de chimère Comme un oiseau, dans les azurs lointains! Et les Parques qui comptent nos matins Lui disent: "Berce la radieuse jeunesse Dont tes chants enchantent la paresse, Mais quand tu verras choir leurs cheveux blancs Quitte la femme effrayée et l'homme tremblant Qui de leurs jours passés rêvent encore Et de revenir vainement t'implorent!" Ô, ma Cynthie! Aime l'amant amoureux Que tu vois errer, poète malheureux, Dans les bois profonds où sa lyre pleure! Ne fuis point, et près de mon cœur demeure Que je voie ton sourire rayonner Et tes charmes hautains me pardonner! Écoute mes amoureuses prières, Que ces grâces qui te remplissent de lumière Ne remplissent point ton âme de fierté! Sur l'aile du vent, loin du monde emportés, Allons, conduits par notre humble voile, Guidés par le pâles rayons des étoiles, Oublieux des nuits, oublieux des jours, Au rivage propice à nos amours, Mais quitte ces bijoux qui appesantissent Notre voile légère que les dieux bénissent, Et sur les ondes de la mer allons Bercés par la lyre douce d'Apollon!
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