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Épître, Phyllis à Démophoon (inspiré du deuxième chant des Héroïdes d'Ovide) Épître, Phyllis à Démophoon Hospita demophoó tua te rhodopeia phyllis Ultra promissum tempus abesse queror. (Publius Ovidius Naso)
Ô, Démophoon ! Ta Phyllis se lamente. Sombre est le cœur de ta fidèle amante Qui a vu ta voile, bercée par le vent, Déployer son aile blanche en rêvant Pour quitter ce rivage dont les caprices À mon amour fatals et propices, Hélas ! Ne te montrent point aujourd’hui ! De ce jour ténébreux où tu me fuis Thrace et l’Hémus se souviennent encore ; L’Hèbre ne ramène point ton aurore Dont le rayon dans Rhodope a relui ! Quatre fois, la lune brilla dans la nuit, Et je ne vois point ta voile bénie Portée par les ondes de Sithonie, À une amante ramener son amant ! Que de souvenirs, que l’amour rend charmants, Dans ces lieux ont réuni nos âmes ! Reine, tu m’aimais comme une femme, Oiseaux sur la même branche endormis, Ton sein a caressé mon sein ami ; Maintes fois, dans cette vaste solitude, Nous nous embrassions sans inquiétude ! Tu oublies, cruel, et je me souviens ! Aux ports de l’Attique quel Dieu te retient ? Ou, courbé au pied d’une déesse, Tandis qu’ici se meurt ma jeunesse, D’une autre femme brûles-tu d’un autre amour ? Comme tous les amants, je compte les jours, Je compte les rayons et les ombres, Les aurores infinies, les nuits sans nombre ! Mais tu ne reviens point, amant cruel ! Éplorée, j’implore les vents du ciel D’être doux, et la mer d’être douce, Et Poséidon que nos voiles courroucent De guider ta nacelle, loin des écueils, À ce port où je ne puis fermer l’œil En sondant l’abîme de cette mer immense ! L’amour est le frère de la clémence ; Te pardonnant, j’accusais l’univers, Mon cœur inventait mille périls divers, Je croyais ta nef par la houle brisée, Le pensant ennemi, j’abhorrais Thésée, Père hostile à tes prières et mes vœux. Je t’excusais au nom de nos doux feux, Je tremblais pour tes jours, amant perfide ! Des mers je craignais les ondes homicides Et des vents les caprices criminels, Et d’encens je parfumais les autels, En priant tous les dieux de te rendre, Amant oublieux, à mon cœur tendre ! Mais les jours passent et tu ne reviens point. Tu me fuis et je ne t’aime pas moins ; Pour me voir, de cette mer profonde Tes rames ne blanchissent point les ondes Et les vents sur leurs ailes ont emporté Tes voiles blanches et tes serments répétés ! Traître ! Que t’ai-je donc fait ? Ta victime, Châtiée pour ton amour comme pour un crime, Se lamente et pleure. Par les dieux puissants Aux pieds desquels nos mains versaient l’encens, Par l’auguste Héra, par Aphrodite, Par la mer profonde que le vent agite –Celle où tu courais et celle où tu cours – Tu me jurais, infidèle, ton retour ! Au nom de ma douleur, de mon supplice, Que tous les dieux immortels te maudissent ! Que les flots te châtient, amant trompeur ! Victime de tes vœux malgré ma pudeur, Tu m’as promis l’hymen. Et éplorée, Par ta faute je meurs déshonorée Et je cache mon front coupable aux mortels. Prompts à condamner, leurs bouches pleines de fiel, Les Thraces me raillent et me disent : « Reine, Va donc régner sur la docte Athènes ! La Thrace, armée et fière, veut un vainqueur ! Mais ils ne voient point le fond de mon cœur ; Je t’ai aimé ! À tes larmes royales J’ai cru, insensée ! À moi-même fatale, J’ai réparé ta poupe ; je t’ai donné Des rameurs puissants pour m’abandonner ! Tu m’as dit : « Ma Phyllis, à mes promesses, Je sais obéir. Attends-moi, déesse ! Ton Démophoon, fidèle, reviendra ! D’un hymen que n’a point béni Héra Dans mon sein tu me laisses le fruit infâme ! Heureuse si je n’avais que ta flamme ! Des mes charmes, traître, je t’ai laissé jouir, Quand je t’aimais, tu songeais à me fuir ! Es-tu donc fier de ta triste gloire ? Ô, triomphe hideux ! Ton âme noire S’enorgueillit-elle de cette lâcheté ? Songe à ton père, ce héros redouté Qui fit frémir et Gaia et Érèbe Et seul terrassa Athènes et Thèbes, Vainquit Sciron, Cercyon, Périphétès, Procuste, Sinis et Corynétès, Les Amazones et les Pallantides, Phaea qui rendit Crommyon livide Et le Minotaure, d’Hercule digne rival ! De la triste Ariane seul le nom royal Hante aujourd’hui ta mémoire criminelle ! Et moi je m’en vais, loin de ta prunelle, Dans ces flots qui ont vu ta nef partir, En fermant mon aile, doucement mourir !
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Mascotte d'Oasis Inscrit le: 30/10/2005 De: **** Envois: 83541 |
Re: Épître, Phyllis à Démophoon (inspiré du deuxième chant des Héroïdes d'Ovide) je lis, ..... Que de souvenirs, que l’amour rend charmants, Dans ces lieux ont réuni nos âmes ! Reine, tu m’aimais comme une femme, Oiseaux sur la même branche endormis, Ton sein a caressé mon sein ami ; Maintes fois, dans cette vaste solitude, Nous nous embrassions sans inquiétude ! Tu oublies, cruel, et je me souviens ! Aux ports de l’Attique quel Dieu te retient ? Ou, courbé au pied d’une déesse, Tandis qu’ici se meurt ma jeunesse, D’une autre femme brûles-tu d’un autre amour ? .... quelle belle inspiration, vous êtes un poète intelligent, talentueux, pour retenir les prénoms les lieux, les événements, avec autant de précision. depuis fort longtemps nos livres sont refermés Hélène a rejoint son aimé leurs mains se sont liées à jamais yeux dans les yeux ils rêvent ensemble d'un amour éternel merci à vous , je suis dans un autre monde en vous lisant ----------------
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