Plume d'or Inscrit le: 5/3/2008 De: Tunisie Envois: 1238 |
Tristesse au bord de la mer Tristesse au bord de la mer
Ô, mer joyeuse que le vent caresse ! Ô, enchantement, éternelle paresse ! J’aime à voir, sur tes lumineux sommets, Ce soleil qui nous invite à aimer ; J’aime à écouter ces flots qui chantent Et ces oiseaux dont les lyres enchantent Tout ce qui a un cœur, tout ce qui a des yeux, Quand ils gémissent dans le jardin de Dieu Qui ordonne à l’univers de reluire Et ouvre son Livre où le sage peut lire Des mots vagues, immenses et mystérieux ! Chaque fois que, quittant ce monde furieux Dont le rugissement m’épouvante, J’erre, seul, loin des choses vivantes, Je sens l’aurore monter dans mon cœur Et je vois le jour au sourire vainqueur ; Chaque fois que, loin de la multitude, Je laisse la nef de ma solitude Me conduire à son rivage incertain, Je vois, comme un dieu, le charmant matin Ouvrir son œil blanc dans les ténèbres ; Mais dans mon âme que de pensées funèbres ! Mais dans mon cœur que de noires désillusions Quoi hantent éternellement mes visions ! Que de gouffres ouverts ! Que d’abîmes ! Ô, Dieu puissant ! Que votre est sublime Et que le mien est sombre et ténébreux ! Quand j’écoute le grondement heureux De cette mer profonde et infinie S’élever, comme une lointaine ironie, Au-dessus de mes râles impuissants, Petit devant l’immensité, je sens Dans mon esprit monter un nuage d’ombre, En vous tant de lumière, en moi tant d’ombre, Ô, sublime et céleste Jéhovah ! Je rêve d’aller où votre mer va ; Mais je ne vois que des écueils énormes, Que des rivages lointain et difformes, Pareils à des mirages beaux et songeurs Qui attisent la soif des voyageurs ! Oh ! Tout mon cœur est une vaste blessure ! Ces vagues, oiseaux humides qui murmurent Aux sages, qui savent les écouter, Tant de mots doux, tant de vers enchantés, Ne consolent point ma mélancolie ! Pareil au mort que les vivants oublient, J’entends gémir la lyre de mes douleurs Et quand je veux rire il me vient des pleurs ! Les flots de cette mer sont mes larmes !
Mais d’où viennent ces noires alarmes ? Ô, Seigneur ! Quand toute votre œuvre reluit, D’où vient, dans mon esprit, tant de nuit ? Quand l’aurore, si radieuse et si belle, Caresse joyeusement les ondes rebelles, Pourquoi suis-je triste et ne puis-je pas Dans votre éden laisser errer mes pas, Sans songer à la mort, au supplice, À la damnation, au précipice ? Hier, jeune encore et le cœur enfant, Mon œil était doux, mon front triomphant, Comme le front d’un héros antique ; La joie, enivrante et extatique, Dans ma coupe versait tout son nectar Et mon cœur rayonnait dans mon regard ! Oh ! Ma poésie, en ouvrant ses ailes, Louait la beauté, douce et immortelle, Et volait, comme un aigle, dans l’azur ! La nuit ténébreuse de ce monde obscur Ne descendait point, hideuse et fière, Dans mes chants pleins de grâce et de lumière ! J’étais heureux comme l’oiseau dans les prés, Je parlais aux monts, aux fleurs, aux forêts, Et je voyais avec les yeux de l’âme, Tout l’univers reluire comme une flamme ! Ô, temps éphémères et pourtant radieux ! Qui peut oublier vos mornes adieux ? Et qui peut oublier vos sourires ? Ô, c’est pour vous que mon cœur soupire ; Chaque fois que je vois tomber, en tremblant, Les cheveux gris de mes rêves si blancs ! Ce n’est point la vieillesse qui me tourmente, Mais mille visions houleuses comme des tourmentes, Mille pensées immenses, mille rêves inquiets ; L’abîme s’ouvre lentement sous mes pieds, Comme au matin une fleur paresseuse Qui déploie de ses pétales l’aile rêveuse ! Mon cœur n’est plus qu’un calice brisé Et le feu qui, jadis, a embrasé Le flambeau joyeux de ma jeunesse, A cessé de briller avec ivresse ! Ce monde, que ronge un mal inconnu, Comme la tempête terrasse l’arbre nu Terrasse mon esprit que le mal étonne !
Ô, nuit où aucun soleil ne rayonne, Ô, larmes du cœur que pleure l’esprit ! Comme un preux guerrier, par le fer surpris, L’homme blessé soudain se retourne Et, voyant de ses jours se vider l’urne, Demande au gouffre et à la nuit : « D’où vient que mon cœur souffre aujourd’hui ? Hier, je riais ! D’où vient que je pleure Et que dans mon cœur la joie ne demeure Pas, comme la rosée sur l’aile de la fleur ? Pourquoi vois-je l’épine hideuse du malheur Croître tout à coup, comme l’épine sur la rose, Dans mon cœur plein de funèbres choses ? Où va l’aile de mon soir endolori ? Je ne puis sourire, moi qui ai tant ri ! Je ne vois, dans la rivière de ma vie, Que ma nacelle tremblante, poursuivie Par les houles furieuses du destin ! »
Le gouffre et la nuit, hautains, En rugissant lentement, lui répondent : « Pauvre mortel ! Tu as aimé le monde Et oublié Dieu ! Tremble avec effroi, Pareil à l’enfant chétif qui a froid ! Du Seigneur vois toute la colère ! Mesquin et vil, tu cherchais à plaire Aux hommes, aux femmes, aux seigneurs et aux rois, Sans bénir le Seigneur en qui tout croit ! Tu as loué, mortel à l’âme impure, Au lieu du créateur les créatures, Tu as oublié, mais Dieu n’oublie pas ! Loin de son œil qui voit ton esprit las, N’espère point, mortel éphémère, Que bercent les lyres hideuses des chimères – La gloire, la fortune et l’ambition – Trouver dans son cœur de la compassion, Triste pécheur, malheureux coupable ! »
Ô, Dieu ! Loin de votre œil impalpable, C’est ainsi que nous errons, éperdus, Pleurant, comme l’avare l’or qu’il a perdu, Nos amours, nos gloires et nos rêves Qui, avant que le jour ne s’achève, Tombent, comme des roses qui ont trop pâli, Dans la gouffre nocturne de l’oubli !
*Désolé pour cette éternelle et sempiternelle mélancolie...Je suis juste un homme à qui la grâce a manqué...
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