À un faux sage
" […] Plusieurs faux prophètes s'élèveront, et ils séduiront beaucoup de gens ". (Mat 24/11)
Tais-toi et ne dis rien, homme infâme !
Toi dont l’œil faux imite la flamme
Des héros grecs, des sénateurs romains
Et de ces géants au cœur surhumain
Sévères et puissants comme la Justice
Qui maudissaient les vicieux et le vice
Et déracinaient, avec leurs bras nus,
Les trônes, comme la houle l’arbre chenu !
Ô, tais-toi ! Que veux-tu dire encore ? Devant ces enfants doux comme des aurores,
Que ton noir discours corrompt, tu rugis ;
Ta bouche, comme la gueule d’un dragon, rougit
Et il en sort parfois des étincelles !
Comme devant la houle la fleur qui chancelle
Ces doux enfants frissonnent devant toi,
Quand tu leurs parles en élevant la voix,
Comme Noé parlerait du Déluge,
De la perdition et du refuge,
De la justice, du devoir et du droit,
En louant ton président comme un roi,
Petit serviteur d’un petit maître !

Moi, poète qui ai juré d’être
Doux à l’innocent, terrible au méchant,
Moi dont l’amour emplit les vastes chants,
Confident de l’aurore et du tonnerre ;
Je te maudis ! C’est Dieu que je vénère
Et d’un homme tu loues l’obscur pouvoir !
Ces enfants, que tu crois aveugles, peuvent voir ;
Un jour, comme dans la nuit une porte énorme,
Ils ouvriront leurs yeux que tu fermes !
Ils sont oiseaux encor. Prends garde ! Un jour
Ils seront aigles comme tu es vautour !
Prends garde ! Le mensonge est éphémère !
Cette plume qui tombe de l’aile de la chimère
Qu’on appelle Pouvoir, s’envole dans les cieux !
Le peuple ne dort point ! Mais silencieux,
Il épie le tyran comme une proie !
Un seul Ulysse suffit pour vaincre Troie !
Un jour, le plus faible de ces enfants
Sera peut-être un Achille triomphant
Et comme Hercule triomphera, Cerbère !
Car c’est à l’heure où l’on désespère
Et où l’univers semble plus obscur
Que Dieu châtie les traîtres et les impurs !
Le flambeau rayonne mieux dans l’ombre,
Le jour est radieux quand la nuit est sombre,
Je le sais ; ce pays ce réveillera
Et de tous ces bourreaux se vengera,
Et ce peuple qu’un tyran opprime
Le foudre à la main, châtiera les crimes
Ignoble esclave, de ton vil seigneur !
Le despote qui rit a toujours peur ;
Il voit partout son échafaud, sa tombe !
L’injustice est un toit mauvais qui tombe
Sur tous ceux qui y cherchent un vain abri !
Combien de rois comme des hommes ont péri !
Le glaive châtie celui qui le porte,
L’abîme ouvre ses grondantes portes
Sous les pieds tremblants de tous les mortels !
Le corps est l’encens et l’âme est l’autel,
Plus le feu est puissant, plus il s’évapore !
La nuit vient toujours après l’aurore ;
Le sage est celui qui songe au trépas
Et sait que l’univers ne dure pas,
Que, faible ou puissant, l’on est éphémère,
Que la gloire est une illusion amère !

Hier est l’ombre et demain est la nuit !
Tous les tyrans qui vivent pour aujourd’hui
Et qui veulent que le monde les révère
Ne voient point du Seigneur l’œil sévère !
Ils ne savent point que Dieu les attend
Et que, sombre et courroucé, il entend
Les lamentations des victimes !
Leurs cœurs sont devenus des abîmes
Et leurs yeux sont ceints du bandeau fatal
De l’Ignorance, c’est-à-dire du Mal !
Ils oublièrent Dieu et Dieu les oublie.
Ils ignorent la douce mélancolie
Qu’allume dans le cœur un regard pur ;
Ils n’ont jamais levé leurs yeux vers l’azur
Pour voir de Dieu la forme vivante ;
Tout ce qui vient d’en haut les épouvante,
Ils craignent les sages au front mystérieux
Et, insensés, croient avoir blessé Dieu
En menaçant de leurs arcs les nuages !
Comme la nef que la houle, loin du rivage,
Emmène à un port sombre et inconnu,
Leurs cœurs aveugles oublient que ce qui fut,
Que ce qui est, n’appartient point à l’homme !
Jadis, César cria : « Je suis Rome ! »
Et Alexandre : « Je suis l’univers ! »
Et aujourd’hui le ténébreux hiver
Couvrit leurs noms de son vaste voile !
On ne voit plus ces radieuses étoiles
Dans la main de l’azur, comme des flambeaux,
Ils descendaient lentement au tombeau,
Vainqueurs, mais vaincus. Par les mythes bercées,
Leurs vies reluirent dans toutes les pensées
Et s’allumèrent, comme s’allume un éclair,
Dans le firmament qu’il rend soudain clair
Puis, ne brillant plus avec nostalgie,
S’éteignirent, comme au vent une bougie !

PS:Désolé d’ajouter à ce poème, qui est déjà assez long, ces quelques notes. Mais je désire uniquement vous dire, amis poètes, pourquoi j’avais songé à l’écrire.
Voilà ce qui s’était passé : un jour, après une longue journée de travail au lycée, on fit appel à nous, professeurs, pour assister à une « réunion » tournant autour du thème « Dialogue avec les jeunes ». L’on fit également appel à mes élèves. Au fil de la « discussion » je me rendais compte que ledit « Dialogue » (avec un grand D !) était un dialogisme des plus infamants. Au lieu de parler des problèmes des jeunes et de les amener à en parler, au lieu de leur donner l’occasion de dire ce qu’ils pensent de leurs propres avenirs et de l’avenir de ce pays obscur où je vis (la Tunisie), on leur parlait de ce que fait le « grand génie » M. le Président actuel de la Tunisie, un tyran qui opprime nos cœurs et nos esprits. Nous ne jouissons point de la liberté d’expression (la censure fait du bon travail !), ou du droit à l’information. Ceux qui luttent sont jetés en prison.
En Tunisie, nous n’avons que le droit à la désinformation, et le droit de respirer de l'air pur -cela va de soi- et des devoirs avec. Le "faux sage" dont je parle est celui qu'avait envoyé le Gouvernement pour "orienter" ledit "dialogue" et convaincre tout le monde que "tout est bien dans le meilleur des mondes possibles"; un traître à la patrie et un vil zélateur du pouvoir.
La colère montait en moi, et je voulais la crier dans ce poème.

un grand poème d'une grande sagesse ! tu as bien raison les tyrans meureunt et le peuple se réveillera tôt ou tard, j'ai bien aimé cette prouesse poétique riche en exemples et en métaphores

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@ textes protégés

Salut Bennhy
Merci pour ce très beau partage poétique!
"Les sages ont tout compris sauf qu'ils devaient se taire"Cioran
Amitiés
farid

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"Je n'existe que dans la mesure où j'existe pour autrui"
Manet




Mon blog : http://amedyazamazigh.blog2b.net

Un grand courage de ta part, un poème si engagé , merci pour le plaisir de te lire.

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MB CANDIDE

un poème d'une grande sagesse cher ami !
merci pour le beau partage!

Bravo et merci pour ce poème engagé. Ton texte est magnifique et ce qui l'a inspiré infiniment triste. J'ignorais que la Tunisie était un pays si peu libre... Nous Français qui nous plaignons sans cesse, nous avons au moins le droit de crier nos idées haut et fort (même si ça ne change rien). Est-ce que cela sera suffisant pour l'avenir de nos jeunes...

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Désolée, mon état de santé ne me permet plus de faire les mises en pages de recueils.

En effet, Bennhy, votre note d'explication était plus que nécessaire. Et je comprends bien mieux votre poème. Votre colère est vraiment de bon aloi.
Sans votre explication, en bas du poème, j'aurai répondu : Vous faites référence sans doute au Dieu qui punit de la Genèse (à mon sens, malgré la première phrase tirée de l'Evangile selon Saint Mathieu), je préfère celui des Evangiles... celui de l'Amour, de l'Espérance, la Rédemption et du Pardon...

Votre plume est puissante et fauche avec force ! Gare !

Merci à vous

Marie (Albatros)

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De la musique avant toute chose (Verlaine)
Là tout n'est qu'ordre et beauté
Luxe calme et volupté (Beaudelaire)

Un très beau poème, cher Bennhy, comme toujours, ta plume est tellement talentueuse...
Merci de l'explication en bas de page...
Tes mots sont profonds, d'une belle sagesse...je comprends ton cri...merci de l'avoir si bien écrit...et d'ouvrir les consciences et les coeurs...
Avec toute mon amitié,
Sophie.

Merci pour ce poème qui nous fait courageusement partager la vraie vision de ce qu'est un détournement de pensée pour servir les mensonges de la tyrannie.
HONORE

Je comprends tellement cette révolte ! Les Nicolas Ben Ali et leur bien-être écrasant de leur bassesse les problèmes que tu vois ! Au moins exprimes-tu cette "infidélité" qui m´est si chère et il nous faut rester lumières alors je mettrai une brêve parenthèse à tes mots, comme un espoir : Hier est l´aube du bel été de demain.
Amitiés

Qu'il est doux et réconfortant de voir que le poète n'étouffe pas le cri de la liberté de l'être et de sa pensée quand bien même on essaie d'éteindre sa conscience ...
Félicitation pour ta façon de penser, et pour ce superbe poème qui y puise sa source ... :)

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Le blog de ma muse ... N'hésitez pas à cliquer sur la bannière pour y jeter un p'tit coup d'œil ;)

Merci à vous tous mes chers amis, pour votre soutien et pour votre compréhension.

Aucun tyran ne peut triomphé du plaisir de la liberté .... Très jolie poème bennhy, c'est un cri du coeur .... et comme tu l'as dis la liberté et le peuple gagneront ce combat ..... je l'espère !

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... nous faut-il nourrir nos rêves et les réaliser aussi ?

un texte engagé , empreint de sagesse

The_End, Roky, mes chers amis, je vous remercie infiniment pour vos commentaires.

Les faux sages sont ceux qui baignent leurs multitudes dans des marres de sang.
Ce sont ces hypocrites qui ne cessent de faire battre du tambour
À travers les médias lourds pour tous ceux qui sont sourds
En faisant concourir leurs oiseaux de mauvais augure
Qu’on reconnaît facilement à leurs sales figures
Pour inciter leurs légions chaque jour
A combattre même l’amour
La Tunisie est le seul pays d'afrique où régne la sérénité, preuve en est avec ses millions de touristes chaque année..
Cites-moi un seul pays dans le monde qui ne possédent pas de prisonniers tous délits confendus.
Mon cher bennhy tu n'as rien vécu de la géhenne que nous avions vécu, et si tu avais seulement senti son souffle tu comprendras alors ce qu'est la sérénité..

J'envie vos dirigeants et votre peuple pour tous les efforts et les sacrifices qu'ils ont fait et font pour que ton pays demeure ce qu'il est

Une question que je te pose pour terminer.
Préféres-tu l'Irak de Saddam ou celui de nos jours?

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Celui qui éprouve du dégoût pour un arbre, ne doit pas profiter de son ombre.

Merci pour ce beau poème et tes explications. Cet écrit est une porte ouverte sur l'avenir, on y ressent qu'inéluctablement un jour la roue tourne. Je suppose qu'après avoir réussi à déposer tes mots tu as du te sentir soulagé. Il a beau être long, on ne se lasse pas du début à la fin, j'ai beaucoup aimé cette lecture.

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FORUM CITATIONS:
Je remercie Roky qui a créé cette vidéo où défilent les citations des gagnants mises en page.
http://img532.imageshack.us/my.php?image=nouveaumuvee001ti2.flv

A Gepeto: Merci pour ton commentaire, mon ami
A Grand vent: C'est là votre opinion et je la respecte. Mais, sauf votre respect, c'est apparemment vous qui ignorez ce qu'est la Tunisie actuellement."Sérénité"? mon œil! Si vous le désirez, envoyez-moi votre adresse e-mail et je vous enverrai des documents prouvant tous les crimes atroces commis par le gouvernement actuel. Soyez moins violent dans vos propos, je vous prie. Et ne me tutoyez point.

Je comprends que la situation dictatoriale et répressive de ton pays ne s'explique pas en trois mots. Voila un texte aussi long que profond dont le cri de révolte que j'entends ne peut être feint.
Bon courage ami.

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Citation :

Bonsoir Monsieur bennhy.

Mon sale défaut a toujours été celui de tutoyer les personnes qui n'affichent pas leurs photos, enfin ceux qui se cachent derrière un avatar.

Exceptionnellement pour vous je demande des excuses, tout simplement parce que votre avatar représente Napoléon sur son Imperial trône.

Amicalement.

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Celui qui éprouve du dégoût pour un arbre, ne doit pas profiter de son ombre.