Mots proposés: vagabonde, enveloppe, strie, façonnable
« LA POESIE… POUR QUI ? »
Après avoir passé de longues nuits de doute
Le poète s’endort sur d’incertains lauriers.
La critique agressive est celle qu’il redoute,
Quand certains scribouillards ne sont pas orduriers.
Mais il affrontera compliments et semonces
Puisque l’œuvre publique engage au jugement.
Il devra se soumettre aux roses comme aux ronces
Car ce sont de ses mots le seul prolongement.
Son humeur vagabonde est maintenant transcrite.
Sur chaque page blanche il a couché son cœur.
Ne rien garder pour lui. Ne pas être hypocrite.
Publier ce recueil et se sentir vainqueur.
Au fond d’une enveloppe, il glisse, volontaire,
Ses si précieux écrits, avec application,
Comme ferait, c’est sûr, le plus grand diamantaire.
L’aventure commence en pays d’édition.
Alors il se surprend à rêver de la chance,
Les rotatives vont sur un rythme infernal.
Son recueil s’est vendu bien au-delà de France
Et le succès s’avère être international…
Quand il voit, au réveil, l’image dans la glace,
Il sent comme un affront cette face flétrie !
Sa muse, chaque nuit, le marque de sa trace,
Dessinant à son front une nouvelle strie.
Mais il sait qu’un matin ce sera formidable.
On lui annoncera que bientôt son recueil
Est fini d’imprimer et qu’il est façonnable.
Dès lors il oubliera de sa vie chaque écueil.
Mais il faut, pour l’instant, se remettre à l’ouvrage.
Le poète ne doit jamais cesser l’effort.
Les humains ont besoin de tout son éclairage
Car bien souvent ses vers ne sont que réconfort.
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Christian RAY avec Michel Drucker et Patrice Laffont