« L’AMER NOËL »
Tout est calme et silence en « Vallée de Saison »
L’hiver, à pas feutrés, s’est très bien installé.
La neige a recouvert les prés et les maisons,
Les arbres dénudés, le hameau isolé.
Le crissement de skis, tout soudain, me réveille.
Une lueur Ă©trange envahit ma chambrette.
«Toc, toc ! Mais qui donc frappe à une heure pareille ? »
J’ouvre à Mère Noël … s’offrant sur la carpette.
« Mon mari tourne encore ! Et ses rennes aussi !
J’en ai marre et suis seule et je veux mon cadeau ! »
Je m’en vais droit au but, sans aucun raccourci,
Elle en a bien le droit… Je suis son gigolo !
Une table est dressée, des bougeoirs allumés.
Dans sa robe de soie me plaque tout contre elle
Pour me conter fleurette et m’offrir ses baisers,
Puis le Kama-Sutra, sa Bible, me dit-elle.
Ayant un tour de rein je ne puis me baisser,
Honorer, caresser ses gros seins de velours.
Je regarde, ennuyé, je ne peux m’affaisser
Vers la Mère Noël hurlant : « Mon Amouuuuuur ! »
Il y eut l’âge d’or et puis celui… d’airain.
Voici les miens coincés, bloqués pour l’occasion.
Comment voudriez-vous que je reste serein ?
C’est Erich Von Stroheim dans « La grande illusion »
Se rapprochant de moi, le livre entre les mains,
S’allonge sur la table en m’ouvrant ses… « idées ».
Le Kama-Sutra lu, je deviens plus serein,
Le lingam érigé en guise de trophée.
« Et si nous feuilletions le tout premier chapitre,
Manière de se mettre un peu tous deux en forme ?
Mais plutĂ´t que la table allons sur le pupitre,
Goûtons à tous les plats. J’ai l’appétit énorme. »
« Non mais ! T’as peur de rien ! Veux-tu que je m’affale ?
As-tu jamais pensé à tous mes rhumatismes,
Et Ă ma clavicule qui se fait la malle ?
Le pouf serait plus sûr que ces cours d’alpinisme ! »
Comment Père Noël a-t-il pu supporter,
Dans sa grande bonté, pareille déglinguée ?
» Même une vieille horloge, on peut la remonter.
Vénérable barbu, moi, je l’aurais flinguée !
Et la pouffe pouffa
En entendant cela….
« Mais crois bien qu’à ces joies je suis encore experte !
Ma langue de velours fait encore succès ! »
Et pour bien me prouver qu’elle est encore verte
Se love contre moi m’autorisant l’accès.
« Mon Dieu ! Quelle infection ! Là , dessous vos aisselles !
Je ne sens pas très bon, moi-même, en ce moment,
Mais sûr, vous abusez de vos eaux de vaisselle
Et dans ces senteurs là je suis un piètre amant ! »
«Mais rappelle-toi donc, quand nous avions vingt ans
Tu me faisais l’amour au moins trois fois par jour.
Et tu ne disais rien de mes odeurs, antan !
Tu te bouchais le nez, quitte à faire un détour !“
Seigneur ! Mais avec qui donc me confondrait-elle ?
DĂ©jĂ par Alzheimer la voici fort atteinte !
Pauvre Mère Noël ! Remontons nos bretelles
Et oublions l’amour dont l’envie s’est éteinte.
« Tes bretelles, mon cœur, si moi je fais ceinture,
Sont mon dernier souci, alors laisse tomber
Et range ton « pinceau » resté en devanture !
Je roulerai ma toile au lieu de le gober !... »
…Mère Noël partie, je la ressens encor !
Amours désabusés… Les instincts refoulés…
Qu’en est-il maintenant de notre corps à corps ?
Seulement les bougies, cette nuit, ont…. coulé !