Plume d'or Inscrit le: 5/3/2008 De: Tunisie Envois: 1238 |
Le vent et la rivière Le vent et la rivière
La rivière Ô, vent! Quand tes lèvres caressent mes ondes En me disant des paroles profondes Dont mon cœur épris toujours se souvient, Quand, las d'errer, à ma couche tu reviens, Triste, je ferme mon œil et je pleure Parce que je veux que tu demeures! Daigne écouter mes soupirs, vent ailé! Quand tu t'en vas, je ne cesse de t'appeler; Je dis ton nom à toute la nature Et j'implore toutes les créatures De te rendre à mes feux et à mes fers! Ô, toi qui à mes amours es si cher, Toi, Zéphyr, divin frère de Borée, Qui emportas une amante adorée À Éros qui l'attendait aux cieux, Emporte-moi à ton port silencieux Que le soleil éternel éclaire! Je ne veux que t'aimer et te plaire; Ne souffre point que je demeure ici, Seule et le front par les bois obscurci, Je m'endors, ténébreuse, dans l'ombre! J'erre loin de toi et mon cœur est sombre; Je ne te vois point, tu ne me vois pas, Je ne puis dans le ciel suivre tes pas, Quand tu t'envoles, rapide, dans les nuées! Pourtant, maintes fois, ton aile mouillée, Me caressa. Maintes fois je te vis Chanter mes louanges, ravi, En louant mes grâces souveraines!
Le vent Je t'aime aussi, rivière au cœur doux! À tes pieds je viens pleurer à genoux Et te dire mes amoureuse prières; Toi qui du soleil égales la lumière, Toi qui me vois chaque jour soupirer, Oh! Près de toi j'eusse aimé demeurer Et j'eusse aimé te voir et t'entendre Et sur ton cœur amoureux et tendre Reposer doucement mon cœur inquiet. Mais Dieu me donna l'aile et non le pied; Au-dessus des mers, léger, je plane, À errer le ciel puissant me condamne, L'oiseau s'arrête sur sa branche, l'onde au port, Mais moi je cours et jamais je ne dors, Malheureux comme je suis inlassable Et d'Éole le captif déplorable! Mes soupirs jusqu'aux cieux s'envolent, amers, Quand tu embrasses le fleuve qu'embrasse la mer, Amant deux fois heureux que j'abhorre, Qui trouble mon cœur jaloux qui t'adore! Car je t'aime, douce rivière, et je ne puis Que bénir les lieux où ton font reluit Et maudire, épris de ton sourire, Les lieux où je ne te vois point reluire!
La rivière Ô, toi que louent mes soupirs infinis! Fils de l'Aurore, c'est toi que je bénis! Et je maudis, dans ma mélancolie, Les lieux où tu souffles et où tu m'oublies Et où l'amour peut-être te conduit Plus rapide que ton aile qui me fuit, Au pays lointain où ta flamme t'appelle! Pourtant, contente et pleine de zèle, Ta captive éplorée qui te chérit, Lui ordonnasses-tu la mort, eût péri! Tu l'eusses vue, à tes lois soumise Et de tes yeux cruel toujours éprise, À tes arrêts doucement obéir! Mais dans ta couche je ne puis vieillir, Comme toi, dans ce bois profond j'erre, Emportée par la brise légère Qui, à un port inconnu m'appelant, Guide, inexorable, mon pas tremblant!
Le vent Ce n'est point du crépuscule la lance Qui rougit le ciel avec violence, Mais c'est mon sang qui coule chaque jour De la plaie vermeille de mes amours! Ô, fille du Torrent! Seules tes caresses Consolent ce cœur que tes fers blessent Et que tous les remèdes ne peuvent guérir! Ne baisse point ton œil qui me fait souffrir; Ma douleur est douce quand tu me regardes! Ô, Amour! Que dans mon sein je garde Ce trait divin qui empourpre mon cœur Et qui prive du repos mon œil songeur, Comme le guerrier dans son sein la balafre Que la guerre y sculpte avec ses affres Et qui embellit le front des héros!
La rivière Je suis ta victime, demeure mon bourreau! Qu'importe le trépas au cœur qui aime? Ô, vent radieux! Souris à mon cœur blême Et tu me verras, éprise à tes pieds, Te louer, souverain de mes feux inquiets, Et mouiller ton aile de mes larmes! Que ton cœur demeure sans alarmes, Car ma flamme, fidèle à un sort si beau, Reluira toujours dans ton doux flambeau!
Le vent Et ma voix, au chant de l'oiseau pareille, Bercera ton cœur et ton oreille Et quand elle retentira sans ennuis, Sur mon sein t'endormira chaque nuit!
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